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Les travailleurs doivent s’organiser et faire de la politique par eux-mêmes

dimanche 30 août 2009

ENCORE ET A NOUVEAU... S’ORGANISER

par Pierre BOIS

C’est un sentiment unanime parmi les travailleurs que la politique antiouvrière que mène depuis des mois le gouvernement au service des capitalistes aurait pu être brisée si la classe ouvrière avait posé ses revendications dans une grève générale comme en juin 1936, qui aurait, comme alors, contraint la bourgeoisie à capituler.

Le souvenir de juin 1936 reste vivant pour les ouvriers comme l’exemple de l’action qui leur a permis de remporter une victoire sur leurs ennemis.

Cependant, depuis des mois, la volonté de lutte des ouvriers s’est montrée tout aussi forte qu’il y a onze ans. Depuis le mois de mai, un mouvement gréviste d’une ampleur formidable a déferlé sur tout le pays. Malgré tous les obstacles dressés devant les ouvriers, et notamment l’opposition de leurs propres organisations syndicales, toutes les catégories, sans exception, sont entrées en grève.

Mais ce qui a manqué à ces mouvements, pensent les ouvriers, c’est le mot d’ordre d’unification, la coordination, que seules les organisations syndicales auraient pu réaliser, alors qu’elles se sont efforcées d’étouffer chaque mouvement avant qu’un autre n’éclate ailleurs.

Or, en réalité, en 1936 non plus il n’y avait pas eu de mot d’ordre de grève générale. En 1936, comme maintenant, ce n’est pas la C.G.T. qui a pris l’initiative du mouvement.

Il y a d’abord eu toute la montée du mouvement ouvrier depuis la tentative du coup d’Etat fasciste du 6 février 1934. Lutte économique contre le chômage et pour des augmentations de salaires, lutte politique contre le fascisme et la guerre, 1936 a été l’apogée de tout ce mouvement qui a pris cependant les dirigeants "ouvriers" tout à fait à l’improviste. Le 28 mai, la grève sur le tas éclate dans quelques usines (Farman Dewoitine Toulouse, Renault, Citroën-Javel). Le 29 et le 30 mai, la grève s’étend à d’autres usines, parmi lesquelles les plus importantes de la région parisienne. Ce n’est que le 31 mai que la Fédération des Métaux publie un communiqué, invitant les ouvriers au "plus large esprit de conciliation" et à conclure rapidement "des accords sur les revendications particulières à l’entreprise" restant entendu que les problèmes généraux que posent la conclusion d’un contrat collectif seraient résolus entre les patrons et les travailleurs par l’intermédiaire de la chambre syndicale patronale et des syndicats ouvriers. La Fédération, en demandant aux ouvriers de reprendre le travail sur des "revendications particulières", s’efforce donc d’endiguer le mouvement.

Mais, dès le 3 juin, le mouvement se développe dans les métaux et le bâtiment à Paris et déborde en province dans les produits chimiques, l’alimentation, etc. L’union syndicale de la R.P. dément "les bruits de grève générale"... Elle appelle plus que jamais les travailleurs à conserver leur calme.

Mais le 4 juin, de même que les jours suivants, le mouvement gagne encore en ampleur, et, dès le 2 juin, la C.G.T. et la "Confédération générale du patronat français" signent les accords Matignon en présence du président du Conseil et du ministre de l’Intérieur.

En 1936, comme en 1947, l’organisation manquait au mouvement ouvrier. Les organisations syndicales n’ont pas plus en 1936 qu’en 1947 déclenché la grève ; elles ont été à la remorque du mouvement gréviste. Mais en 1936, leur emprise bureaucratique sur la classe ouvrière était moins forte et leur dépendance vis-à-vis du patronat et de l’Etat moins poussée ; les dirigeants "ouvriers", tout en essayant de minimiser la portée du mouvement gréviste et s’efforçant de le faire rentrer au plus tôt dans "l’ordre", ne pouvaient pas le briser.

La bourgeoisie, d’autre part, se trouvait plus disposée à faire aux ouvriers des concessions qui, à l’époque, pouvaient lui conserver pour un certain temps la "paix sociale" et la préserver du danger de tout perdre faute de lâcher quelque chose.

