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Grève des cheminots en Algérie

mardi 18 mai 2010

La grève des cheminots suspendue en Algérie

La grève des cheminots en Algérie, déclenchée pour revendiquer des augmentations de salaire, a été suspendue hier suite à un accord signé par la fédération des cheminots avec la direction générale de la SNTF. Mais ce n’est pas cette fédération qui avait enclenché la grève : ce sont les cheminots eux-mêmes !....

Le bras de fer qui a opposé depuis une dizaine de jours les travailleurs à la direction générale de la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) vient de prendre fin hier, suite à un accord signé conjointement entre la direction générale de la compagnie et la Fédération nationale des cheminots en Algérie. C’est ce que nous a confirmé, hier en début de soirée, M. Abdelhak Boumansour, porte-parole de la cellule de crise des cheminots. Selon le syndicaliste, « les travailleurs sont très satisfaits de cette décision et promettent de fournir l’effort nécessaire pour rattraper le temps perdu ».

Un protocole a été signé conjointement entre la direction générale de la SNTF et la Fédération nationale des cheminots (FNC) concernant les négociations sur la convention de branche, nous a confirmé de M. Djamel Bichikhi, secrétaire national chargé de l’information à la FNC, joint par téléphone. M. Bichikhi a souligné que « les deux parties informent aussitôt la reprise effective des transports ferroviaires. Les négociations sur la convention de branche seront entamées sur la base de l’application de l’article 52 de la convention collective de branche, qui sera effective au mois de mai 2010 ».

Les cheminots ont déclenché le 8 mai une grève spontanée pour réclamer une hausse de leurs salaires qui n’étaient pas alignés sur le nouveau salaire minimum garanti (SNMG) de 15.000 dinars. Les grévistes ont réussi dimanche à arracher un accord avec la direction de la SNTF sur l’application de la convention de branche l’augmentation des salaires. La SNTF avait, dans un premier temps, refusé d’augmenter les salaires, faute d’argent. Mais les cheminots n’ont pas reculé, obligeant le ministère des Transports à satisfaire leurs revendications salariales.

Messages

  • algérie - Victoire de la grève des cheminots

    Dimanche 9 mai, en Algérie, les travailleurs de la SNTF (Société nationale de transport ferroviaire) entamaient une grève illimitée. Ce mouvement avait d’ailleurs été précédé quelques semaines auparavant d’une grève concernant les salaires des conducteurs de locomotives de la région d’Alger.

    Le mécontentement à propos des hausses vertigineuses des prix et à propos du pouvoir d’achat a éclaté lorsque les cheminots ont appris qu’ils n’auraient aucune augmentation, alors que des conventions de branche touchant une vingtaine de secteurs économiques venaient d’être signées entre la confédération syndicale UGTA et les entreprises. Le taux moyen de l’augmentation des salaires, fixé par ces conventions, variait entre 20 et 23 %.

    « La situation financière de l’entreprise ne peut pas faire face à d’éventuelles augmentations demandées par les travailleurs », déclarait un membre de la direction de la SNTF au début de la grève. Les grévistes, eux, exigeaient une augmentation. Ils invoquaient aussi l’application de l’article 52 de la convention collective, qui spécifie que le salaire de base ne peut être inférieur au salaire minimum. On apprenait que le salaire de base de certains cheminots ne dépassait pas 12 500 dinars, alors que le SNMG -salaire national minimum garanti, équivalent au smic- a été porté en décembre 2009 à 15 000 dinars (150 euros).

    La grève majoritaire a entraîné au bout de quelques jours la quasi-totalité des 10 000 cheminots de la SNTF, paralysant complètement le réseau.

    La direction a tout tenté pour casser le moral des grévistes, et a fait appel à la justice. Celle-ci, le 12 mai, déclarait la grève illégale et ordonnait « l’arrêt du mouvement de grève et la reprise immédiate du travail. » Cela n’a pas entamé la détermination des grévistes.

    On ne peut pas dire non plus que les grévistes aient été soutenus par les instances de l’UGTA. L’un des responsables de la fédération des cheminots, Djamel Bichikhi, reconnaissait d’ailleurs son impuissance à juguler le mouvement : « La direction sait pertinemment que la grève a été initiée par les travailleurs eux-mêmes, indépendamment de la volonté de leur hiérarchie syndicale. » En réalité, la grève a été initiée et organisée par des syndicalistes de base. Ceux-ci ont constitué une « cellule de crise » afin de coordonner le mouvement. Elle semble avoir joué un rôle dans la direction de la grève.

