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Pourquoi avons-nous besoin de philosopher et ne pouvons-nous simplement nous contenter d’observer le monde et d’agir ?

mercredi 5 décembre 2012, par Robert Paris

Pourquoi avons-nous besoin de philosopher et ne pouvons-nous simplement nous contenter d’observer le monde et d’agir ?

Bien des gens sont gênés à l’idée de devoir philosopher. Ils ont l’impression qu’on leur demande d’adhérer à une religion avec des préceptes arbitraires indiscutables, injustifiables, venus de l’extérieur de leur expérience et qui leur sont parfaitement inutiles. La complexité de lecture des philosophes leur semble prouver qu’on ne fait dans ces théories que couper les cheveux en quatre sans jamais en tirer aucun avantage concret pour la résolution d’aucun problème. Ils se disent que l’on ne pourra jamais donner raison à aucun philosophe et que la philosophie, contrairement aux autres domaines de la connaissance, n’avance pas, ne conclue jamais rien et ne tranche jamais rien. C’est donc un exercice gratuit et sans intérêt, du moins à leurs yeux. Faut-il se taper tout Hegel, tout Kant, tout Bergson, tout Kierkegaard, etc., pour finalement retomber sur son derrière ? Essayons de montrer qu’ils passent à côté de l’essentiel….

Ceux qui défendent cette thèse a-philosophique prétendent qu’il leur suffit d’examiner directement la réalité sans faire appel à aucune philosophie. Cela leur semble suffisant pour vivre, pour répondre aux problèmes qui se posent à eux. Ils prétendent qu’ils n’ont aucun présupposé, aucun a priori, aucune philosophie entre eux et la réalité.

Nous allons montrer que tous ceux-là ont une philosophie qu’ils suivent sans s’en rendre compte, sans la discuter, sans même savoir qu’ils la suivent et donc sans pouvoir la faire progresser.

Pourtant, sans cette philosophie, ils ne pourraient même pas vivre. Et elle est très loin de s’en tenir aux faits, à ce qui est prouvé, à ce dont on peut être certains. Ils fondent leur action, leur pensée, leur vie sur bien d’autres choses que des faits établis. Ils croient être libres de toute philosophie a priori alors qu’ils suivent une philosophie qui leur semble évidente et qui provient de l’héritage de l’espèce, de la tradition, de l’éducation, du sexe, de l’âge, du milieu social, de l’état du monde, de l’activité professionnelle, etc…

Pourquoi ne pourrions pas nous passer de philosopher ? Parce, pour l’essentiel des questions que nous sommes amenés à nous poser, nous ne pouvons pas avoir une réponse assurée, basée uniquement sur des faits établis, prouvés, indiscutables. Nous sommes tous contraints de vivre en fonction d’une philosophie et pas de faits assurés. Nous sortons le matin de chez nous en pensant que le soir nous retrouverons notre domicile mais, en fait, nous n’en sommes pas sûrs. Nous n’en avons aucune preuve acr il n’en existe pas. Mais nous ne pouvons pas concentrer notre attention sur ce risque. Nous avons en tête un schéma de la région où nous habitons : la maison, la rue, les transports, l’orientation, le plan... Nous ne sommes pas certains que ce schéma restera valable. Mais il nous est absolument nécessaire de penser que nous allons pouvoir prendre chaque matin la rue qui mène à notre transport, à notre travail puis de retour chez nous. Si nous devions sans cesse vérifier que tout est bien en place en retournant voir si cela n’a pas boué de place, la vie deviendrait impossible…

Nous voulons en être persuadés mais nous n’en avons en fait aucune certitude. La seule preuve est que, jour après jour, c’est le cas mais cela ne prouve rien sur l’avenir. C’est la philosophie de l’habitude. Dès que nous la mettons en place, nous ne l’interrogeons plus car cela nous affaiblirait. Cela polariserait notre cerveau sur des questions qui nous détourneraient de notre activité journalière.

