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Théodore Topolanski, dit Romain, alias Louis Guilbert, notre camarade

lundi 7 mai 2018

L’un des combats de Romain au sein de Lutte Ouvrière contre la majorité de Hardy

Romain répondait à Hardy-Girardot

Un article de Louis Guilbert dans Lutte ouvrières

Notre camarade Théodore Topolanski, dit Romain, alias Louis Guilbert, est décédé à Limoges où il résidait et où il sera enterré. Il avait 81 ans. C’était l’un des militants ouvriers de la Voix Ouvrière, puis de Lutte ouvrière, et c’est comme militant révolutionnaire trotskiste qu’il a participé à plusieurs mouvements de la classe ouvrière, en militant pour son auto-organisation et notamment il avait dirigé la grève à la Polymécanique de Pantin en 1971, une grève qui dura 35 jours avec occupation et fut victorieuse, après avoir entraîné les autres ouvriers du groupe Motobécane, grève menée sous son impulsion par un comité de grève. Refusant plusieurs dérives de son organisation, il a initié la formation de la Fraction de Lutte ouvrière. Nous nous sommes éloignés de la Fraction par la suite mais nous rendons hommage à un militant et un dirigeant de la classe ouvrière qui n’a jamais baissé pavillon ni mis son drapeau dans sa poche.

A titre de souvenir militant, voici un compte-rendu de la grève de la Polymécanique :

L’usine Polymécanique de Pantin, du groupe Motobécane, emploie 1.166 salariés. Fin avril, le personnel apprend que la prime de bilan tombe de 2,65 % des salaires à 0,1 %.

Le 30 avril est organisée une consultation du personnel ; sur 700 votants, les positions sont les suivantes :

52 % pour une grève à durée illimitée ;

28 % pour une grève à durée limitée ;

13 % pour d’autres formes d’action ;

7 % opposés à toute action.

Le 3 mai, l’occupation de l’usine est décidée en assemblée générale ; un comité de grève est constitué, comprenant des militants des trois organisations syndicales C.G.T., C.F.D.T., F.O. (tendance « Lutte ouvrière ») et aussi des inorganisés.

L’objectif final de rétablissement de la prime de bilan s’est rapidement transformé en augmentation uniforme des salaires, réduction du temps du travail, extension des droits syndicaux, contre l’avis de la C.G.T. qui voulait, confirmant ainsi la position confédérale sur les augmentations hiérarchisées, une augmentation en pourcentage.

Dès le départ, la direction porte plainte pour entrave à la liberté du travail. Le tribunal des référés décide d’attendre les conclusions d’un huissier expert, que personne n’aperçut jamais. Jugeant cette intimidation insuffisante, le directeur général, Conté, adresse individuellement une lettre à la femme et une aux enfants de chaque gréviste, les engageant à reprendre le travail. En annexe, sont joints des commentaires hostiles aux revendications, dont voici les extraits les plus savoureux :

— Paiement des jours de grève : « … nous nous efforcerons de récupérer dans les semaines à venir les heures perdues du fait de la grève. » ;

_— Retour à quarante heures de travail sans perte de salaire : « … cette demande n’est pas justifiée par les difficultés d’emploi dans la région parisienne. C’est un vœu exprimé dans le but d’assurer un plus grand bien-être… » ;

_— Avancement de l’âge de la retraite : « … Là encore, ce ne sont pas des raisons de difficulté d’emploi qui motivent celte demande. Dans son ensemble, la France a besoin du travail de ceux qui sont en état physique de le faire… »

Plusieurs réunions avec la direction eurent lieu et la dernière le vendredi 4 juin à 11h30. Alors qu’il y avait possibilité d’obtenir une indemnité plus forte en attendant le lundi, la C.G.T. décidait unilatéralement de consulter le personnel avisé par radio par la direction : sa décision était prise depuis la veille, le tract C.G.T. étant daté de 9 heures du matin, c’est le même stencil qui a servi à la direction et à la C.G.T. pour informer le personnel. Une majorité se dégage pour reprendre le travail.

Les résultats obtenus

Règlement des heures perdues

Indemnités pour heures perdues, 200 F, paiement de quatre jours de salaires ;

Aucune sanction.

