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Où va la France ? Les incendies des banlieues nous éclairent-ils sur la crise capitaliste en France ?

mardi 11 juillet 2023, par Karob, Robert Paris

Où va la France ? Les incendies des banlieues nous éclairent-ils sur la crise capitaliste en France ?

L’évolution de la France impressionne en Europe et dans le monde. Ce pays est passé de l’un des plus prospères et calmes à l’un des plus menacés, économiquement comme financièrement et socialement. Où va la France ? Eh bien, elle entre dans la zone des tempêtes sur tous les plans. La violence d’État (notamment celle de sa police) n’est pas séparable de la violence sociale qui misérabilise, pas plus qu’elle n’est séparable non plus de la manière violente qui accompagne la chute du système économique.

L’un des éléments marquants de cette situation, mais pas le seul, est la révolte de la jeunesse des banlieues qui en a marre d’être ciblée par les forces de répression et désignée du doigt, criminalisée, mise à l’écart, discréditée et misérabilisée. Elle suit la révolte contre la casse des retraites. Et tout cela dans une situation sociale à la limite de l’explosion et où la relance du mouvement des Gilets jaunes est sans cesse évoquée, chacun se souvenant que seul ce mouvement avait été capable de se faire réellement craindre des classes dirigeantes, notamment par leur auto-organisation, au point de les contraindre à lâcher dix milliards d’euros de mesures sociales pour calmer la révolte.

Dans tous ces événements sociaux, la dégradation de la démocratie bourgeoise s’est sans cesse accentuée. La répression violente des manifestants fait partie de cette chute des libertés qui a grandi depuis les mesures dictatoriales sous prétexte de pandémie, l’interdiction de manifestations et rassemblements, les tirs sur des manifestants désarmés. La révolte des banlieues rappelle la statistique des personnes tuées par la police qui croit d’autant plus que le « refus d’obtempérer » a été considéré par la loi comme motif pour que les forces de répression aient le droit de tirer.

Les provocations policières vis-à-vis des manifestants ou des jeunes de banlieues se sont tellement multipliées qu’on voit clairement qu’il s’agit non de bavures policières mais d’une politique gouvernementale visant à discréditer et criminaliser quiconque conteste, proteste ou manifeste. L’utilisation massive des media dans un sens de propagande des classes possédantes est devenue générale et systématique.

Le journal suisse « Le Temps » écrit :

« Le conflit des retraites est le symptôme de l’épuisement de ce gouvernement de l’extrême centre. Depuis trente ans, les avertissements n’ont pas manqué, que les majorités successives ont balayés d’un revers de main en criant aux corporatismes, à la paresse, à l’infantilisme du peuple. Administrée de manière autoritaire et souvent grotesque, la pandémie de Covid-19 a servi de crash test auquel n’ont pas résisté les services publics dont s’enorgueillissait le pays et qui lui fournissaient, au-delà de leurs prestations, une part de ses repères… L’interdiction de « l’usage de dispositifs sonores portatifs » pour éviter les casserolades des opposants, le bouclage policier des lieux où se rend le chef de l’État, le lancement de campagnes de rectification idéologique contre le « wokisme », la « théorie du genre », « l’islamo-gauchisme », « l’écoterrorisme » ou « l’ultra-gauche » sont autant de petits indices, parmi beaucoup d’autres, qui ne trompent pas le spécialiste des régimes autoritaires que je suis. La France est bel et bien en train de rejoindre le camp des démocraties « illibérales » … Sur fond d’évidement des partis de gouvernement, un « flibustier » – pour reprendre le qualificatif de Marx à propos du futur Napoléon III – s’est emparé du butin électoral à la faveur de la sortie de route de Nicolas Sarkozy, François Hollande, Alain Juppé, François Fillon, Manuel Valls. Il a cru « astucieux », pour continuer à citer Marx, de détruire « en même temps » la gauche et la droite pour s’installer dans le confort d’un face-à-face avec Marine Le Pen. Mais Emmanuel Macron n’a été élu et réélu que grâce au concours des voix de la gauche, soucieuse de conjurer la victoire du Rassemblement national. Son programme, libéral et pro-européen, n’a jamais correspondu aux préférences idéologiques que du quart du corps électoral, hormis même la part croissante des non-inscrits et des abstentionnistes qui sape la légitimité des institutions. »

