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Editorial - Qu’est-ce qui se trame au Niger, en Mauritanie, au Mali et dans tout le Sahel ?

lundi 27 septembre 2010, par Robert Paris

Qu’est-ce qui se trame dans le Sahel ?

La France est entrée en guerre à la fois dans quatre pays, mais la gauche et les syndicats sont incapables de dénoncer cette action. En effet, Sarkozy se fait passer pour l’attaqué et, pas par n’importe qui, par le terrorisme d’Al Qaïda ! Qui oserait dénoncer l’intervention militaire française alors que des civils français ont été enlevés et qu’un a été assassiné ?

Cela fait un moment que Sarkozy cherchait un thème pour détourner de la question sociale, des emplois, des salaires, des services publics et des retraites, un thème sur lequel il pourrait intervenir sans que l’on puisse le critiquer. Il a essayé l’identité française, les jeunes de banlieue, les sans-papiers, les Roms. Et maintenant, c’est le terrorisme islamiste…

Voilà une accusation qui peut sembler gratuite : ce n’est pas Sarkozy qui a inventé Al Qaïda et les travailleurs ne peuvent qu’être opposés au terrorisme. Sous-entendu, chacun doit être aux côtés de l’armée française quand elle intervient contre Al Qaïda, que ce soit au Niger, en Mauritanie, au Tchad, au Mali et, pourquoi pas, au Maroc et en Algérie, dans tout le Sahel où sévit le groupe dit AQMI, « Al Qaïda au Maghreb islamique »…

Mais les travailleurs doivent être contre tous les terrorismes et, particulièrement, contre le plus puissant : celui des impérialismes comme la France et les USA. Il y a bien plus de victimes civiles dans le monde dues aux armées de ces deux puissances que du fait des groupes intégristes. Et, dans le cas présent, en plus des victimes françaises, il y a déjà des victimes civiles des interventions françaises aux côtés des armées locales. Par exemple, deux femmes ont été tuées dans une intervention française aux côtés de l’armée mauritanienne. Cela aussi, c’est du terrorisme et nous devons le dénoncer.

Quand la France soutient toutes ces dictatures, ce n’est pas pour combattre le terrorisme, mais pour défendre leur exploitation du territoire, comme l’uranium du Niger… Un minerai qui allait servir pour le nucléaire militaire français (les bombes atomiques quoi de plus terroriste comme à Hiroshima et Nagasaki, même si, pour le moment on ne s’en sert pas). Qui, sinon la France, a aidé à organiser les coups d’états militaires au Niger et en Mauritanie ? Quelles concurrences avec la Chine et les USA sont à la source des interventions françaises, bien plus que la lutte contre le terrorisme ? N’est-ce pas plutôt une lutte contre l’influence chinoise, notamment à Agadez et Arlit, pour le contrôle des mines d’uranium ? L’ancien dirigeant du Niger n’avait-il pas trop tendu la main à la Chine aux yeux de la France ? N’est-ce pas du terrorisme contre les civils d’exploiter ainsi les mines de ces régions en contaminant gravement les population et en refusant de les indemniser ? N’est-ce pas ignoble de piller ces richesses en enlevant le bénéfice aux peuples ? N’est-ce pas ainsi que l’on favorise la propagande des idéologies des intégristes ?

Mais, direz-vous, Sarkozy n’y est pour rien si AQMI a attaqué des civils français ? Il ne fait que les défendre et tenter de les récupérer en attaquant ces terroristes ? Les protéger dites vous ? Mais on apprend que dès le début des vacances, le gouvernement français savait que des groupes agissaient près des mines d’uranium du Niger où travaillaient des salariés de Areva, le trust du nucléaire. Et il n’a rien fait pour les avertir ni les protéger. D’autre part, il a mené des opérations militaires dans ces divers pays en annonçant ainsi qu’il déclarait la guerre à AQMI. Il a cherché à se faire de la publicité en montrant que, lui contrairement aux autres puissances comme l’Espagne, réussissait à libérer des otages grâce à ses forces armées. Résultat : l’otage français a été tué.