Cependant, même en 1936, bien que le mouvement gréviste ait eu lieu pour l’ensemble de la classe ouvrière et arraché d’importantes concessions (augmentation des salaires, les 40 heures, les congés payés, les contrats collectifs), le bénéfice de ces concessions a été perdu par la suite, faute d’organisations ouvrières qui les défendent. Les dirigeants syndicaux qui s’étaient employés à calmer les ouvriers, se hâtèrent de leur demander la reprise du travail dès les premières concessions patronales, sans avoir arraché aucune garantie pour leur sauvegarde.

En 1947, la situation de la bourgeoisie est telle qu’elle préfère perdre des millions de journées de travail plutôt que de s’engager dans la voie des concessions ; et elle se sent d’autant moins obligée de le faire que les organisations syndicales lui sont encore plus inféodées qu’en 36. Et elles ont pu, par leur emprise bureaucratique sur la classe ouvrière, saboter directement le mouvement de l’intérieur.

En 1936, sans organisations dévouées à leurs intérêts de classe, les ouvriers ont pu néanmoins déclencher la grève générale et arracher leurs revendications. Mais faute de cette organisation, ils ne purent pas conserver les avantages acquis. Ce fut le 30 novembre 38, puis la guerre.

Les événements de ces derniers mois ont montré qu’il ne sert à rien de parler même de grève générale si on ne fait en même temps des efforts pour rebâtir de nouvelles organisations qui brisent l’emprise bureaucratique sur la classe ouvrière. Les travailleurs ne doivent pas attendre des directives de lutte de là d’où n’est venue que la trahison, mais s’organiser pour pouvoir opposer de nouveaux dirigeants et cadres ouvriers à l’ancien appareil bureaucratique pourri. C’est seulement ainsi que la volonté de lutte des ouvriers, qui n’est pas moins forte aujourd’hui qu’en 36, portera ses fruits.

L’organisation indépendante à la base d’une fraction combative des ouvriers de chez Renault (S.D.R.) a été le premier coup direct porté à l’emprise bureaucratique des organisations pourries. Des ouvriers d’autres usines, grâce à cet exemple, en arrivent aussi à la conclusion qu’il faut faire notre politique nous-mêmes contre le patronat dans l’usine et établir la liaison avec des usines entre elles. Les militants du rang de la C.G.T., qui veulent la grève générale, doivent renoncer d’en parler s’ils ne tirent pas, eux aussi, les leçons de l’expérience, s’ils continuent à se bercer d’illusions et n’aident pas les ouvriers à s’organiser sur la base des usines indépendamment des ordres de la bureaucratie cégétiste.

P. BOIS

8 octobre 1947

Messages

  • Les événements de ces derniers mois ont montré qu’il ne sert à rien de parler même de grève générale si on ne fait en même temps des efforts pour rebâtir de nouvelles organisations qui brisent l’emprise bureaucratique sur la classe ouvrière. Les travailleurs ne doivent pas attendre des directives de lutte de là d’où n’est venue que la trahison, mais s’organiser pour pouvoir opposer de nouveaux dirigeants et cadres ouvriers à l’ancien appareil bureaucratique pourri. C’est seulement ainsi que la volonté de lutte des ouvriers, qui n’est pas moins forte aujourd’hui qu’en 36, portera ses fruits.

    P. BOIS

    8 octobre 1947

  • Bonjour,
    Un incendie s’est produit à Paris dans le 18 ème arrondissement dans un hôtel insalubre, ou logent une majorité de travailleurs africains. Ces derniers avaient préalablement et à de nombreuses reprises alertés la municipalité sur la dégradation de l’hôtel (cas avéré de saturnisme, absence d’eau potable car contenant du plomb, structure électrique détérioré etc...) ceux ci leurs ont promis des relogements qui n’ont jamais eu lieu.

    Cet incendie n’a heureusement pas fait de victime mais cela aurai pu être une nouvelle catastrophe similaire à celle du Boulevard Vincent Auriol, ce qui prouve encore une fois le cynisme et l’hypocrisie de l’état et des autorités locales, à l’image d’un Delanoé versant ses larmes de crocodiles en 2005 face aux TV.

    Le mensonge grossier de l’état qui consiste à faire croire que ses caisses sont vides quand il s’agit de logements sociaux, hôpital public, école etc... et qui débloquent des milliards pour financer la guerre impérialiste en Afghanistan, qui débloquent des milliards pour sauver les banquiers.

