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Capitalisme : de la construction à la destruction

mardi 30 juin 2020, par Robert Paris

édito

Le capitalisme, dans sa période dynamique, a beaucoup construit et, dans sa phase d’extinction, il va tout détruire

On est très loin d’avoir vu jusqu’où va aller l’effondrement du capitalisme. Déjà le nombre de salariés licenciés grandit comme jamais et ce n’est qu’un début. Comme en 2007-2008, ce n’est pas quelques sociétés qui sont menacées de faillite mais toutes. D’ailleurs, la plupart des économistes sérieux reconnaissent que 2007 et 2020, ce n’est pas deux crises ou deux effondrements différents et successifs, mais que les palliatifs n’ont fait que faire durer la chute de 2007-2008 jusqu’à maintenant, seulement en aggravant son ampleur, notamment avec l’endettement public et notamment celui des banques centrales et des Etats.

Bien des commentaires politiciens ou économistes tentent de rassurer, soit en affirmant que tout ira bien dès que la pandémie sera terminée ou que les mesures des Etats vont limiter la casse. Mais la réalité est tout autre et l’effondrement continue, à peine ponctué par les distributions massives de milliers de milliards de dollars d’argent public distribués sur les marchés financiers qui les ramassent puis s’effondrent à nouveau.

Les mêmes commentateurs avaient affirmé que l’économie allait s’effondrer en 2019-2020, avant la pandémie mais cela ne les empêche pas de prétendre aujourd’hui que tout est de la faute de la pandémie. En tout cas, le fait est là, l’économie est en voie de… garage. Le monde capitaliste navigue doucement vers… l’arrêt. Cela ne signifie pas quelques faillites, quelques fermetures, quelques licenciements, quelques reculs économiques, sociaux et politiques mais un effondrement général et global inexorable, sans aucune solution pour barrer la route à la chute.

Tout est fait pour faire croire que tout le mal viendrait de la pandémie, que les bourses ne chutent que des rechutes de la maladie, que les entreprises ne s’effondrent que du fait du confinement ou du déconfinement ou encore de la « crise sanitaire », que les commerces ne chutent que du fait du confinement, etc. Mais le pétrole, les banques, l’automobile, le Bâtiment chutent aussi. Et tous étaient annoncés en chute libre au même moment à une époque où on ignorait le nom même de Covid et son existence.

On essaie aussi de nous faire croire que la chute va être limitée en étendue, en durée, en secteurs particuliers, en entreprises particulières, que seule une petite fraction de la population sera frappée et tout cela est complètement faux : la chute va être générale, massive et le capitalisme n’est plus du tout capable de faire fonctionner l’économie. L’affolement des classes possédantes va même aggraver et généraliser la chute. Il ne suffira plus alors de déverser des sommes folles des institutions financières internationales.

Pourquoi ce système devrait-il s’effondrer complètement alors que les crises capitalistes du passé menaient à une situation économique restaurée et à une reprise économique ? Pourquoi le capitalisme détruirait-il lui-même la société qu’il a construite ? Pour répondre à cette question, il faut comprendre ce qui a été le moteur de cette construction, quel était son carburant, quelles étaient ses limites et que peut-il se passer quand ces limites sont atteintes.

C’est seulement cette compréhension de la situation absolument nouvelle d’un capitalisme en bout de course qui permet de comprendre qu’à ce stade, sa frénésie de construction se tourne en frénésie de destruction de sa propre société.

Le système capitaliste a été, dans toute l’histoire des sociétés humaines, celui qui a le plus produit de richesses matérielles nouvelles, et de très loin. Cela ne signifie nullement que le développement économique et social de l’humanité ait jamais été un souci de sa part. C’est une retombée absolument involontaire de son système de production et de propriété qui diffère de tous ceux des sociétés qui l’ont précédé. Car le but ultime de ce système qui a dominé longtemps le monde, mais qui n’est que l’un des très nombreux systèmes socio-économiques produits par les sociétés humaines, n’est pas l’enrichissement de la population et n’est même pas l’accroissement de la production, des échanges ni même en soi de l’exploitation de l’homme. Non, le fonctionnement du capitalisme n’est pas le même que celui de la société marchande qui l’a précédé et qui se polarisait sur l’accumulation de marchandises. L’énorme différence provient du fait que c’est ce qui n’était que le moyen intermédiaire dans la société marchande, le capital, qui est devenu le but et le moteur du fonctionnement. Tant qu’un secteur permet de produire non pas des marchandises nouvelles mais de nouveaux capitaux, on considère qu’il est rentable. Le capitalisme ne produit ni des voitures, ni des avions, ni des services, ni des maisons, il produit… du capital. Il le reproduit avec accroissement. Il lutte pour l’accroissement du capital. La mort du capitalisme, ce n’est rien d’autre que l’impossibilité d’accroître la quantité de capitaux.

Qu’est-ce qui permet au capital, par une espèce de multiplication miraculeuse des pains, de s’accroitre comme si c’était un mécanisme vivant ? La société marchande n’a jamais pu le faire. Par la production et l’échange de marchandises on peut enrichir un marchand mais seulement aux dépens de l’autre, le total de richesses restant au mieux identique.