C’est sur cette philosophie de l’habitude que nous nous fondons pour croire que le soleil se lèvera tous les matins, que la vie reprendra comme avant après chaque nuit, que nos proches seront toujours là, qu’ils vont nous reconnaître et nous aimer comme la veille… Nous n’en avons aucunement la preuve mais nous avons besoin de le penser car ce serait extrêmement déstabilisant de craindre sans cesse de perdre nos repères, nos proches, notre confiance en nous-mêmes. La première de ces pensées indispensables consiste à penser que nous allons rester le même….
Cette philosophie qui nous est transmise dans notre petite enfance est celle du non changement. Ne dites pas que c’est la réalité mais seulement que c’est rare qu’elle soit prise en défaut. Mais parfois les choses changent brusquement et rien de ce qui faisait notre habitude ne fonctionne plus…

Il y a d’autres philosophies inconscientes que celle de l’habitude. Il y a aussi celle de l’inhibition de la peur. Bien entendu, vous êtes comme moi et vous n’avez pas peur, en temps normal. Du moins, vous ne l’admettez pas. Tout comme moi. Mais convenons que la vie fait très très peur…. Même à ceux qui prétendent le contraire et tiennent à se convaincre qu’ils n’ont peur de rien !

Nous possédons tous dans notre fonctionnement cérébral un mécanisme de peur et un mécanisme d’inhibition de celle-ci. Nous avons absolument besoin de ces deux mécanismes pour réfléchir, penser, réagir, ressentir, vivre.

Le monde extérieur n’est plus celui de la forêt vierge, bien entendu et pourtant il reste très inquiétant pour l’être humain car la vie sociale est complexe et inquiétant et l’homme a beau faire, il ressent le besoin de s’interroger sur tout et aussi la nécessité d’inhiber ces interrogations pour ne pas être envahi par elles. Et aussi parce qu’il n’y a aucune réponse assurée et définitive à ces questions. Ceux qui se laissent envahir par ces questions disjonctent très vite… Il ne peut y avoir de réponse. Il n’y a pas d’autre moyen de se rassurer que l’inhibition de la peur. Tout comme la philosophie de l’habitude, l’inhibition de la peur nécessite un certain entrainement. L’entrainement, ce n’est pas seulement physique (sport, musique) mais psychologique. Même chez le sportif et l’artiste, l’entrainement est d’abord celui du cerveau. Le cerveau a une plasticité qui permet de favoriser les circuits neuronaux qui ont été beaucoup utilisés.

Ces philosophies fonctionnent automatiquement après la première enfance, ce qui fait que nous n’en avons plus conscience et que nous ne savons pas nécessairement que nous les employons.

Les êtres humains s’inquiètent énormément. Ils ont de multiples sources de peur : existencielles, physiques, morales, familliales, relationnelles, morales, professionnelles, sociales, etc… Mais fondamentalement, toutes ces « causes » n’y sont pour rien : la peur est nécessairement inscrite dans notre fonctionnement cérébral et peut être inhibée mais jamais éteinte. Le nier, c’est seulement l’ignorer.

La philosophie, nous en avons besoin pour vaincre l’incertitude du lendemain. C’est elle qui nous amène à nous projeter, à réfléchir à l’avance à ce que nous allons faire, à nous y préparer. Mais, comme on le dit souvent, rien ne se passe jamais comme on l’avait prévu. Et pourtant, nous avons besoin d’y penser à l’avance. Cette nécessité de nous projeter démontre que nous ne nous contentons pas des faits. Nous ne savons pas ce qui se passera demain mais nous essayons de nous placer dans ce lendemain pour penser ce que nous allons faire, nous préparer, imaginer nos réactions, celles des autres, les diverses possibilités.

On peut donner un exemple simple montrant que l’homme ne se contente nullement des faits établis, celui d’une personne qui attend un ami qui ne vient pas après un long temps d’attente. Nous ne savons pourquoi il n’arrive pas et nous n’avons aucun moyen de le savoir. Cependant, nous passons dans notre esprit une série de possibilités d’explication : un retard dû aux transports, une incompréhension du rendez vous, une fâcherie…

Nous vivons à partir de nos hypothèses et pas seulement en nous fondant sur des faits…

La philosophie est là pour combler les multiples trous inévitables de la connaissance du présent, du passé et de l’avenir. Combler les trous, c’est la philosophie du continu. Philosophies du temps continu, de l’espace continu, de l’évolution continue, de la causalité continue, de l’histoire continue sont des a priori que nous employons sans cesse, que nous remettons difficilement en cause et dont nous n’avons pas directement conscience. Comme la philosophie de l’habitude, du non-changement et de l’inhibition de la peur, ce sont des automatismes acquis dans la petite enfance et qui agissent sans remise en cause spontanée par la conscience. On appelle l’ensemble de ces a prioris indiscutés le « bon sens ». Et la plupart des gens estiment qu’on ne peut pas les rediscuter…