    Mais les familles ont décidés de ne pas se laisser faire, ils ont occupés la Rue Duhesme (Métro Simplon ou Jules Joffrin) jusqu’à satisfaction de leur revendication à savoir un logement digne et décent.

    • Merci de ton information, Ramiro.

      Elle montre bien entendu que tous les jours des travailleurs sont amenés à s’organiser face aux maux du système qui les frappe.

      Dans les entreprises, le problème se pose différemment car, depuis des années, la bourgeoisie a mis en place un système de canalisation du mécontentement très perfectionné qui utilise les délégués, les CHS, les sysndicats, les CE, les concertations...

      D’où la nécessité de défendre l’auto-organisation et de combattre la tendance des syndicalistes et des militants en général à agir à la place des travailleurs...

      Robert Paris

    • appel au rassemblement de solidarité avec tout ces familles de travailleurs qui lutte pour leur droit au logement.ces familles qui travaille qui on demander de logement social, qui sons on situation régulières, certaines d’entre eux pays 600€ par mois pour des chambres de 9m,infestées de cafards,sans douche ni toilette ni même un coin cuisine.la mairie de 18e a fermer les grilles devant ces familles,les services sociaux ont refusé d’aider les célibataires,et ont fait des propositions d’hôtel dans d’autres arrondissements.ils on refuser, car ils veules plus vivre dans la précarité,et dépendant des services sociaux.parmi ces familles ya 58 enfants inscrits dans les écoles du quartier.

      Rassemblement de solidarité ce soir a partir de 18h sur place [47 rue hermel paris 18e]

    • L’idée que le pouvoir local n’est pas plus représentatif d’une quelconque démocratie et préoccupation pour les classes populaires, me semble à nouveau assez proche de ce qui peut se passer dans une entreprise.

      En fait l’illusion consiste à faire croire aux classes laborieuses qu’un syndicat ou un parti "de gauche" est mieux placé pour défendre leurs intérêts.

      ALors pourquoi et comment font ils pour faire exactement l’inverse ?

      La réponse tient essentiellement dans leur propre existence : en temps de crise surtout, la survie des organisations syndicales ou réformistes consistent à exister légalement pour entretenir la défense du système capitaliste.

      Si son existence était clandestine, nous serions déjà dans une phase de la crise, qui ne nécessiterait plus d’opposition car les classes laborieuses n’auraient plus d’illusion dans le système politique et économique. La classe dirigeante n’aurait plus besoin des ornements parlementaires pour se maintenir au pouvoir : le choc serait frontale entre exploiteurs et exploités.

      Pour l’instant les familles mal logées, sont comme des travailleurs licenciès, des sans papiers, des jeunes sans travail, des SDF, des retraités pauvres : ils sont les plus opprimés d’une société qui condanne en réalité tous les travailleurs à ce même sort.

      L’Etat Français et la plupart des collectivités en France, ont tellement d’argent, qu’ils sont encore capables de retarder les effets de la crise économique pour une part non négligeable de la population.

      Ainsi le rôle des organismes gérés en commun par l’Etat et les syndicats, mais aussi celui des municipalités de gauche surtout, et de droite aussi, est bien de combattre les classes laborieuses dans les moindres détails de leur vie quotidienne, afin de leur faire accepter la dégradation lente ou brutale de leur condition d’existence.

      Manque de place dans les crèches, refus d’allocations familiales sans justifications, radiation Assedic, clientélisme dans l’attribution de logement HLM, suspension des indemnités par l’assurance Maladie dans l’attente de reconnaissance d’invalidité physique etc...

      Les partis et les syndicats qui gèrent ce système, ne sont pas pour le changer, mais pour l’entretenir. Ce sont les partis de gauche qui sont les plus virulents à faire accepter ce système basé sur la défense du capitalisme.

      Car tout le social, que disent défendre ces réformistes, sont les concessions des capitalistes pendant les luttes de classes.
      Mais ces concessions visaient à se protéger des menaces révolutionnaires de la classe ouvrière : en 1948, 1971, 1905, 1917, 1936, 1945, pour les plus grandes dates, mais la 2eme partie du 20eme siècle a été très riche aussi en crises révolutionnaires dans le monde.