Le terrorisme n’a pas été vaincu par l’intervention française, loin de là. Pas plus qu’en Afghanistan où « la France » poursuit sa guerre terroriste. L’impérialisme français ne peut prétendre qu’en Afghanistan, il défendait des civils français, ni qu’il y établit la démocratie, ni qu’il a fait baisser le niveau du terrorisme, ni même que ce pays l’a attaqué. Et il est clair que si tous les pays riches y interviennent massivement et sans succès depuis dix ans, c’est que le peuple afghan ne semble pas convaincu du bien fondé de cette intervention...

De plus, les rodomontades de Sarkozy face à AQMI ont mis le peuple travailleur de France sous la menace de nouveaux attentats sur le sol français cette fois. S’ils avaient lieu, cela ne dérangerait même pas la stratégie du président, puisque cela polariserait la situation en France sur la crainte de nouveaux attentats et pousserait la population, plutôt que de se mobiliser sur la politique anti-sociale, à se fier au gouvernement pour la protéger…

Malgré tous ces éléments, les partis de gauche, des verts au parti socialiste et au parti communiste, ne s’estiment pas assez informés. C’est tout ! Ils n’émettent aucune critique sur l’exploitation des richesses de l’Afrique. C’est normal : ils ont toujours été pour, qu’ils soient au gouvernement ou dans l’opposition.

Quand aux syndicats de travailleurs, ces spécialistes en saucissonnage des luttes en journées d’action inoffensives, ils se taisent, faisant comme si la défense des intérêts des travailleurs pouvait se développer sans combattre les calculs des classes dirigeantes.

Voilà jusqu’où vont les crimes de l’impérialisme français et de la droite aujourd’hui au gouvernement, voilà jusqu’où va la complicité des soi-disant représentants politiques et syndicaux des travailleurs…

Messages

  • Un rapport : "Des gamins de quinze et seize ans se font irradier dans les mines sous contrôle français au Niger. Il n’y a quasiment aucune protection contre l’inhalation de gaz radon. La main d’oeuvre, presque exclusivement des nomades Touaregs, reste totalement ignorante des effets de l’exploitation minière. La détection des radiations et les contrôles sanitaires sont inexistants."

    Ce ne sont là que quelques uns des faits rapportés par un réalisateur de télévision britannique qui, avec une équipe de caméramans de l’émission Panorama (UK) ont été les premiers étrangers à visiter Arlit dans la partie nord du Niger. [Le réalisateur] Christopher Olgiati est un jeune homme grand et mince, parlant avec aisance. Il n’exprime pas de griefs particuliers contre le gouvernement militaire du Président Kountché : de fait il le défend contre l’accusation qui s’est répandue selon laquelle le gouvernement aurait permis aux Lybiens de détourner le minerai d’uranium. (Olgiati pense que c’est peut-être une désinformation qu’a fait courir la CIA).

    Pour ce que j’en sais Chris Olgiati peut très bien être un défenseur de l’énergie nucléaire. Mais ce qui l’a choqué lors de sa visite durant dix jours de cette région uranifère, une des plus importantes de la planète, ce sont les conditions de vie de la main d’oeuvre locale. Et le contraste avec celles des Français qui occupent les postes de direction.

    "Arlit est absolument au milieu de nulle part" m’a-t-il dit dans une interview en exclusivité. " C’est une oasis artificielle construite selon le modèle colonial. Elle a sa propre ville-dortoir avec supermarchés, courses de chevaux, produits de luxe importés de la métropole. Un incroyable choc culturel si l’on compare avec les travailleurs nomades". Selon Olgiati c’est la main d’oeuvre nomade qui vient vers la compagnie plutôt que l’inverse. Souvent les nomades ne restent pas plus d’une semaine, prennent leur paie et s’en vont. Certains ne restent qu’une journée. "C’était la grande récrimination française" dit Olgiati, "les ouvriers ne font juste que passer".

    "Il va de soi que les Français n’informent pas les indigènes qu’ils travaillent dans les mines les plus dangereuses du monde, ils n’entendent jamais parler de mesures dosimétriques des rayonnements et un suivi sanitaire quel qu’il soit est impensable".

  • Le groupe, qui renégocie actuellement le contrat d’exploitation de l’uranium avec Niamey, a fermé ses deux sites pour maintenance « au moins » jusqu’à la mi-janvier.

