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Comorbidités du capitalisme

samedi 9 octobre 2021, par Khider Mesloub

Comorbidités du capitalisme

Au mois de juillet 2019, donc bien avant l’apparition de la pandémie du Covid-19, sur un ton délibérément apocalyptique et avec un lexique abondamment médical pour souligner le caractère pathogène et mortifère du système économique libéral, nous avions rédigé ce texte prophétique sur l’état de morbidité avancée du capitalisme, publié sur des journaux électroniques algérien, français et canadien. Le diagnostic établi cet été 2019 est encore d’une brûlante actualité. Voici le texte initial intégral, remanié et augmenté. Les parties rajoutées sont indiquées entre parenthèses.

(Ce n’est pas le Covid-19 qui décime le capitalisme mais le capitalisme, en état de décrépitude généralisée virale, qui dévaste la santé de l’économie planétaire et de la population mondiale aujourd’hui précipitée dans la paupérisation absolue et le chômage endémique. Pour preuve, la pandémie a très peu nui aux entreprises. Ce sont plutôt les confinements démentiels qui ont occasionné les dévastations et désolations sociales, accéléré l’effondrement économique, intensifié le durcissement autoritaire des États et accru la militarisation de la société. Le capitalisme n’est pas victime du Covid-19 mais de ses propres contradictions contagieuses).

Les signes d’alerte de la phase dégénérative de l’économie libérale s’accentuent.

L’électrocardiogramme du capitalisme indique que le cœur de l’économie mondiale est dans une phase d’essoufflement. L’économie est marquée par une contraction productive, guettée par une syncope commerciale. Son rythme de croissance enregistre une faiblesse d’activité. Son pouls de profitabilité ralentit. Son volume de circulation marchande dans le corps du commerce mondial en crise est menacé d’apoplexie économique, doublée d’une troisième mortelle conflagration hémorragique aux conséquences meurtrières, mondialement pandémiques en matière d’hémoglobine. Au reste, cette matière sanguinolente constituera prochainement l’unique moyen d’échange entre les pays en belligérance pour réguler la crise (aujourd’hui, en phase préliminaire exterminatrice, en guise d’unique échange « commercial », le capitalisme est réduit à exporter dans tous les pays sa dernière vivante invention létale, à savoir le Covid-19 (ou plutôt son invariant terroriste médiatiquement amplifié : la Peur), propagé sur tout le globe terrestre, dernière arme virale destructrice lancée contre les forces productives, pour résoudre à sa manière dévastatrice sa crise économique : par la décimation des pans entiers de certains secteurs, notamment les petites entreprises, devenus, du point de vue du grand capital, obsolètes, et par la paupérisation généralisée de la population mondiale. Nul doute qu’il ne s’agit aucunement d’une maladresse gouvernementale si les petites entreprises sont principalement ciblées comme "non essentielles" au cours des récurrents confinements délibérément décrétés. De même, il ne s’agit nullement d’une coïncidence si la majorité des prêts garantis PPP COVID-19 est accordé à des grandes sociétés, au détriment des petites entreprises exclues du programme de crédit. Manière indirecte d’acculer le secteur des petites entreprises vers la déconfiture, autrement dit la disparition. À cet égard, il n’est pas inutile de relever qu’aux États-Unis, pays pionnier en matière de restructuration économique, depuis l’intronisation de Biden, les grandes entreprises ont décidé curieusement d’augmenter le salaire minimal fédéral à 15 dollars, aujourd’hui fixés à 11 dollars de l’heure. Les petites entreprises ne peuvent pas s’aligner sur un taux horaire de 15 dollars du fait de leurs difficultés financières, aggravées par les confinements. Seules les grandes sociétés, généreusement subventionnées par les fonds de relance estimés à plusieurs milliers de milliards de dollars, peuvent rémunérer leurs salariés à un taux supérieur. À court terme, nul doute, la majorité des petites entreprises va déposer le bilan, autrement dit disparaître).