La philosophie du continu n’est pas davantage issue de la seule expérience comme les précédentes. Loin de la continuité, l’univers est fondé sur des mécanismes de bond, de saut, de révolution. Il suffit d’observer la nature, la vie, l’homme ou la société pour le constater : des changements brutaux en des intervales de temps très courts de la transformation relativement aux durées caractéristiques du phénomène lui-même. En un temps très court, une société bascule dans la guerre, un volcan entre en activité, une maladie se déclenche, un cap d’âge se ressent, une plaque continentale se met en mouvement, un nuage se forme ou se dissocie, l’eau se met à bouillir ou à vaporiser. La philosophie qui découle de l’observation n’est nullement une évidence et il est encore moins clair qu’elle mène à la notion de continuité. Si celle-ci est la plus fréquente chez des auteurs divers, comme chez la plupart des gens, c’est qu’elle est un a priori inconscient chez l’homme adulte.

Nous croyons savoir que le temps est continu, que l’espace est continu, que la vie est un continuum, que l’histoire est continue.

Pourtant, la science nous montre exactement l’inverse. L’histoire des sociétés mène par exemple à des chocs, à des ruptures, suivies souvent de véritables vides. C’est par a priori que nous construisons ensuite une évolution en prenant comme base la continuité. Nous relions les sommets de l’acquis pour en faire une progression. Par exemple, nous appelons évolution la suite des espèces évoluées, différenciées, complètement séparées, sans interfécondité, alors que la transformation s’est sans doute produite à partir d’espèce non entièrement évoluées, encore interdépendantes, inter-fécondes.
Les civilisations humaines nous semblent une lignée continue parce que nous relions leur sommet par une ligne continue qui n’existe que dans notre esprit. En fait, ce ne sont pas les mêmes hommes, les mêmes régions, les mêmes sociétés humaines qui ont produit ces sociétés qui ne se sont pas suivies sans interruption mais au contraire avec des ruptures remarquables et qu’il serait essentiel justement de remarquer et d’expliquer !

Le monde n’évolue pas du tout continûment. Il stagne puis, d’un seul coup, il avance brutalement en faisant un bond énorme. C’est ainsi que se transforment les états de la matière. C’est ainsi qu’évoluent les mœurs sautant d’un mode à autre, par générations. C’est ainsi que changent les grandes étapes du climat terrestre. C’est ainsi que se forment et se détruisent les structures émergentes, etc, etc…

Prenons un autre exemple de philosophie a priori, généralement utilisée, jamais discutée ni remise en question : la philosophie de « je ».

« Je » est un être libre, qui agit en fonction de sa volonté, qui choisit par lui-même, qui discute de manière interne et seul, puis réalise ce qu’il a voulu par sa propre conscience d’être individuel, voilà ce que nous dit cette philosophie spontanée ou acquise, celle qui nous guide à notre époque.

Pourtant, la réalité, c’est que l’homme est collectif, social, historique, dépend du mode de production, des institutions, des mœurs, des traditions, des lois écrites et non écrites, etc…

« Je » n’est pas un simple produit de sa propre volonté. « Je » n’a même pas décidé par lui-même quel humain il pouvait devenir, comment il allait pouvoir vivre, dans quel but, avec quels objectifs.

Cela n’empêche pas que chacun d’entre nous cherche sans cesse à satisfaire un « but personnel » qu’il s’est fixé dans la vie et qu’il croit avoir produit par lui-même sans être influencé par l’époque, l’entourage, le passé de la société, son histoire, ses origines… En fait, des influences rencontrées par hasard, la famille, l’éducation, l’époque, la société ont été déterminants dans ces choix mais nous n’en avons pas nécessairement conscience.

Notre « je » prétend ne pas dépendre d’un déterminisme animal, ne pas obéir à des instincts (alors qu’il ne fait tout au plus que les inhiber), ne pas être héritier de l’évolution de l’espèce, ne pas obéir à un détermisme historique, ne pas avoir des choix, des jugements, des goûts, des orientations définies par la transformation historique de la société humaine, ne pas avoir un déterminisme social, en somme ne pas dépendre de tous les combats qui se livrent du sein du cerveau comme au sein de la société.

C’est la philosophie du positif qui refuse celle du combat interne. Selon celle-ci, notre action est toujours réalisée en fonction d’un but que nous avons prédéfini, et donc positivement. Et pour comprendre le reste du monde, nous poursuivons cette image du positif. Nous demandons dans quel but, la nature a-t-elle doté les animaux d’ailes et nous répondons : pour voler.

