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Quand les gouvernants français ne juraient que par Saddam Hussein…

samedi 19 septembre 2015, par Robert Paris, Tiekoura Levi Hamed

Quand les gouvernants français ne juraient que par Saddam Hussein…

Chacun ne se souvient plus que des deux guerres menées par les USA en Irak qui ont mené, finalement, à la suppression de Saddam Hussein et à la destruction de l’Etat irakien. C’est oublier les décennies pendant lesquelles les impérialismes occidentaux soutenaient à fond Saddam et en particulier depuis la révolution iranienne et la guerre Iran-Irak à laquelle toutes les puissances occidentales ont poussé Saddam, le laissant payer seul le prix de l’échec militaire et financier que cela a entraîné. C’est surtout oublier que les USA n’ont pas laissé le peuple irakien lui-même se débarrasser de Saddam en se révoltant. Ils étaient alors en guerre contre le dictateur, la première guerre des USA contre lui, celle de Bush père. Eh bien, il a suffi que la révolution contre Saddam gagne les peuples kurde et chiite pour que les USA rende au dictateur sa garde présidentielle pour les écraser !!!
La deuxième invasion américaine a mis fin au règne de Saddam Hussein, mais ouvert un chapitre sanglant de l’histoire de l’Irak, faisant du pays un champ de bataille entre insurgés et troupes étrangères, entre divers groupes armés, mercenaires et terroristes.

Malgré l’immense émotion de l’opinion publique à la suite du gazage de Halabja, la France, puissance dépositaire de la convention de Genève de 1925, s’est contentée d’un communiqué sibyllin condamnant l’ « usage d’armes chimiques où que ce soit ». L’ONU dépêchait sur place un expert militaire espagnol, le colonel Dominguez, dont le rapport, rendu public le 26 avril 1988, se bornait à noter que « des armes chimiques ont de nouveau été employées tant en Iran qu’en Irak » et que « le nombre de victimes civiles augmente ». Le secrétaire général de l’ONU déclarait le même jour que « les nationalités sont difficiles à déterminer, tant pour les armes que pour les utilisateurs de celles-ci ».

Assurément, les puissants alliés de l’Irak ne souhaitent pas une condamnation de Bagdad. En août 1988, la sous-commission des droits de l’homme des Nations unies estime, par 11 voix contre 8, qu’il n’y a pas lieu de condamner l’Irak pour des violations des droits humains ! Seuls les pays scandinaves, l’Australie et le Canada ainsi que des organismes comme le Parlement européen et l’Internationale socialiste sauvent l’honneur en condamnant clairement l’Irak.

Les choses ne commencent à bouger qu’après la fin du conflit irako-iranien et l’afflux en Turquie, en septembre 1988, de réfugiés fuyant une nouvelle offensive à l’arme chimique. François Mitterrand, le président français, dans un communiqué du 7 septembre, exprime son « inquiétude devant les informations concernant les moyens de répression employés à l’encontre des populations kurdes en Irak, et notamment l’emploi des moyens chimiques ». Sans vouloir s’immiscer dans les problèmes qui relèvent de la souveraineté irakienne, ajoute-t-il, il estime que les « liens d’amitié qui unissent l’Irak et la France l’autorisent d’autant plus à faire connaître son sentiment ». Le président George Bush, pour sa part, fait bloquer une résolution adoptée, à l’initiative du sénateur Claiborne D. Pell, par les deux Chambres et prévoyant des sanctions contre l’Irak. La Maison Blanche accorde même à Bagdad une nouvelle ligne de crédit de 1 milliard de dollars.

C’est seulement après l’occupation, en août 1990, du riche émirat du Koweït que le président Saddam Hussein deviendra la bête noire des Etats-Unis et qu’il sera qualifié de « nouvel Hitler » par le président George Bush. Utile, l’épouvantail survivra à la guerre du Golfe : non seulement les troupes américaines ne feront rien pour renverser le dictateur, mais elles laisseront, au printemps 1991, sa garde présidentielle écraser dans le sang la révolte populaire à laquelle le président des Etats-Unis avait pourtant appelé le peuple irakien...