Actuellement, rien n’arrête la morbidité du système capitaliste anémié. Aucune médication gouvernementale ou patronale ne peut guérir ce corps souffreteux moribond. Encore moins les onctions médicinales prônées par les charlatans politiciens de l’opposition réformiste de gauche comme de droite (c’est cette défaillance immunitaire productive du corps capitaliste, signe d’une incurable crise économique systémique, qui explique son inaptitude logistique à résister contre un bénin virus. Ce n’est donc pas le Covid-19 qui a provoqué la crise mais l’inverse : l’état de comorbidité du capitalisme a favorisé l’apparition du virus, sa propagation. Corrélativement, par sa débilité constitutionnelle et son incurie organisationnelle congénitale, le capitalisme a été incapable d’endiguer le virus du fait de son infirmité économique, sa sénescence logistique avancée, son agonie institutionnelle annoncée. Ses anticorps sanitaires ont été annihilés. Pour citer l’exemple de l’Italie et de la France, leur économie était déjà en phase de crise systémique avancée. Et sous couvert de santé publique, les gouvernements ont imposé des mesures de purgations économiques draconiennes et de contrôle politique militarisé de la population, avec comme conséquence la dégradation du niveau de vie, la paupérisation absolue des prolétaires).
Une chose est sûre : depuis des décennies maintenant, le capitalisme, tel un toxicomane addict à la cocaïne, vit sous perfusion de crédit, alimenté par les banques, pourtant régulièrement asphyxiées par les défauts de paiement, comme lors de la dernière crise des subprimes de 2007-2008. En dépit de cette médication surdosée, administrée à coups de milliards de subventions publiques, le capitalisme frôle l’overdose. La survie de ce corps capitaliste drogué est en sursis. Plongé dans un coma artificiel économique, maintenu en survie à l’aide de sondes alimentées de subventions financières étatiques soutirées dans les caisses du budget social du peuple, réduit, lui, à la paupérisation au milieu d’une société d’abondance, le capitalisme est en phase finale. Son pronostic vital est engagé. Le compte à rebours est enclenché. Le crédit du capital s’effondre : auprès des banques qui lui octroient pourtant généreusement l’argent à taux zéro, comme auprès du peuple laborieux qui attend le moment opportun pour régler son compte à ce système pathogène, mortifère. En tout cas, plus personne ne prête foi à ce système moribond. Ni n’accorde crédit à sa politique dégénérative. Ni à ses politiciens gangrenés par la corruption et la dépravation morale. L’heure des règlements de comptes avec le peuple spolié est venue (particulièrement aujourd’hui, au moment où il prouve son incapacité notoire à circonscrire un banal virus, tant son système immunitaire financier, du moins celui destiné à protéger le corps social, est déficient, déficitaire).

Aujourd’hui, tous les indicateurs de l’économie capitaliste sont au rouge. Le moindre toussotement régional provoque un rhume mondial. L’apparition d’une bénigne grippe financière en Chine déclenche aussitôt des sueurs froides sur l’ensemble des places financières internationales, accompagnées d’attaques de panique apoplectiques agitant toutes les institutions économiques, déchaînant des convulsions au sein de tous les organes des corps étatiques, pris d’angoissants affolements sur l’issue de la crise. Ainsi, à l’occasion de la dernière grave crise économique survenue en 2007-2008, tous les États capitalistes, affolés, se sont-ils précipités pour injecter des milliards de dollars pour tenter de réanimer les banques, asphyxiées par les produits toxiques générés par l’insolvabilité de millions d’Américains propulsés, malgré eux, vers le rêve (illusoire et éphémère) américain, incarné par l’accession à la propriété privée, matérialisée par la possession temporaire de la majestueuse maison payée à crédit.