    Le groupe nucléaire français Areva a indiqué lundi que la renégociation de ses contrats miniers se poursuivait avec l’Etat du Niger, où il a fermé ses deux mines d’uranium pour maintenance « au moins » jusqu’à la mi-janvier. Niamey et Areva, groupe détenu à plus de 80% par l’Etat français, doivent renégocier un accord d’exploitation de l’uranium nigérien pour les dix prochaines années, après l’arrivée à terme des précédents contrats le 31 décembre 2013. « Les négociations se poursuivent », a indiqué à l’AFP un porte-parole d’Areva, refusant de commenter l’avancée des négociations. Ces tractations occasionnent un bras de fer intense entre les deux partenaires, qui a notamment pour enjeu les recettes de l’Etat nigérien, quatrième producteur mondial d’uranium mais aussi l’un des pays les plus pauvres du monde.

    La Somaïr et la Cominak, les deux mines exploitées par Areva depuis le début des années 1970 au Niger, dont le groupe extrait 40% de son uranium, ne sont pas soumises à la nouvelle loi minière de 2006. Celle-ci porte le taux de redevance minière de l’Etat nigérien jusqu’à 12% de la valeur des ressources extraites, en fonction des profits, alors que les royalties s’élèvent actuellement à 5,5%. « C’est une discussion qui intervient dans un moment qui n’est pas nécessairement très facile, parce que les prix du marché de l’uranium (...) ont plutôt baissé à cause de retards dans le redémarrage de centrales japonaises » après la catastrophe de Fukushima, avait fait valoir le patron d’Areva, Luc Oursel, début décembre.

    A la même époque, selon les informations de Libération, il apparaissait que le groupe avait déjà décidé la fermeture des deux sites. Areva a démenti.

    Les deux mines ont entretemps été fermées pour maintenance, « au moins jusqu’à la mi-janvier », a indiqué le porte-parole d’Areva

  • Le PDG du numéro 1 mondial du nucléaire civil est arrivé à Niamey, ce vendredi, pour négocier les conditions d’exploitation de l’uranium du nord du pays. C’est l’ONG Oxfam qui a vendu la mèche : Luc Oursel, le patron d’Areva, est à Niamey ce vendredi pour tenter d’arracher un compromis avec les autorités nigériennes sur les conditions d’exploitation de l’uranium du nord du Niger. Depuis des semaines, celles-ci négocient d’arrache-pied sans parvenir à un accord. Le gouvernement de Niamey réclame l’application du code minier datant de 2006, qui se traduirait par une augmentation substantielle de la fiscalité à laquelle le mastodonte français du nucléaire civil a échappé jusqu’ici. Le taux de redevance versé par le groupe français passerait alors de 5,5% à 12% de la valeur des ressources extraites. Soit un afflux de 15 à 20 millions d’euros chaque année dans les caisses du Niger, un des Etats les plus pauvres au monde.

    Mais le groupe dirigé par Oursel fait de la résistance, arguant que l’alourdissement des coûts de production entamerait gravement la rentabilité des deux mines exploitées depuis plus de quarante ans par Areva à Arlit : Somaïr et Cominak. Il évoque même leur possible fermeture à plus ou moins brève échéance. Bluffe-t-il pour tenter de préserver ses avantages acquis ? Pas si simple. Car dans cette affaire, deux logiques s’opposent : celle du développement et de la justice fiscale pour Niamey, et celle de la rentabilité financière pour Areva. Et chaque camp a des arguments à faire valoir.

    Le pouvoir de Mahamadou Issoufou demande la fin du régime d’exception dont bénéficie Areva au Niger, lié à des raisons historiques. Lors des indépendances, au début des années 60, Paris a négocié l’octroi d’un monopole d’exploitation des ressources stratégiques dans plusieurs ex-colonies africaines en échange d’un soutien militaire. Si cette position a été peu à peu remise en question au Niger, avec l’octroi de permis de recherches et d’exploitation à des compagnies étrangères rivales, notamment chinoises, Areva reste en position très favorable dans ce pays sahélien.
    « Bluff diplomatique »

    Bien que jugées « légitimes » par le ministre délégué au Développement, Pascal Canfin, et par Luc Oursel lui-même, les revendications de Niamey tombent néanmoins mal d’un strict point de vue économique. Le contexte international est défavorable : depuis la catastrophe de Fukushima (Japon), il y a trois ans, le cours de l’uranium a chuté. En deux ans, il est même passé de 150 dollars (108 euros) le kilo à 80 aujourd’hui. Dans le même temps, Areva a fini l’année 2013 avec des pertes approchant les 500 millions d’euros, malgré une croissance de son chiffre d’affaires global.