(Lire ici)

Le journal suisse « Le Temps » écrit encore :

« La France brûle. Pour un homme qui se faisait fort de l’apaiser et clignait de l’œil à la banlieue lors de sa première campagne électorale, le constat est amer. Il vient après le mouvement des Gilets jaunes et une succession de mouvements sociaux de grande intensité. Tout cela était prévisible et fut prévu, comme était attendu l’embrasement des quartiers populaires, tant était connue la colère sociale qui y couvait… la mort de Nahel, loin d’être une simple bavure, était programmée. Elle est la conséquence mécanique de la démission du pouvoir politique, depuis trente ans, sous la pression corporatiste de la police qui n’a cessé de s’affranchir des règles de l’État de droit bien que lui ait été concédée, de gouvernement en gouvernement, une kyrielle de lois liberticides, jamais suffisantes, sous couvert de lutte contre le terrorisme, l’immigration et la délinquance. Jusqu’à la réécriture de l’article 435-1 du Code de la sécurité intérieure, en 2017, qui assouplit les conditions d’emploi des armes à feu par les forces de l’ordre. Annoncé, le résultat ne se fit pas attendre. Le nombre des tués par la police a doublé depuis 2020 par rapport aux années 2010. Le plus souvent pour « refus d’obtempérer à un ordre d’arrêt » : cinq fois plus de tirs mortels dans ces circonstances. Nahel est mort de cette modification du Code de la sécurité intérieure… Comme l’ont démontré depuis des années nombre de chercheurs, la violence policière est devenue la règle dans les « quartiers », et le refus des autorités politiques de prononcer ce vilain mot aggrave le sentiment d’injustice. Mais la vérité oblige à dire que ladite violence policière est aussi le prix du retrait de l’État qui a asphyxié financièrement le tissu associatif de proximité et démantelé les services publics en confiant à ses flics une mission impossible : celle de maintenir la paix sociale dans un État d’injustice sociale, prompt à l’injure publique à l’encontre de la « racaille ». Tout cela sur fond de dénonciation hystérique du « wokisme » et de vociférations sur les chaînes d’information continue des syndicats de police, dont les membres sont de plus en plus nombreux à porter sur leur uniforme la Thin Blue Line prisée de l’extrême droite suprémaciste américaine. »

(Lire ici)

Si nous partageons en partie le constat de ce journaliste du journal « Le Temps » sur la trajectoire de la démocratie capitaliste vers sa propre négation, les attaques contre le wokisme, la théorie du genre, l’islamo gauchisme, la théorie critique de la race, ou l’intersectionnalité, quand elles ne sont pas le fruit de l’extrême droite (Trump) ou restent sur le terrain de la critique bourgeoise et scientifique (avec certaines limites), les pro woke comme Biden et anti woke ont bien souvent en commun un anti-communisme viscéral et sont liés à ces camps bourgeois ! La fausse opposition woke-anti woke n’a d’autre but que de lutter contre toute politique communiste de l’extérieur comme de l’intérieur du mouvement ouvrier où l’extrême gauche opportuniste, électoraliste, liquidationniste et les syndicats en sont les promoteurs ! Le pouvoir capitaliste face à la chute du système mondial de domination capitaliste n’a d’autres choix que de créer toutes sortes d’oppositions pour opposer diverses fraction du peuple travailleur contre d’autres fraction tout devenant de plus en plus autoritaire et fascistes dans ses méthodes !