Depuis cette transfusion financière dans le corps bancaire malade pour renflouer ses coffres amputés de leurs sources boursières, évaporées sous l’effet du défaut de paiement de millions d’emprunteurs ruinés, la santé économique de tous les pays est toujours aussi fiévreuse, pathologique, invalide. L’économie mondiale ne s’est jamais remise de sa dépression. La chute a été trop brutale et profonde pour permettre une hypothétique rémission. Le corps capitaliste est encore gravement perturbé par les effets dévastateurs de la dernière crise de 2007-2008. À l’instar des psychotropes qui soulagent l’anxiété avant de l’exacerber de plus belle, aucun rétablissement de santé économique n’est en vue. Bien au contraire, on s’attend à une rechute plus brutale (survenue finalement aujourd’hui à la faveur de l’irruption suspicieuse du Covid-19, surgi opportunément au moment où la crise économique systémique s’apprêtait à éclater avec une intensité mortelle. Tout se passe comme si l’apparition de ce virus avait pour raison d’être d’exonérer la responsabilité du capitalisme dans le surgissement de la crise, mais surtout de justifier la militarisation de la société afin d’éviter les explosions sociales, de verrouiller la contestation, d’anesthésier la conscience de classe, d’affermir l’union sacrée nationale derrière le capital, autrement dit son représentant légitime : l’État, ce Léviathan despotique). Ainsi, en dépit des remèdes de cheval administrés à très forte dose financière alimentée par les fonds publics – par la planche à billet et à crédit –, pour lui assurer un prompt rétablissement, ces thérapies ne semblent d’aucune efficacité (comme les aides actuelles, concédées par le pouvoir Macron aux entreprises, pourtant arrêtées par décision discrétionnaire gouvernementale dans le cadre des mesures de confinement, ne seront d’aucune utilité, car ces petites entreprises sont vouées inexorablement à une mort certaine, pour déclencher le « Grand Reset », une refondation complète de l’économie globale).

Aujourd’hui, partout, la crise est à son paroxysme. La conjoncture économique est calamiteuse : chute de la croissance chinoise, accroissement des protectionnismes, éclatement des accords commerciaux, exacerbation des tensions entre les États-Unis et la Chine, conflits militaires imminents, débâcle de l’Europe, effondrement des ventes, baisse de la production industrielle, explosion de l’endettement public et privé, défaillance des remboursements des dettes, augmentation endémique du chômage, etc. Cette grave crise perdure en dépit des injections massives d’argent public, du soutien des États au moyen de subventions apportées aux entreprises et aux banques, grâce à l’argent du contribuable, argent que le contribuable travailleur n’a pas encore produit, et donc n’existe pas. (Mesures portées à leur paroxysme aujourd’hui, à la faveur de la crise économique virale et létale, notamment avec les financements faramineux accordés par les Banques Centrales).

Quoi qu’il en soit, la dernière crise, aux effets toujours catastrophiques, marque une première dans l’histoire des crises du capitalisme. En effet, jusqu’à 2008, rarement l’État n’intervenait aussi massivement pour sauver les entreprises et les institutions bancaires en faillite. Les crises étaient résolues selon les normes capitalistiques de l’économie libérale : par la disparition des entreprises les plus fragiles. L’État laissait jouer les lois économiques du marché. En 2008, pour la première fois dans l’histoire du capitalisme moribond, l’État, refusant de laisser la crise se développer normalement par la liquidation des entreprises défaillantes, a décidé d’intervenir pour sauver avec les fonds publics et le crédit les entreprises et banques menacées d’effondrement. Par crainte de voir toutes les entreprises s’effondrer par effet de domino, l’État a été acculé d’intervenir pour soutenir les entreprises au moyen de l’endettement public porté à son summum. Par cette décision précipitée et improvisée de sauvegarde massive des entreprises et des banques, l’État venait de rompre ainsi avec les anciennes méthodes de règlement des crises résolues selon les lois de l’économie capitaliste : l’assainissement de l’économie par l’assassinat des entreprises et des banques les plus déficientes (opérations de sauvetage tous azimuts réitérées aujourd’hui à une échelle internationale inégalée, depuis l’écroulement de l’économie prétendument infligé par le Covid-19. La règle européenne des 3 % du déficit public annuel à ne pas excéder ne s’applique en vérité qu’aux dépenses sociales publiques mais plus au soutien aux entreprises et banques privées confrontées à la crise. Dès lors que la crise survient, menaçant la survie des capitalistes - non du capitalisme plutôt-, l’État des riches débloque aussitôt les moyens financiers exceptionnels pour subventionner les entreprises, même au prix du creusement abyssal du déficit budgétaire et du gonflement démesuré de la dette publique. Ainsi, pas assez d’argent pour augmenter les capacités d’accueil hospitalière, les personnels soignants, acquérir du matériel respiratoire, les équipements sanitaires, construire des unités médicalisées provisoires, mais des milliers de milliards débloqués pour soutenir les capitalistes).