    Samedi 15 mai, la fédération des cheminots, ainsi que Sidi Said, le secrétaire général de l’UGTA, appelaient à la reprise du travail, « en vue de favoriser la négociation dans la sérénité ». Le seul résultat de cet appel a été la colère des grévistes. Le lendemain dimanche, alors que ceux-ci entamaient leur deuxième semaine de grève plus déterminés que jamais, la direction acceptait des négociations, mais en exigeant au préalable la reprise du travail. Les grévistes refusèrent. Finalement, en fin d’après-midi, la direction cédait. Un communiqué signé par la direction de la SNTF et par la fédération des cheminots annonçait des négociations sur la convention collective et sur la base de l’article 52. Cela signifiait que la direction s’engage à porter le salaire de base à 15 000 dinars, au minimum. Cela entraîne automatiquement une revalorisation de la grille des salaires, qui devrait représenter une augmentation d’au moins 20 % du salaire de base. Certaines indemnités calculées à partir de ce salaire de base devraient également augmenter.

    Les grévistes ont alors décidé de reprendre le travail, et le trafic a repris à partir de lundi 17 mai. Les travailleurs restent méfiants et vigilants, et ont lancé un avertissement à la direction : ils ont annoncé qu’ils se remettraient en grève le 1er juin si ses promesses ne se concrétisaient pas sur la feuille de paie.

  • Depuis cet hiver, la classe ouvrière d’Algérie a repris le chemin de la lutte. Qu’il s’agisse des cheminots, des enseignants, des agents hospitaliers, des ouvriers de la métallurgie et de l’automobile, grèves et manifestations sont de plus en plus sur le devant de la scène sociale, avec pour toile de fond commune des revendications sur les salaires et les retraites, une méfiance grandissante, sinon un rejet, des centrales syndicales et une forte combativité. Avec une inflation de 5,7 % pour 2009, l’économie algérienne n’est pas mieux lotie que celles de l’Europe et les prix grimpent tandis que la valeur du dinar plonge.

    Cinq mille salariés de la Société nationale algérienne des véhicules industriels (SNVI) se sont mis en grève début janvier, pendant presque une semaine, dénonçant les accords passés entre l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), le patronat et le gouvernement, visant à baisser les salaires et à supprimer la retraite anticipée (passant de trente à quarante ans de cotisation pour les professions officiellement reconnues comme les plus pénibles  !). “Comment ose-t-on demander à un homme qui ne mange chaque jour qu’un plat d’épinards de travailler pendant quarante ans devant un haut-fourneau  ? » disait un ouvrier. Cette grève a été émaillée d’affrontements violents avec la police anti-émeute, en particulier lorsque cette dernière a empêché les ouvriers de marcher aux cris de “Non aux salaires de misère  !” vers le centre de la ville de Rouiba, en banlieue d’Alger, et alors que la grève avait gagné sept autres entreprises de cette même zone industrielle. Qui plus est, les ouvriers pointaient clairement du doigt le patron de la centrale syndicale, Sidi Saïd, qualifié de “vendu” et de “syndicaliste bien grassouillet” par les grévistes.

    Chez les enseignants, trois mois après le mouvement de grève de fin 2009, ceux du primaire et du secondaire repartaient en grève à nouveau pour des revendications salariales, malgré les tentatives de l’UGTA de briser le mouvement.

    Dans les hôpitaux, 30 000 médecins ont arrêté le travail pendant plusieurs semaines, assurant seulement un service minimum et exigeant des revalorisations salariales.

    Les employés communaux, pour les salaires et pour la retraite sans condition d‘âge, se sont mis en grève au mois de mars.

    Durant le mois de mai, ce sont les cheminots qui sont entrés en grève totale plus d’une semaine, contre l’avis de la direction de la SNTF et de l’UGTA, qui déclaraient cette grève “illicite” et tentaient vainement d’imposer un service minimum, et de surcroît en-dehors du contrôle de la Fédération nationale des cheminots, accusée par les ouvriers de “trahison et de complicité avec l’administration”. Cette grève, dont la revendication principale portait sur les salaires1, a paralysé le trafic ferroviaire des gares principales du pays (Alger, Annaba, Oran, Constantine, etc.).

    Sous la pression des grévistes, mais aussi devant le risque de discrédit de plus en plus ouvert de la Fédération nationale des cheminots, qui a progressivement essayé de reprendre les choses en mains, la direction et le gouvernement ont fini par reculer, acceptant une revalorisation des salaires des cheminots en les alignant sur le SNMG (SMIC algérien), à partir du 31 mai et avec effet rétroactif au 1er janvier 2010.

    Anne

    1) Un cadre cheminot, après 30 ans de carrière, touche 19 000 dinars algériens, c’est-à-dire 190 euros environ.

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