Le « but positif » est une conception du monde qui prétend expliquer tout ce qui se passe en le transformant en relation « de cause à effet », en faisant comme si toute action était le produit d’une volonté ou d’un objectif à réaliser.

Là encore, le bon sens va vers cette philosophie positive qui veut que, si quelque chose se passe, c’est le résultat en était voulu. Très loin de ce qu’on observe dans la réalité du monde, c’est une philosophie qui soutient qu’il existe toujours un pouvoir qui est au dessus et a la haute main sur la réalité. On peut y voir la philosophie d’une humanité dominée par sa dépendance à la nature puis sa dépendance à des forces sociales qui le dépassent et à un système social qui l’enchaîne, y compris idéologiquement.

Notre philosophie positive est elle aussi une tendance inconsciente, non discutée qui paraît évidente au plus grand nombre et fait partie intégrante de ce que l’on appelle le « bon sens ».

En citant toutes ces philosophies que nous appliquons journellement sans en avoir nécessairement conscience, nous avons voulu montrer que celui qui croit se passer de philosophie se contente de philosopher inconsciemment sans interroger la validité de ces philosophies non discutées, non voulues, non vérifiées, non confrontées avec la réalité.

A l’inverse, philosopher, c’est interroger toutes ces philosophies inconscientes, les discuter, les critiquer, les confronter avec la vie, avec l’observation, avec le passé.

Cependant, pour un grand nombre d’auteurs comme de gens qui ne prétendent nullement être des penseurs, toutes ces élucubrations philosophiques sont une perte de temps et ne mènent qu’à une impasse. Ils estiment que l’action pratique, scientifique, technique, économique, sociale, politique a fait plus de bien que toutes ces discussions philosophiques sans fin. Bien des scientifiques, des économistes, des hommes politiques affichent ne pas avoir de philosophie. Et cette conception est particulièrement en vogue de nos jours sans d’ailleurs que ceux qui s’en réclament se rendent compte qu’ils sont ainsi reliés à la situation particulière de la classe dirigeante d’aujourd’hui, une classe qui perd pied. Ils affirment que ce serait quitter la réalité que de discuter à perte de vue sur des propositions invérifiables, improuvables, sans fondement réel.

Mais y a-t-il moyen de discuter de la réalité, de l’interroger, d’en tirer des leçons sans concepts, sans raisonnements, sans mode de description des processus, en somme sans philosophie ?

Le physicien quantique Heisenberg n’expliquait-il pas qu’une expérience de physique, elle-même, n’était pas qu’un attirail technique mais d’abord un mode de questionnement de la réalité avec des présupposés, des concepts, des paramètres et des relations entre eux, qui indiquent ce que l’on doit mesurer et pourquoi. Il contredisait ainsi la croyance en l’objectivité de l’observation scientifique et rappelait que la science elle-même était une activité humaine nécessitant une philosophie. On n’observe qu’en fonction de cette philosophie et l’avancée de la compréhension du monde est un combat contradictoire entre avancées théoriques et pratiques, chacune faisant progresser l’autre par remises en cause incessantes.

Mais, direz-vous, n’est-ce pas de l’idéalisme (et donc un anti-marxisme) que de considérer que notre pensée ne se contente pas d’observer la réalité ?

Non, pas du tout. L’idéalisme consiste dans l’affirmation que l’idée domine le monde matériel. On peut avoir une conception complètement accrochée à l’observation et développer une conception idéaliste en affirmant que ce qu’on a trouvé ce serait la réalité elle-même alors que ce n’est qu’une pensée humaine sur le réel.

Le matérialisme consiste en l’affirmation d’une réalité objective qui n’existe pas seulement dans l’œil de l’observateur et dans celle de la nécessité d’aller à la recherche de cette réalité objective par nos moyens humains, limités et subjectifs. L’idéalisme affirme, au contraire, que l’idée crée la réalité.