Augmentation uniforme de 0,10 F de l’heure égale pour tous ;

« Prime de vie chère » uniforme de 51,15 F ;

Rappel uniforme de 260 F ;

Augmentation de 3 % avec minimum de 0,30 F de l’heure.

À partir du 1er octobre 1971, la prime de vie chère, fonction de la hausse des prix, qui était jusqu’alors hiérarchisée, sera égale pour tous et calculée sur le coefficient moyen 185 ; l’O.S. 2 a le coefficient 127.

Probablement pour la première fois en France, à partir du 1er janvier 1972, garantie d’augmentation du pouvoir d’achat non hiérarchisée, au moins égale à 2,65 % du salaire correspondant au coefficient moyen 185 (ce qui représente environ 5 % pour l’O.S.).

« Les revendications actuellement posées ne peuvent être considérées comme raisonnables. »

Et un résultat fondamental : l’organisation des travailleurs par eux-mêmes !!!

Lire aussi les réactions du patronat face à cette grève

Un commentaire de l’époque :

Mai-Juin 1971 : le prolétariat de France en lutte

Depuis une douzaine de jours, à l’heure où nous écrivons, une puissante grève de cheminots paralyse la France. Déclenchée contre l’avis de cinq syndicats sur sept, les deux autres la soutenant d’abord timidement puis s’y opposant franchement au bout de dix jours, elle ne s’en poursuit pas moins. Cette grève des cheminots, loin d’être un phénomène isolé, fait suite à toute une série de grèves qui ont éclaté en France depuis le début du mois de mai. Le manque de liens entre celles-ci n’est dû qu’à la volonté des syndicats, qui ont tout fait pour les isoler les unes des autres et les présenter comme telles. Sans cette attitude, tout tend à prouver qu’on aurait assisté à un « nouveau mai » dont l’ampleur et la profondeur ne l’auraient cédé en rien à Mai 68. C’est ainsi que l’on a vu la grève se déclencher d’abord chez Renault, parmi les ouvriers spécialisés, puis à la Polymécanique, à Pantin, puis chez Usinor, à Dunkerque, ainsi que dans une série d’autres entreprises. Enfin, au mois de juin, ce furent les cheminots qui prirent le relais, avec une combativité extrêmement grande, la manifestation du mercredi 16 mai l’ayant montré à l’évidence, de par l’ambiance qui y régnait et le nombre des participants. L’origine du mécontentement des travailleurs, il faut la chercher essentiellement dans la dégradation des conditions de travail et de vie. Le gouvernement, une fois de plus, cherche à faire payer aux travailleurs, et à eux seuls, les conséquences de l’inflation. Alors que ceux-ci, pour faire face à la continuelle montée des prix, réclament ne serait-ce que le maintien de leur pouvoir d’achat, le gouvernement et le patronat refusent avec cynisme. C’est pour répondre à cette attitude que les travailleurs se sont mis en lutte. Ils se sont alors rendu compte qu’ils devraient non seulement affronter l’ennemi de classe, mais aussi faire face aux appareils syndicaux qui, ouvertement ou non, veulent aider gouvernement et patronat à traverser cette période avec le moins de « casse » possible. C’est ainsi que chez Renault, alors que les travailleurs occupaient l’usine, la C.G.T. n’a cessé d’affirmer que seuls les ouvriers du Mans étalent en grève, et qu’à Billancourt il s’agissait d’un « lock-out ». C’est ainsi que chez les cheminots, alors que ceux-ci sont animés d’une rare détermination, alors qu’on peut parler d’une véritable grève générale bien qu’aucun mot d’ordre n’ait été lancé, on constate que les syndicats ne font rien pour l’organiser, et continuent de prétendre qu’il s’agit de grèves décidées à l’échelon local et reconductibles toutes les vingt-quatre heures. Les syndicats, dans les divers dépôts, tentent de faire reprendre le travail sans que la moindre satisfaction ait été obtenue. Les tergiversations, les trahisons des syndicats ont abouti à ce que dans bien des endroits, malgré leur combativité, les travailleurs ont repris le travail avant d’avoir fait plier les genoux au patron. Pourtant, là où les travailleurs ont su tenir le temps qu’il fallait, là où, sous l’influence de militants révolutionnaires, ils ont su donner à leur grève une direction représentative comme à l’usine Polymécanique, ils ont réussi à arracher des succès significatifs. Mais en général, les immenses forces mises en œuvre au cours de cette vague de grèves, dispersées, atomisées, n’ont pas réussi à se joindre, à passer à un niveau supérieur. Une fois de plus, l’absence d’une direction révolutionnaire s’est fait cruellement sentir. Mais on a vu apparaître partout un courant important de travailleurs qui ont pris conscience du rôle de frein joué par les syndicats. Et le fait qu’un tel courant existe est à la fois peu et beaucoup ; car si les organisations révolutionnaires réussissent à y trouver audience, alors, la situation sociale en France pourrait se modifier dans des proportions considérables.