      Ces concessions n’étaient en aucun cas le résultat de victoires éléctorales locales ou nationales. Le capitalisme a sauvé sa peau, souvent en trompant les exploités avec le recours à une fausse démocratie soit disant compatible avec la machine d’Etat.

      On voit tous les jours que ceux qui sont les engrenages, de cette machine, ne tolèrent pas les grains de sable.

      Et c’est comme avec les sans papiers qui ont osé réclamer des papiers pour tous.

      Daniel Vaillant, maire du 18eme arrondissement de Paris, était ministre de l’intérieur de 2000 à 2002 sous Jospin. LEs lois Chevènement venait de passer et Sarkozy avait le terrain préparé en 2003, pour faire, soit disant, le tri entre les étrangers utiles ou pas à l’économie.

      La CGT, aux ordres du gouvernement, a décidé de controler les mouvements grèvistes qui commençaient parmi les travailleurs sans papiers.

      La CGT est devenu le gérant officiel, pour le gouvernement de la bourgeoisie, d’une politique raciste, discriminatoire et anti ouvrière.
      La CGT qui n’avait pris position pour la régularisation globale depuis les mouvement de 1996, a été jusqu’à expulser elle même des sans papiers réfugiés dans une bourse du travail.
      LA CGT et la gauche, ont fait le travail de l’extrème droite.

      DAns les communes, ces mêmes formations politiques gèrent au quotidien des politiques anti ouvrières.

  • absolument faire notre politique nous même contre le patronat dans toutes les secteurs ils faux pas conté ni sur les syndicats ni sur les partie politique.nous les ouvriers on vas décidés nous même .

  • Il y a exactement un siècle, les pêcheurs de Rivière-au-Renard, en Gapsésie, se rebiffaient contre un système économique qui était alors dominé par des compagnies anglo-normandes.

    La révolte éclata le 4 septembre 1909 entre pointe à la Renommée et Rvière-au-Renard.

    Depuis plus d’un siècle, l’industrie de la pêche était aux mains des marchands de poisson anglo-normands, comme Charles Robin. À l’époque, le prix payé aux pêcheurs pour la morue était dérisoire. Exaspérés, ces derniers décidèrent de dire non aux compagnies et se révoltèrent.

    « Le samedi, en fin de journée, c’est Joe Tapp à ce moment-là qui prendra au collet un des agents des compagnies [...] et qui lui dira : "Écoute, lundi si tu nous donnes pas se qu’on veut, je te sors le coeur du ventre" », raconte Jacques Keable, auteur du livre La révolte des pêcheurs.

    Les manifestations anarchiques des pêcheurs dureront trois jours et se transformeront en émeute. Quelques marchands seront tabassés. L’un d’eux blessera un pêcheur. « Les pêcheurs n’étaient pas armés, mais les marchands eux l’étaient, au moins certains d’entre eux. De telle sorte de Philippe Robril, qui était un marchand, va tirer sur les pêcheurs et blesser Urbain Chrétien », explique M. Keable.

    Effrayés, les marchands finiront par céder. Ils accepteront par écrit les exigences des pêcheurs. Selon plusieurs historiens, il s’agira là de la première convention collective des pêcheurs au Québec.

    Un procès bâclé

    La victoire et les célébrations seront cependant de courte durée. Humiliés, les marchands chercheront à se venger. Vingt-quatre pêcheurs seront arrêtés et jetés en prison.

    « Le procès a été une mascarade évidente. Il n’y a que les représentants des marchands qui témoignent. Ils témoignent en anglais. Les pêcheurs sont tous francophones, la majorité d’entre eux sont analphabètes, ils ne savent pas signer leur nom. Ils ne comprennent pas trop la liturgie du procès ni le jargon du juge. Alors, finalement, ils sont sans défense devant un tribunal qui règle leurs comptes à la bonne franquette », dit M. Keable.

    Ces évènements serviront de déclencheur à la création des coopératives de pêche au Québec.

  • « Depuis la fondation de l’Internationale, notre cri de guerre a été : l’émancipation des travailleurs ne peut être que l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. Nous ne pouvons tout simplement pas collaborer avec des gens qui disent ouvertement que les travailleurs ne sont pas suffisamment instruits pour être capables de se libérer eux-mêmes et que, pour cette raison, ils doivent être libérés par en haut, par une bourgeoisie philanthropique. »

    (F. Engels, Lettre à Bebel ,1879)

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