La religion est un exemple de pensée idéaliste mais ce n’est pas le seul. La conception la plus courante de la science, y compris chez les scientifiques eux-mêmes, est aujourd’hui fréquemment de type idéaliste, même quand les scientifiques se croient matérialistes parce qu’ils prétendent s’en tenir à décrire les expériences. En effet, la croyance en des résultats définitifs, absolus, indiscutables de la science suppose qu’on accède à la réalité elle-même par la pensée scientifique et en fait une pensée objective et non humaine. Cela mène à une conception dans laquelle la pensée scientifique dominerait la réalité, un idéalisme donc. D’où la notion de loi que la nature appliquerait… En ce sens, cette conception que l’on croit scientifique a souvent remplacé la croyance religieuse. On serait dominés par cette fatalité scientifique de la même manière qu’on était autrefois dominés par l’idéologie religeuse, indiscutables l’une comme l’autre. Ces adeptes de la science « aussi sure que un et un font deux » ne se rendent même pas compte du caractère idéaliste de leur science purement mathématique et indiscutable.

Au contraire, l’activité scientifique est fondée sur une pensée humaine, sujette à discussion, sans cesse remise en question et confrontée en permanence à de nouvelles expériences et discussions. Elle nécessite donc, dans les domaines physiques, chimiques, biologiques, développement, écologie, etc, de discuter publiquement et de manière contradictoire de la philosophie sous-jacente, de la rendre critiquable, amendable, de s’autoriser à la nier, à la combattre et à la contredire pour la faire progresser. Le plus souvent, les scientifiques eux-mêmes considèrent au contraire qu’on affiche la science comme une connaissance qui s’impose sans discussion, ni des scientifiques ni du public. Il suffit pour s’en rendre compte de voir les réactions aux critiques des tenants des cordes, du réchauffement climatique comme du nucléaire pour voir qu’on en est loin.

Pour la science, rien n’est défintivement certain.

Il n’est même pas sûr que la matière telle que nous la concevons à notre échelle ait une existence réelle et il est possible que la réalité du monde matériel provienne d’une matière beaucoup plus fugitive, composée de matière et d’antimatière n’évoluant pas dans l’espace et le temps tel que nous le concevons, mais dans un vide quantique discontinu.

Cela signifie que les fondements du matérialisme sont encore en discussion et non définitivement réglés.

La philosophie qui ressort de la physique quantique s’oppose à la philosophie du bon sens. Elle est discontinue (quanta), contradictoire (dualité), n’obéit pas à la logique formelle (le tout n’est pas la somme des parties), non locale, non linéaire, se fonde sur le changement brutal, sur des bonds, sur des sauts, sur des niveaux hiérarchiques d’organisation de la matière.

La philosophie dialectique qui est nécessaire à l’étude scientifique de la matière, de la vie, de l’homme et de la société est bel et bien la philosophie dialectique et celle-ci est contre-intuitive, c’est-à-dire non spontanée, non favorisée par l’influence sociale du monde actuel.

La discussion sur la philosophie n’en est que plus nécessaire pour comprendre le monde et le transformer…
La seule manière de se détacher, un tant soi peu, de nos déterminismes est la conscience de ceux-ci.

Il convient donc de rompre avec la conception des pragmatiques, des pseudo réalistes, de tous les a-philosophes qui prétendent que l’action pratique n’a pas besoin de repenser le monde.

Loin des conceptions continuistes, linéaires et positives nous avons besoin de trouver une conception de la dialectique des contraires qui coexistent entre les diverses échelles, une conception discontinue de l’espace-temps-matière construit par le vide, une conception de l’émergence de structure qui mêle ordre et désordre, une conception de l’Histoire qui mêle passé et présent, réel et virtuel, qui entremêle le potentiel et l’actuel, etc…

Cette philosophie ne peut pas être seulement le produit des philosophes mais de tous ceux qui ont besoin de penser l’univers afin d’y agir.

Refuser le changement philosophique, c’est refuser en fait l’avancée de la connaissance scientifique car changer la philosophie en liaison avec les développements les plus récents des sciences, pour la compréhensio scientifique du monde, c’est faire un bond….

Il faut repenser le combat entre matérialisme et idéalisme, entre métaphysique et dialectique, entre continuisme et discontinuisme, entre ordre et désordre, entre émergence et préexistence, entre holisme et réductionnisme, entre logique formelle et logique dialectique, etc…

Il y a du boulot sur la planche pour ceux qui ne considèrent pas que tout a été dit et qu’il y a juste à s’activer pour mettre en pratique.

Le monde reste à penser, autant qu’il est à transformer.

Tant pis pour les pessimistes qui sont les victimes de l’idéologie d’une classe dirigeante qui a renoncé à étudier le monde car, à juste raison, elle ne croit plus à son propre avenir historique.

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