Un article de Romain :

Les syndicats enfin unis… pour sonner la retraite ?

Mis en ligne le 19 janvier 2003

Pas facile à la simple lecture des programmes des différentes confédérations syndicales, de dire ce qui les différencie vraiment sur la question des retraites. Encore moins depuis qu’elles ont ensemble, en ce début de janvier, publié une déclaration en sept points affirmant la nécessité d’une réforme, accompagnée d’un appel à manifester le 1° février. Il y avait certes jusque-là la « bonne volonté » affichée par la CFDT d’aligner la durée de cotisation du public sur le privé à 40 ans, alors que FO ou CGT s’y déclaraient formellement opposées. Mais tous les dirigeants confédéraux s’étaient positionnés en adversaires des projets du Medef, jurant vouloir maintenir la retraite à 60 ans, le système par répartition et le niveau des pensions.
Après l’intransigeance…

La CGT par exemple, dans sa brochure de juin 2002, se prononçait pour « l’accès de tous, dès l’âge de 60 ans, à une retraite nette de cotisations sociales, représentant au moins 75 % du revenu d’activité, toutes primes comprises, lui aussi net de cotisations sociales ». Elle proposait « la validation dans tous les régimes, en plus des périodes de chômage, de maladie, d’invalidité, de service civil ou militaire, de maternité ou de congé parental, des périodes de formation (études supérieures ou apprentissage), de recherche d’un premier emploi d’abord, d’un emploi stable ensuite, et cela à partir de l’âge de 18 ans ». Elle se disait « favorable au retour aux 37,5 années de durée d’assurance tous régimes confondus... ». Avec dans le privé un calcul sur les 10 meilleures années et non les 25 comme depuis la réforme Balladur de 1993, et dans le public sur la rémunération de fin de carrière.

Mais que demande le peuple ?
…les ambiguïtés

Tous reconnaissaient cependant que du fait des « évolutions démographiques », financer les retraites nécessitera des ressources supplémentaires. Et les ambiguïtés commencent justement au niveau du financement. La CGT proposait l’intégration de tous les éléments de rémunération dans l’assiette des cotisations, l’extension de l’assiette des cotisations patronales à l’ensemble de la valeur ajoutée, la taxation des revenus financiers des entreprises. Rien à dire jusque là. Mais elle avançait aussi « le recours ensuite à des augmentations de cotisations pour faire face aux besoins de financement supplémentaires non couverts par les mesures précédentes »... Et précisait qu’elle était « favorable à des mesures d’harmonisation progressives et négociées, régime par régime, entre le public et le privé, d’une part et entre les différents régimes existants à l’intérieur de chacun de ces secteurs d’autre part, dès lors que celles-ci visent à assurer les mêmes droits aux uns et aux autres dans le respect des diversités et des spécificités ».

Dire simplement qu’il faudrait faire payer les patrons aurait été une formule certes moins emberlificotée… Elle aurait sans doute eu l’inconvénient de faire paraître les dirigeants de la confédération trop opposés à la « réforme » pour se poser en « partenaires » d’une négociation.