Autre nouvelle pathologie économique : les capitalistes n’investissent plus dans les secteurs de la production pour cause de surproduction de marchandises. Ils préfèrent investir dans la sphère spéculative. Signe d’une dystrophie musculaire économique : le capitalisme n’a plus la force de fonctionner comme à l’époque de sa flamboyante jeunesse productive. Atteints de sénescence dégénérative, les capitalistes se réfugient désormais dans la spéculation financière, cette retraite anticipée avant l’heure de la chute finale, la mort imminente du corps capitaliste (aujourd’hui, plus que jamais en proie à des convulsions apoplectiques létales).
À l’heure actuelle, plus aucun capitaliste ne veut devenir industriel mais financier (aujourd’hui, avec la crise économique virale, même cette sphère spéculative lucrative mais néanmoins parasitaire est devenue une occupation cauchemardesque, pathogène, tant elle suinte de tous ses pores mercantiles le soufre). De sorte que le capitalisme fonctionne désormais uniquement sur la finance, la monnaie et le crédit, cette fabrique de la monnaie de singe très usitée dans la jungle économique contemporaine par les fauves de l’affairisme. Ces carnassiers financiers des temps modernes qui se nourrissent d’argent facile, tiré de la spéculation dévorante mais sans valeur réelle. À cet égard, accroître de manière exponentielle le capital sans augmenter en proportion les investissements productifs et la production de marchandises (création de la valeur) accélère davantage la pathologie mortelle de l’économie capitaliste. Surendettement et désinvestissement productif, voici à quoi est réduite l’économie parasitaire capitaliste, sénile. Production atone, États surendettés, banques sur-subventionnées par les fonds publics, capitalistes devenus l’ombre d’eux-mêmes par leur fuite spéculative dans les hautes sphères de l’agiotage, ce sont là les signes d’une comorbidité économique annonciatrice d’une agonie certaine.

De fait, les bouleversements politiques et sociaux actuels dans la majorité des pays, de la France avec les Gilets jaunes, en passant par l’Algérie avec le Hirak, à l’Angleterre avec le Brexit, le Liban et les États-Unis avec la guerre civile larvée, toutes ces convulsions sont l’expression d’une crise économique systémique du capitalisme, symbole d’un dérèglement de l’organisme gangrené par le cancer financier, incarnation d’une atrophie productive, d’une étisie des profits industriels, d’une stérilisation des investissements dans la production.

Ce système économique mortifère, intrinsèquement irrationnel, devenu incontrôlable, est aujourd’hui en faillite. Il se meurt, aidons-le à mourir, avant qu’il nous précipite avec lui dans sa débâcle suicidaire. L’humble humanité, contre la volonté des puissants, a su anéantir l’esclavagisme, le colonialisme, l’hitlérisme, le fascisme, le stalinisme. Il nous faut détruire la dernière société d’exploitation et d’oppression : le capitalisme. Pour construire une société sans classe fondée sur la satisfaction des besoins sociaux (non sur le profit), l’authentique réelle liberté (antithèse de la liberté formelle et surveillée parcimonieusement concédée par l’État des riches), l’horizontale et autogestionnaire démocratie populaire (antithèse de la démocratie despotique bourgeoise).

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