    Muni de ces chiffres, le patron d’Areva explique à ses interlocuteurs du Niger qu’une augmentation sensible de la fiscalité remettrait en cause la rentabilité des mines d’Arlit. Cet argument ne convainc pas l’ONG Oxfam, qui suit de très près les négociations : « Si l’extraction d’uranium est une activité en berne, pourquoi Areva va-t-elle chercher de nouveaux gisements en Mongolie ? Pourquoi la société ouvre-t-elle une usine de dessalement d’eau de mer pour démarrer la production en Namibie ? interroge Anne-Sophie Simpere, d’Oxfam France. Difficile de croire à une filière totalement menacée et à une activité sans avenir pour Areva. Les enjeux financiers pour le groupe liés à la renégociation des contrats du Niger constituent une explication bien plus plausible aux menaces actuelles d’Areva, qui semble pratiquer avec habileté l’arme du bluff diplomatique. »
    Niamey partenaire de Paris dans la lutte antiterroriste

    En réalité, Areva prépare sans le dire son retrait progressif, quoique partiel, du Niger. Les deux mines historiques d’Arlit sont en fin de vie. « Les meilleurs filons ont été exploités, le reste est moins intéressant », assure un bon connaisseur du dossier. Par ailleurs, leur exploitation a lieu dans un environnement sécuritaire très tendu avec les agissements des groupes islamistes qui, en septembre 2010, avaient enlevé sept employés (tous libérés depuis) et mené un attentat à Arlit en mai 2013. Sur un plan politique, Areva - groupe français, détenu à 87% par l’Etat - fait face à des campagnes récurrentes sur les méfaits de la Françafrique. Autant de raisons qui incitent Areva à réduire sa présence au Niger, grâce à la diversification de ses approvisionnements à travers le monde. La part du Kazakhstan, de la Mongolie, du Canada augmente, tandis que celle du Niger décroît régulièrement. D’après une source proche du dossier, l’uranium en provenance du Niger représente aujourd’hui 20% du total des approvisionnements d’Areva, et le groupe souhaite réduire cette part à 10% dans les prochaines années.

    Pour autant, le groupe de Luc Oursel ne peut pas claquer la porte du jour au lendemain. D’abord parce qu’il est le premier employeur privé au Niger. Son départ serait une véritable catastrophe pour le nord du pays, région la plus déshéritée d’un pays pauvre parmi les pauvres. Par ailleurs, Areva a lutté d’arrache-pied pour obtenir l’exploitation d’un gisement extrêmement prometteur, situé non loin d’Arlit : celui d’Imouraren. Dans le contexte économique actuel, sa mise en exploitation n’est pas à l’ordre du jour. Mais l’entreprise française cherche à la garder dans son escarcelle en gagnant du temps. Problème : l’accord signé avec Niamey prévoit le démarrage de l’activité en 2015, autorisant un report de deux ans maximum, au-delà duquel il serait alors fondé à récupérer le titre de propriété.

    L’ensemble du dossier est éminemment politique. Le président Issoufou a un besoin urgent de faire rentrer de l’argent dans les caisses pour financer le développement de son pays et présenter un bilan flatteur de son action en prévision de l’élection présidentielle prévue en 2016. Proche du président François Hollande et lui-même ancien cadre d’Areva, Issoufou est un partenaire clé de Paris dans la lutte antiterroriste dans le Sahel. L’armée française dispose d’une base à Niamey, où sont notamment stationnés les drones qui permettent de surveiller la région. L’Elysée, assure un initié, doit donc ménager ce précieux allié, tout en veillant à protéger la rentabilité d’une entreprise stratégique du secteur énergétique français. Un vrai casse-tête, pas encore résolu.

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