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Japon : l’ampleur et la signification de la catastrophe nucléaire capitaliste !

mercredi 6 avril 2011, par Robert Paris

Au Japon, l’industrie de l’énergie nucléaire, comme partout dans le monde, est opérée sur la base du profit privé, conférant aux propriétaires des sociétés, aux fournisseurs et aux opérateurs une incitation continuelle à faire des économies aux dépens de la sécurité afin d’engraisser leurs objectifs économiques – notamment depuis que des dérogations gouvernementales spéciales dispensent l’industrie d’une responsabilité financière en cas de catastrophe.
Le réacteur de Fukushima, qui est vieux de 40 ans, a été conçu selon une technique fournie par General Electric et qui est actuellement loin d’être à la pointe du progrès. Cette conception dépassée se retrouve une demi-douzaine de fois dans d’autres installations nucléaires au Japon et au moins 21 fois aux Etats-Unis, dont le réacteur Toms River au New Jersey, à 100 kms à l’Est de Philadelphie et à 150 kms au Sud de Manhattan.
L’opérateur du complexe de Fukushima, Tokyo Electric Power (TEPCO), a un bilan médiocre concernant les questions de sécurité. En 2003, l’ensemble de ses 17 usines nucléaires avaient été provisoirement fermées suite à un scandale concernant la falsification de rapports d’inspection. Un autre scandale concernant la falsification de données avait eu lieu en 2006.
Selon le Los Angeles Times, « Les critiques ont depuis longtemps exprimé leur inquiétude quant à la sécurité des installations nucléaires japonaises, dont certaines remontent aux années 1970 et 1980. Fukushima est depuis longtemps dans la ligne de mire des critiques, tout comme la centrale nucléaire de Hamaoka qui se trouve à quelque 150 kms à peine au Sud-Ouest de Tokyo et qui est perchée sur une ligne de faille.
Le sismologue japonais, Katsuhiko Ishibashi, de l’université de Kobé avait démissionné en 2005 d’un comité élaborant les règles de sûreté pour les réacteurs parce que ses craintes concernant la construction de réacteurs nucléaires sur des lignes de faille avaient été ignorées. Il a dit au Times, « Le Japon est un archipel sujet aux tremblements de terre et sur son front de mer se trouvent 54 centrales nucléaires. C’est comme un kamikaze portant des grenades à la ceinture. »
La forte dépendance du Japon pour l’énergie nucléaire – les 54 usines comptent pour 30 pour cent de l’actuelle production énergétique, un chiffre qui est censé augmenter de 50 pour cent d’ici 2030 avec la construction de davantage d’usines – est le résultat de décisions prises par l’élite dirigeante japonaise au cours des ces quatre dernières décennies. En 1973, lorsque la guerre israélo-arabe avait provoqué un embargo pétrolier décrété par les pays de l’OPEP, touchant durement l’économie mondiale et particulièrement le Japon, l’énergie nucléaire ne représentait qu’une petite partie de l’approvisionnement énergétique du Japon.
Comme le souligne le World Nuclear Alliance sur son site Internet, « Le Japon dépendait d’importations de combustibles fossiles notamment de pétrole du Moyen Orient (en 1974, le pétrole produisait 66 pour cent de l’électricité). Cette vulnérabilité géographique et en raison de la dépendance pétrolière devint cruciale en raison du choc pétrolier en 1973. La réévaluation de la politique énergétique domestique résulta dans une diversification et notamment dans un vaste programme de construction de centrales nucléaires. Une forte priorité fut accordée à la réduction de la dépendance du pays aux importations pétrolières. »
Dans une économie mondiale rationnellement planifiée, l’installation de dizaines de centrales nucléaires sur des lignes de faille les plus actives de la planète, et dans une des régions qui a la plus forte densité de population, serait considéré comme un cas de négligence grave, voire de folie. Mais, dans l’économie capitaliste d’Etats-nations rivaux, il était impératif que la bourgeoisie japonaise s’assure, sur le plan national, d’un approvisionnement énergétique adéquat, étant donné que le pays ne dispose que de peu de pétrole et de gaz et que le charbon est insuffisant.
décembre 2010, voici ce que déclarait le premier ministre Japonais : « Le Japon ne peut échapper au tsunami de la récession mondiale, mais en prenant des mesures radicales, nous avons l’ambition d’être les premiers à en sortir ».

Ces mesures « radicales » avaient été annoncées en partie il y a quelques jours, déclenchant une grande crise politique : il s’agissait notamment d’augmenter de manière importante la TVA japonaise sur tous les produits, notamment alimentaires.

Et donc de précipiter les prolétaires japonais dans une misère encore un peu plus grande : au Japon comme ailleurs, la pression est déjà immense sur les pauvres, et comme dans tous les pays industrialisés, on pointe sans cesse du doigt la population âgée « qui va couter de plus en plus cher dans les années à venir.