La première guerre d’Irak

Qui était Saddam Hussein

Un régime irakien « ami de la France »

L’histoire de l’Irak

Les films :

Notre ami Saddam (partie I)

Notre ami Saddam (partie II)

Notre ami Saddam (partie III)

Notre ami Saddam (partie IV)

Notre ami Saddam (partie V)

Saddam et Chirac

Amis de trente ans

France-Irak, la coopération

Saddam Hussein et Pompidou
Saddam Hussein et Chaban Delmas

Saddam Hussein et Chirac

France-Irak : relations entre Etats

Chirac félicite Saddam

Chirac en Irak

Ses relations avec la France, rapportées par Saddam

Saddam Hussein et Mitterrand

Saddam, ami de Le Pen
Chirac en Irak

Chevènement et Saddam

Chaban-Delmas et Saddam

Les USA aussi… et surtout amis de Saddam…

Comment les USA avaient aidé Saddam à utiliser des armes chimiques

Saddam Hussein, ami des USA

Saddam agent de la CIA

Jacques Chirac et Jean-Pierre Chevènement sont loin d’être les seuls hommes politiques à avoir côtoyé Saddam Hussein et ses amis. Après la démission de Jacques Chirac de l’hôtel Matignon (résidence des Premiers ministres français) en 1976, Raymond Barre (Premier ministre de 1976 à 1981) entretient l’amitié franco-irakienne : 3 fois de suite, il se rendra en Irak en mars 1976, en juin 1977 et en juillet 1979. En 1980, Olivier Stirn et Jean-François Deniau font tour à tour le voyage à Bagdad.

La victoire de François Mitterrand en 1981 va-t-elle entraîner une modification des relations franco-irakiennes ? Pas du tout. Claude Cheysson, ministre des Affaires étrangères du premier gouvernement socialiste fait, à 2 reprises, une visite à Bagdad en 1982 et 1983. Idem pour Edith Cresson (futur Premier ministre en 1991) en 1983 puis 1984. Idem encore pour Roland Dumas (futur ministre des Affaires étrangères à partir de 1988 et pendant la guerre du Golfe) en 1985 et 1988.

La cohabitation ne change pas d’avantage les relations entre Bagdad et Paris. Ministre du Commerce extérieur, Michel Noir (futur maire de Lyon) ira 2 fois en Irak : en 1986 et 1987. Même déplacement pour son successeur, Jean-Marie Rausch qui fera le même nombre de voyages à Bagdad, en 1988 et 1989.

En sens inverse, les responsables politiques irakiens se bousculent pour venir à Paris : prix d’excellence pour Tarek Aziz. En octobre 1980, au printemps et à l’été 1981, en juin 1982, en janvier et mai 1983 ! A chacun de ses voyages, le ministre des Affaires étrangères de Saddam Hussein est reçu par un ou plusieurs membres du gouvernement socialiste dont Pierre Mauroy (Premier ministre de 1981 à 1984). Sans oublier les visites de dignitaires irakiens... Dans le désordre : Adnan Hussein, qui vient négocier un accord de fourniture de Mirage en juillet 1977 ; M. Maarouf, vice-président de la République d’Irak, en janvier 1979 ; M. Hammadi en juin 1980. Ajoutons également à ces visites celles de ministre à ministre.

Pour couronner cette Entente cordiale franco-irakienne, un peu moins d’une trentaine d’accords de coopération militaire aura été signée entre l’Irak et la France de septembre 1974 à janvier 1988. A noter que Jean-Pierre Chevènement (ministre de la Défense de 1988 à 1991), qui n’a jamais signé d’accord avec l’Irak, reste le dernier ministre français à s’être rendu à Bagdad, en janvier 1990.

Les régimes de dictature, pourtant, les puissances impérialistes s’en accommodent d’autant mieux qu’ils maintiennent leurs peuples dans la pauvreté et, par la force, empêchent toute révolte qui pourrait menacer leurs intérêts économiques. Les dictateurs africains sont reçus à l’Elysée et, en Amérique latine ou en Asie, les Etats-Unis ont soutenu les régimes et les dictateurs les plus sanguinaires, n’hésitant pas, comme au Nicaragua, à intervenir quand la population les renversait. Et puis, la guerre contre l’Irak incluait des pays aussi réactionnaires et aussi peu démocratiques que l’Arabie Saoudite où prévaut la loi islamique, le Maroc, la Chine de Tien An Men, et bien sûr le Koweït, dont seulement 6 % de la population a le droit de vote !
D’autre part, que Saddam Hussein soit un dictateur, cela ne datait pas d’hier. En 1963, il avait participé à l’assassinat de milliers de militants communistes. Arrivé à la tête de l’Etat, sa dictature avait continué à s’exercer, notamment contre la minorité kurde du pays ; ainsi, en 1988, la répression menée contre eux avait fait des milliers de victimes. Mais cela n’empêchait pas les puissances impérialistes, dont la France et les Etats-Unis, d’entretenir de bonnes relations avec lui, la France notamment depuis la fin des années soixante, en cherchant à développer des relations commerciales avec les pays arabes, face à l’impérialisme américain pro-israélien. Elle est d’ailleurs un gros fournisseur d’armes auprès des pays du golfe Persique, qu’il s’agisse de l’Arabie Saoudite, des Emirats, du Qatar ou de l’Irak. En janvier 1990, un an avant que Saddam Hussein ne devienne l’homme à abattre, Chevènement, alors ministre de la Défense et représentant de commerce pour Thomson, Dassault et Matra, avait déclaré, à propos d’une vente de matériel militaire à l’Irak, vouloir « affirmer la pérennité des liens avec ce pays ». Quant aux Etats-Unis, après la chute du chah en Iran et l’arrivée au pouvoir de Khomeiny, ils considéraient alors l’Irak comme une puissance capable de faire régner l’ordre dans cette partie du monde. Mais c’était alors l’ordre impérialiste, celui qui représente « la loi du droit », pour reprendre une expression de Mitterrand, alors que, lorsque les pays pauvres revendiquent leur part de revenus, on ne parle plus que de « la loi de la jungle ».