La pandémie covid comme les révoltes sociales ont été des occasions pour le pouvoir de détruire les droits démocratiques. La pandémie covid (avec notamment sa fausse politique de confinement) ont été des occasions de détruire le niveau de vie des plus démunis et la récession, l’inflation et les politiques antisociales ont fait le reste, créant un véritable gouffre entre les plus démunis et les autres, un gouffre que la révolte des banlieues ne fait que révéler.

La raison de ces politiques radicalement hostiles aux exploités, une véritable guerre antisociale, provient de la chute annoncée des finances de l’État et de l’économie.

L’État a tellement soutenu les capitalistes « quoi qu’il en coûte » selon sa propre expression qu’il n’est plus capable de le faire. Il serait déjà déclaré en faillite s’il ne planquait pas ses dettes sous des rubriques variées comme dettes des hôpitaux, dettes des écoles et universités, dettes de la SNCF, dettes d’EDF, dettes de la Banque de France et autres… Ceux qui ont fait crédit à l’État français gagnent de plus en plus d’argent, du moins qu’il n’est pas déclaré en faillite et les intérêts de la dette de l’État français augmentent sans cesse.

Même en ponctionnant durement la population, l’État ne peut pas se relever de son endettement massif.

Il en résulte une incapacité de plus en plus grande l’État français à « soutenir l’économie », traduisez à faire des cadeaux aux capitalistes.

C’est ainsi que l’on entre dans une phase où le secteur du Bâtiment, qui ne sera plus soutenu par l’Etat et les banques, va s’écrouler. Or, quand le Bâtiment va mal toute la sphère capitaliste va très mal…

Et, dans le domaine des banques privées cela ne va pas mieux : BNP ou Société générale sont aussi menacées que les banques américaines, suisses, allemandes, italiennes ou autres, et peut-être même plus, même si l’Etat et la BCE ont couvert leurs chutes successives.

L’endettement d’EDF atteint des sommes record. Mais l’endettement privé des capitalistes a dépassé tous ses records…Le journal capitaliste français Le Figaro explique que « Les engagements hors bilan de l’État, ces obligations de financement public à plus ou moins long terme, seraient en dérapage depuis plusieurs années, sans que l’on en ait averti les Français. Selon l’économiste Jean-Yves Archer, récemment auteur d’une tribune dans Les Échos, ils s’élèvent désormais à près de 4300 milliards d’euros au 31 décembre 2018, soit plus de 130 milliards d’euros par rapport à 2017, et quatre fois plus qu’en 2005. Une somme qui approche du... double de celle de la dette publique au sens de Maastricht (2315,3 milliards d’euros fin 2018) ! Des chiffres qui font bondir Nathalie Goulet, sénatrice (UDI) de l’Orne. Pour celle qui est rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l’État », le danger est bien réel pour le budget public français, notamment en cas de crise économique. » (Lire ici)

La France a emprunté au total 7,504 milliards d’euros à moyen et long terme. (Lire ici)

L’inflation frappe la France (Lire ici) et en même temps la récession (Lire ici). Même si le gouvernement affirme que l’augmentation de l’inflation et de la récession reculent (admirez la teneur mensongère d’une telle information : inflation et récession augmentent toujours de plus en plus mais relativement un peu moins…).

Pour le journal « Le Figaro », « L’effondrement généralisé menace la société française ». (Lire ici)

Pour le capitaliste « Entreprendre », « le bilan de la France s’effondre ». (Lire ici)

L’économie capitaliste française s’écroule : le nombre faillites grandit inexorablement. (Lire ici)

Dans « Capital », on peut lire que « La France est déjà retombée en récession ». (Lire ici)

Bien sûr, les autorités (gouvernement ou Banque de France) affirment le contraire…

L’endettement massif et inexorable des Etats capitalistes est lié directement avec la chute de l’économie. (Lire ici)

L’économie française connaît un trou d’air avant un pic d’inflation dès le début 2023. (Lire ici)

Le gouffre économique et financier qui se profile est directement lié aux explosions et répressions violents qui ont lieu en France.