20 % de la population japonaise vivait en 2007 avec un revenu trois fois inférieur au revenu moyen. Plus de 22% de la population travaille en temps partiel contraint. Au moins deux millions de jeunes sont contraints de se louer comme journaliers à des entreprises de placement, dans des conditions légales qui feraient passer nos agences d’intérim pour des pros du social.

Le prolétariat japonais vivait déjà en état de catastrophe sociale : juste avant le tsunami, des mouvement de grève très durs avaient éclaté, chez les pêcheurs, mais aussi par exemple dans les aéroports bloqués par les salariés.

Mais aujourd’hui, le tsunami réel n’empêche pas les capitalistes de continuer leur tsunami social, bien au contraire.

Les morts du tremblement de terre et du tsunami ne sont même pas encore comptabilisés , personne ne sait ce qui va advenir et si le plus gros accident de l’histoire nucléaire est déjà advenu , que la bourgeoisie se jette déjà sur l’occasion que représente pour elle ces évènements effroyable : hier la presse économique se faisait déjà l’écho de l’aggravation de la crise économique que tout ceci allait susciter, et déjà, les analystes de la bourgeoisie préconisaient une mesure urgente : accélerer les mesures de « discipline » budgétaires pour tenir le choc, en clair, affamer, précariser, exploiter à une vitesse décuplée.

Hier l’ensemble de la classe politique japonaise , en conséquence, a appelé à l’ « unité nationale », et à l’arrêt immédiat des « polémiques stériles « sur le budget, certains politiciens ont même osé dire que les résistances à la politique d’austérité semblaient désormais puériles et indécentes au regard de la « leçon du tsunami »

La leçon de ce qui est en train de se passer est pourtant claire pour TOUTE l’humanité : les capitalistes nous mènent droit au mur et à la mort.

D’heure en heure, ce dimanche les discours changent, et les médias nous tiennent en haleine : y’aura-t-il ou non d’autres explosions, est une catastrophe comparable ou pas à celle de Tchernobyl…

On ne nous parle pas naturellement de TOUTES les autres catastrophes en cours, même du côté des écologistes : quelles conséquences par exemple, auront les incendies des complexes pétrochimiques sur l’environnement, sur les animaux, sur les habitants de ces zones ?

Quel degré de pollution supplémentaire aura contaminé l’océan qui a charrié ces montagnes de déchets industriels, de matériaux toxiques avec lesquels les bâtiments, les voitures sont construits ?

Les capitalistes le savent-ils eux même ?

Probablement pas. Car leur préoccupation n’est pas de juguler les désastres en cours, de sauver les vies qui peuvent l’être, de préserver la planète.

Elle est simplement de redémarrer au plus vite la machine productive qui exige une consommation d’énergie sans cesse accrue , non pour satisfaire les besoins de l’humanité, mais pour garantir la reproduction du capital nécessaire à la domination bourgeoise.

Ils ne savent pas si d’autres explosions vont se produire dans les centrales nucléaires, mais ils savent que la note du Japon attribuée par les agences mondiales d’évaluation de la « santé économique et financière » des Etats ne baissera pas trop…Et pour cause, puisque l’ensemble de la classe politique vient d’en appeler au sentiment nationaliste pour renoncer à toute remise en cause de la politique de guerre économique menée contre le prolétariat.

Pendant la fin du monde, les affaires continuent, ce pourrait être leur slogan

Hier, loin des prétendues réunions de crise sur le nucléaire organisées pour la galerie médiatique, les dirigeants des pays européens prenaient une décision importante : le refus d’abaisser les taux d’intérêts des crédits contractés par l’Irlande, puisque les dirigeants de ce pays ne parviennent pas à briser la résistance prolétaire et à imposer suffisamment vite les mesures de destruction des droits sociaux.

Ce matin, dans tous les journaux, on loue le « sang froid » et l’ « unité » du peuple japonais, sa « discipline » et sa « confiance » dans les consignes gouvernementales.

Les préjugés racistes contre les Asiatiques sont utiles dans ce domaine : la propagande classique menée depuis des années sur la prétendue obéissance aveugle des Chinois et des Japonais à leurs chefs, l’amour de l’entreprise pour les Japonais, la culture de masse pour les Chinois sont toujours opposées à notre prétendu « individualisme ». On tente de nous faire croire qu’ailleurs dans le monde, le prolétariat n’existe pas en tant que classe consciente du combat à mener, on nous invente des exemples d’"unité nationale" qui n’existe pas.

Pourtant au Japon comme ailleurs, la guerre de classe va continuer, quelle que soit la suite des évènements .En chacun de nous, partout sur la planète, chaque nouvelle horreur déclenchée par le pourrissement capitaliste de plus en plus visible, fait grandir une certitude : aucune mesure d’urgence appliquée à telle ou telle de ses dérives ne peut sauver l’humanité.

L’urgence c’est d’arrêter le mode de production capitaliste et de reprendre le contrôle de nos vies.

La menace nucléaire est un symbole criant, pas le seul problème.
Redskins de france

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