Quant à la durée de cotisation, que deviendrait-elle si était appliquée cette demande de la CGT – identique d’ailleurs à celle de la CFDT – : « une véritable liberté de choix pour les salariés d’anticiper par rapport à l’âge de 60 ans leur départ en retraite, ou au contraire retarder au-delà de cet âge leur cessation définitive d’activité… ». Difficile là de ne pas penser à « la liberté » pour les travailleurs de ne plus partir à 60 ans et à « l’égalité » entre public et privé via l’alignement par le bas de tout le monde, chères au gouvernement et au patronat.
Des compromis…

Si la CFDT ou la CFTC n’ont, dès le début, pas voulu se montrer hostiles à l’épargne salariale ou autres fonds de pensions, à la française ou pas, l’opposition de la CGT s’est trouvée fortement tempérée lorsqu’elle a annoncé sa participation au « Comité intersyndical de l’épargne salariale », un organisme permettant aux confédérations syndicales de mettre un pied dans cette nouvelle institution, où se retrouvent toutes les confédérations, excepté FO. La centrale de Marc Blondel n’avait pas manqué de fustiger le retournement de la CGT et elle dénonçait en termes justes les fonds de pension tout comme « l’épargne salariale » mise en place par Fabius. Elle précisait cependant : « Rien n’empêche les organisations syndicales de participer aux négociations obligatoires instaurées par la loi au niveau des entreprises et des branches, à condition de ne pas oublier les salaires et de ne pas prôner la capitalisation. Les organisations FO, par exemple, participeront à ces négociations pour ne pas laisser de côté une amélioration possible des revenus des salariés, comme elles le font pour l’intéressement et la participation ». Pas tout à fait sans FO donc…
…à « l’unité »

Les positions énoncées au départ des uns et des autres étaient finalement moins éloignées qu’il n’y paraissait. Au nom de l’unité syndicale, des retrouvailles ont donc été possibles, au moins pour un temps. La proposition de la CGT de faire une journée nationale sur la retraite a ainsi entraîné l’adhésion des autres syndicats.

L’accord du 6 janvier s’est fait sur des bases qui ont permis à la CFDT d’écrire au lendemain : « Pour la CFDT, ce texte, bien qu’étant un texte de compromis, reprend la totalité de nos demandes. » ajoutant : « FO, qui sort d’une campagne électorale pendant laquelle elle s’est opposée à toute idée de réforme, où elle a combattu l’idée de retraite à la carte et a défendu une durée de cotisation de 37,5 ans pour tous (…) en signant finalement le texte commun (…) a été, de fait, contrainte de manger son chapeau. »

Dans le texte en question ne figure effectivement rien sur les régimes spéciaux existants, rien sur le retour à 37,5 ans, rien sur la référence aux dix meilleures années, rien sur le temps de cotisation. Si la déclaration parle de « viser un haut niveau de retraite », leurs signataires se gardent de le définir et aucune indication n’est avancée sur le financement.

La journée du 1er février, surtout si elle était sans lendemain, ne nuirait donc pas à leur objectif de siéger autour du tapis vert. Elle pourrait même concourir à donner l’illusion qu’elles ont fait ce qu’elles ont pu. Ce serait dans le droit fil de la journée d’action du 3 octobre des fédérations d’EDF-GDF, laquelle a mené à une entente entre sommets – incluant la CGT majoritaire et la plus influente, mais à laquelle seule FO a refusé de s’associer – pour faire accepter la signature d’un accord, véritable capitulation. Heureusement, le résultat du référendum organisé par les dirigeants de la CGT s’étant transformé en désaveu pour son dirigeant fédéral Denis Cohen et pour les organisations signataires, va compliquer la tâche du gouvernement… comme des dirigeants syndicaux prêts à brader les acquis des travailleurs.

Quant aux organisations politiques de la gauche leur « opposition » ne saurait inquiéter ou réfréner ni le patronat ni le gouvernement. D’abord le Parti socialiste avait promis en gros la même réforme que celle de la droite. Ensuite le Parti communiste a repris en guise de programme sur les retraites les formules de la CGT. Ce n’est donc pas lui qui empêchera celle-ci de négocier tous les virages auxquels elle s’apprête. Comme elle il saura au besoin lui aussi se raccrocher au prétexte de l’unité syndicale, ou sans elle invoquer « l’autonomie du mouvement social »

Si les travailleurs ne comptaient que sur les confédérations syndicales ou sur la gauche pour défendre leurs retraites et faire barrage à Raffarin, ils auraient de quoi se faire des cheveux blancs !

Louis GUILBERT

La fraction de Lutte ouvrière au sein du NPA a édité une brochure sur la vie militante de Romain et, malheureusement, ce groupe a jugé préférable de ne pas parler des combats de Romain contre la majorité de LO et contre la majorité du NPA, c’est-à-dire de taire son activité politique de 1976 à 2018 !!!

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