Il n’y a en fait aucun miracle à la capacité du capitalisme de « créer » des richesses supplémentaires. Il ne les a pas vraiment « créées » mais volées au Travail ! En achetant la force de travail, le capital a acheté une marchandise qui produit plus de richesses qu’elle n’en coûte et c’est là la résolution du miracle capitaliste : au bout d’un cycle de production, le capital s’accroît. Plus les cycles sont rapides et plus l’accroissement est grand. Plus il y a de capitaux investis, plus la valeur supplémentaire, la plus-value, extraite du travail humain, est grande.

Les crises capitalistes du passé n’ont jamais remis en cause de manière fondamentale ce fonctionnement. Elles ne provenaient pas d’une limite atteinte de la capacité d’accumuler du capital.

La première fois que le système capitaliste s’est heurté à cette limite, c’est en 2000 et, depuis, il s’est révélé incapable de la franchir. En distribuant gratuitement des milliers de milliards de dollars, les banques centrales et les Etats essaient de pallier momentanément à cette incapacité mais ces procédures sont très loin de résoudre le problème puisqu’elles l’accroissent.

En effet, en distribuant ces sommes colossales et en les déversant sur les marchés financiers, certes on évite la principale catastrophe des possesseurs individuels de capitaux, ne pas obtenir de revenu de leur capital, mais on aggrave la principale cause de catastrophe, qui n’est pas l’endettement public et privé croissant ou l’excès de la part de la finance. Non, le mal essentiel qui plombe le système qui est forcément aggravé par les mesures incroyables afin de distribuer des revenus fictifs au grand capital, c’est l’accroissement de la masse totale des capitaux alors que l’effondrement provient déjà d’une suraccumulation du capital.

Cela signifie qu’il n’y a pas d’échappatoire. D’un côté, le capital est, et a toujours été condamné à croître et cette obligation a toujours été la source du dynamisme du capitalisme, écrasant de sa supériorité économique et sociale tous les anciens systèmes. De l’autre, le fait d’avoir atteint des limites d’accumulation l’oblige à cesser de croître, ce que les propriétaires privés du grand capital ne peuvent absolument pas supporter.

Certes, les développements insensés des investissements spéculatifs, notamment les prêts aux Etats surendettés, ont pu un temps camoufler cette contradiction mais, depuis 2007, celle-ci éclate au grand jour de manière flagrante.

Et le produit de la chute va être la fermeture progressive de toute l’activité économique sans aucune relance possible par la suite. Les entreprises, grandes comme petites, vont chuter. La petite bourgeoisie, base sociale du système puisque les propriétaires du grand capital ne sont même pas un pourcent de la population, vont cesser de l’appuyer. La classe possédante n’ignore pas que kla révolution sociale devient dés lors inévitable. Elle choisit dès lors « la guerre », qu’elle la couvre du prétexte sanitaire, sécuritaire, nationaliste ou raciste.

La pandémie n’est responsable d’aucun de ces maux qui font que le capitalisme meurt. Ce n’est pas la maladie, ni le confinement ou le déconfinement qui tuent le grand capital. Et, si la pandémie elle-même est si mal combattue, c’est parce que le capitalisme étant à l’agonie, celle-ci sert magnifiquement à couvrir cette chute historique du voile de la « crise sanitaire ».

Ce qui importe dés lors, c’est de comprendre que le capitalisme ne va seulement faire chuter quelques entreprises en difficulté mais qu’il est mortellement atteint dans tout son fonctionnement. Curieusement, on trouve plus aisément cette analyse dans la presse capitaliste que réformiste. Les investisseurs en capital ont plus besoin de vérités sur l’état du système que les menteurs professionnels chargés de calmer le peuple travailleur.

Les réformistes ont plein la bouche de « solutions » politiques ou économiques consistant en réalité à sauver le capitalisme et les capitalistes eux-mêmes et leurs suppôts politiques seraient trop bêtes pour se résoudre à ces mesures ? Certainement pas !

Les propositions syndicales ou politiques pour redresser la situation sont mensongères car elles ne résolvent en rien l’écueil qui brise le Titanic capitaliste, le bloc de glace immense sur lequel est marqué que le plus grand triomphe du capitalisme est aussi son épitaphe : il a atteint ses limites.

L’humanité n’a pas atteint les siennes. Elle peut donner un nouvel élan à la société humaine à condition de changer radicalement les bases de son fonctionnement, de supprimer la propriété privée du grand capital, de fermer les bourses, les banques privées, de supprimer la spéculation et donner comme objectif à l’activité productive non plus l’accroissement du capital mais celui du bien-être humain.

Avec ses grands moyens étatiques, le capitalisme peut détruire plus vite les richesses qu’il a accumulées qu’il ne lui en fallu pour les produire, et il va détruire aussi tous les acquis économiques, sociaux ou sociétaux. N’attendons pas de tels événements régressifs et sanglants. Peuple travailleur, il est temps de prendre la direction de la société humaine et de la retirer à l’ancien régime ! Renversons des bastilles du grand capital, celles de la finance et celles des Etats capitalistes ! Tout le pouvoir et toutes les richesses au peuple travailleur du monde !

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