Ainsi, les encouragements donnés par la présidence et tout le pouvoir aux forces de l’ordre qui frappent (comme des médailles à des policiers qui tuent !) proviennent de la nécessité pour l’État et les exploiteurs de se lancer dans la violence à un moment où la plongée dans le gouffre approche, au plan économique, financier et aussi, bien sûr, social.

L’État a besoin de situations violentes comme la révolte des banlieues pour justifier de faire monter en flèche violence d’État. Il fait ainsi semblant de défendre les « citoyens innocents et menacés » mais ne veut en fait défendre que les classes exploiteuses. Il ne faut pas s’étonner du fait que, dans un premier temps, nombre de travailleurs tombent dans le piège qui leur est tendu, dénonçant les jeunes de banlieues, comme ils dénoncent les plus démunis, croyant ainsi se protéger de la violence en se désolidarisant des plus démunis et des plus opprimés et croyant aussi s’en prendre aux responsables de ces violences. Mais ils se trompent : ces responsables sont les classes dominantes. La méthode ici est la même que dans les guerres et c’est en effet une guerre que la guerre antisociale. Et, comme dans les guerres, on ne peut nullement compter sur le soutien de tous les réformistes (même ceux qui se disaient radicaux ou révolutionnaires) qui, en temps de paix, se prétendaient du côté des travailleurs. En fait, le seul critère qui distingue les partis ou syndicats vraiment du côté des travailleurs, c’est d’œuvrer pour le renversement de l’État des capitalistes en militant en direction de l’État des travailleurs, par l’auto-organisation du prolétariat révolutionnaire allié à la jeunesse révoltée et au peuple en révolte. Le mouvement des Gilets jaunes à ses débuts a donné un exemple et un avant-goût de ce qu’une telle alliance peut donner. L’État comme les classes dirigeantes ont eu très peur de ce mouvement et cette peur explique encore aujourd’hui les politiques violentes de l’État contre tout démarrage de mouvement social. Ce n’est pas pour protéger les « bons citoyens » et le « vivre ensemble » que la police intervient aussi violemment dans les jeunes des quartiers pauvres, contre des manifestants des retraites ou des rassemblements écolos ou contre les Gilets jaunes, c’est parce que la classe dominante est en réalité plus faible que jamais, son appui dans la population est plus étroit que jamais et elle camoufle cela par la violence d’État qui laisse entendre que le pouvoir serait fort. Les classes dirigeantes ont très peur de ce qui va se passer lorsque l’État devra reconnaître qu’il est en faillite, quand l’économie française elle-même devra le reconnaître, quand les travailleurs verront toute leur vie menacée et ils tiennent à l’avance à accuser de tous les maux de la terre d’autres démunis, d’autres opprimés et exploités.

Face la violence des exploiteurs, les exploités et les opprimés ont le droit de se révolter, ont le droit d’employer la force, ont le droit de saisir les richesses qui leur ont été volées, ont le droit de tout réquisitionner, ont le droit de s’en prendre aux forces de répression qui tuent (plusieurs centaines de morts par an du fait des balles de la police) et mutilent (qui font perdre des yeux, des bras, des rates, des jambes…), ont le droit de s’armer et de s’organiser de manière insurrectionnelle, ont le droit de viser à prendre le pouvoir et à l’ôter aux classes possédantes.

C’est un révolutionnaire qui l’a dit bien avant Marx. Pendant la révolution française, Saint-Just proclamait : « Les malheureux sont les puissances de la terre. Ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent. » La Déclaration des droits de l’homme de 1793 l’affirmait haut et clair : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».

Et Marx rajoutait que les prolétaires n’avaient, dans cette révolution qui vient, que leurs chaînes à perdre et un monde nouveau à gagner !

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