Les capitalistes français et leur gouvernement n’étaient pas favorables à la guerre des USA en Irak…

Dans un article intitulé " L’Irak, terre des contrats français ", L’Expansion du 26 février 2003 écrivait : " Peugeot, Schneider, Alcatel… les entreprises françaises redoutent les effets d’une guerre sur des relations commerciales vieilles de 30 ans ". La France occupait ainsi jusqu’en 2001 la première place à Bagdad, dans les grands chantiers de l’aéroport ou de l’autoroute du sud, ou pour le réseau d’eau, l’électricité, la centrale nucléaire de recherche. En 2001, Peugeot a signé un contrat pour 6000 véhicules et en 2003, le ministre irakien du commerce extérieur parlait sur France 2 d’un contrat de 20 000 véhicules avec Peugeot. Alcatel a signé pour 280 000 lignes électriques et ainsi de suite avec des trusts comme Legrand et Schneider Electric et de multiples trusts (chiffres cités par L’Expansion du 26 février 2003).

Selon Libération du 28 mars 2003 :

" Depuis 1996, la France était devenue le premier pays fournisseur de l’Irak avec près de 15 % des importations. L’équipementier Télécom Alcatel qui avait déjà construit le réseau téléphonique irakien dans les années 80 a ainsi obtenu un contrat de 80 millions de dollars (...) Pour certaines firmes qui travaillaient avec l’Irak, l’interruption des échanges se solde d’ailleurs par un problème financier. En 1990, la Coface, l’assureur des exportations, avait donné sa garantie à 20 milliards de francs avec l’Irak ".

Les patrons français avaient signé des contrats pour l’après embargo. L’Etat français les a suivis, a couvert des associations entre patrons français et irakiens, et les banques françaises aussi. En 2002, la Fédération des industries mécaniques françaises déclarait : " Par ailleurs, en Irak, les exportations françaises ont bondi de 206 % pour atteindre 142,5 millions d’euros ". Tous ont misé sur l’assurance que l’embargo finirait par être levé et qu’alors ce serait l’envolée des profits des sociétés françaises.

Selon Business Week du 7 février 2003 :

" Des négociations très avancées ont permis à TotalFinaElf d’obtenir il y a quatre ans les droits d’exploitation du champ de Majnoon, au sud du pays. Elle détiendrait une participation de 40 % sur ce site aux réserves abondantes (on parle de 20 milliards de barils). Elle aurait des droits sur un site plus modeste de 6 milliards de barils. De quoi placer TotalFinaElf au premier rang des opérateurs potentiels de ce pays, au coude à coude avec le russe Lukoil (…) L’opposition irakienne pressentie pour gouverner a averti qu’elle dénoncerait les contrats ".
Répondant à ces affirmations, un dirigeant de TotalFinaElf cité par L’Expansion du 19 mars 2003 essayait de rassurer pour enrayer la chute du titre : " Personne ne nous chassera d’Irak ".

Messages

  • Saddam Hussein n’était pas le seul dictateur ami personnel de Chirac. Ceaucescu ou les dictateurs africains l’étaient aussi...

    Chirac reçoit un hommage national concocté par Macron, celui qui se prétendait ni de droite ni de gauche et met ainsi en scène un soi-disant amour entre cet ancien chef d’Etat et « le peuple ».

    Même si tous les efforts politiques et médiatiques marchent un peu, Chirac avait été accusé par « le peuple » d’être « supermenteur » du fait des affaires et des procès qui ne l’ont pourtant jamais amené en prison, de s’être fait élire contre « la fracture sociale » qu’il dénonçait de l’avoir aggravé et d’avoir aidé au développement du chômage de masse et de la casse des droits sociaux, d’être l’ami fidèle… de tous les dictateurs, à commencer par ceux de la françafrique et d’avoir organisé tous les crimes et toutes les guerres pour préserver les intérêts de celle-ci contre les peuples d’Afrique.

  • A écouter les média on croirait que Chirac était presque un paysan de la Corrèze ou un petit garçon de café dans ce département alors que c’est un énarque parisien marié à une Chaudron de Courcelle et devenu bras droit du milliardaire profiteur d’Etat Marcel Dassaut !!

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