Accueil > 04 - Livre Quatre : HISTOIRE CONTEMPORAINE > 04- La révolution en Asie, à la fin de la guerre mondiale > Une brochure de Jacques Ramboz

Une brochure de Jacques Ramboz

mardi 18 août 2009, par Robert Paris

Qui était Jacques Ramboz ?

Né à Paris en 1917 et mort en 1999, Jacques Ramboz a été un militant trotskyste.

En 1930, il adhère aux jeunesses communistes et au PCF, s’oppose en 1938 à la politique dite de "Front populaire" de ce parti et le quitte pour devenir trotskyste sous l’influence de Barta. Il participe au Groupe Communiste (quatrième internationale) avec ce dernier. Ce groupe devient ensuite l’Union Communiste et publie la "Lutte des classes" de 1946 à 1949. A partir de cette date, le groupe se dissous et il rejoint un poste de professeur en Tunisie et, à partir de 1957, dans le Gard. Il a été un des militants qui, au cours de la guerre, n’ont pas basculé sous la pression stalinienne et nationaliste.

Hommage à Jacques Ramboz (1917-1999)

Militant communiste internationaliste (trotskyste)

Edition Quaderni Pietro tresso (7 euros à La Brêche)

JACQUES RAMBOZ

Je suis né le 6 mai 1917 à Paris (15ème) dans une famille petite-bourgeoise. A la suite d’une opération dans mon jeune âge, j’ai été handicapé par une surdité qui ira en s’aggravant.

Lycéen au Lycée Michelet (Vanves), j’ai adhéré aux Jeunesses Communistes (JC) au moment du Front Populaire et j’ai organisé et animé l’Amicale du Lycée jusqu’à mon départ après le Bac. J’ai mené l’agitation en faveur de la révolution espagnole et pour les JC pendant mon passage d’un an à la section préparatoire à la Manufacture de Sèvres, où je fus éliminé au concours de fin d’année.
Entré en opposition par rapport à la ligne nationaliste du Front Populaire prônée par le Parti Communiste Français (PCF), j’ai rompu avec les JC en 1938. Ce fut alors que j’ai rencontré « Albert », c’est-à-dire David Korner, dit aussi « Barta », qui me gagna au trotskysme.

Je quittai Paris à la recherche d’un travail et je devins instituteur suppléant à Montalieu-Vercieu (Isère), où j’ai noué des relations politiques avec des anciens étudiants, des ouvriers carriers et des réfugiés antifascistes autrichiens, jusqu’à ma mobilisation en 1939. Pendant ma mobilisation j’ai diffusé les deux premiers numéros de la feuille illégale l’Ouvrier.

Après avoir été réformé et être retourné en Isère pour une suppléance passagère et une période de travail comme ouvrier agricole, j’ai regagné Paris à l’appel de « Barta » vers octobre 1940.
Sous le nom de « Lucien », je fus l’un des premiers membres du noyau qui donna naissance au groupe Communiste (IVème Internationale), qui devient ensuite l’Union Communiste (IVème Internationale) en octobre 1944, puis l’Union Communiste (Trotskyste) en mai 1946. J’ai mené alors une vie de militant professionnel sans pourtant être coupé des petits boulots, et j’ai utilisé mes bons rapports avec les ouvriers de l’Isère pour rétablir entre eux les liens rompus.

A la défaite allemande j’ai assuré des permanences à mon domicile, dans le 14ème, pour le compte de La Voix des Travailleurs (Bulletin inter-usines de l’Opposition Syndicale « Lutte de Classes »-CGT) et la responsabilité officielle de la parution du journal de l’UC, La Lutte de Classes, à partir d’avril 1946 jusqu’à mon départ de Paris en 1949. J’ai aussi organisé des cercles d’étude sur la théorie marxiste, sur l’histoire du mouvement ouvrier et sur les grands évènements révolutionnaires mondiaux, en m’occupant aussi des liens avec l’organisation des travailleurs vietnamiens en France jusqu’à ce que celle-ci soit « épurée » et ses délégués arrêtés et rapatriés.

La Voix des Travailleurs et La Lutte de Classes ont publié plusieurs articles rédigés par moi, et en juillet 1949 l’UC a aussi édité ma brochure La guerre d’Indochine et les travailleurs français, dans cette même année où je fus détaché comme instituteur en Tunisie.

Arrivé en Tunisie en octobre 1949, je me consacrai alors essentiellement à l’éducation populaire et, parallèlement, j’ai continué à essayer de faire pénétrer l’analyse marxiste dans le nouveau milieu où je vivais par l’édition anonyme de courtes fiches traduites en arabe par un jeune collègue sympathisant. En 1952, j’adressai à l’UC une brochure intitulée Où va la Tunisie ?, écrite à la suite des troubles qui t avaient eu lieu.

Mon détachement non renouvelé, je fus nommé en 1957 dans le Gard et je fis de l’agitation contre la guerre d’Algérie et contre le gaullisme sans pour autant reprendre contact avec l’organisation. Je reçu alors la visite d’un militant de Voix Ouvrière et je m’abonnai au journal sans qu’aucun lien organisationnel se rétablisse. La raison essentielle de cette réserve était ma condamnation de l’économisme (tout reporter aux conditions matérielles de la condition ouvrière) et de l’« ouvriérisme » qui me paraissait trop souvent friser la démagogie.

Je rompis avec le syndicat sur la question algérienne et, lorsque le Parti Socialiste Unifié (PSU) se constitua à Nîmes, je le rejoignis et j’organisai un cercle d’étude (mouvement ouvrier et économie politique) chez les mineurs de St. Florent. Elu secrétaire fédéral, je démissionnai de ma charge et du PSU après avoir constaté l’impossibilité de mener une politique de classe conséquente dans ce parti.
Je menai alors, parallèlement à mon activité professionnelle, une activité culturelle populaire hors de toute organisation, ainsi que l’agitation contre la guerre d’Algérie et celle du Vietnam où les troupes USA avaient remplacé les françaises.

En été 1963, avec une poignée de volontaires bénévoles, j’ai organisé à Stora (Algérie) un stage mixte de formation de moniteurs d’enseignement. Les autorités algériennes d’alors m’invitèrent à renouveler ce travail en 1964 à Annaba, mais dans des conditions matérielles et idéologiques très différentes. Il n’y aura pas de troisième stage.

Dans les années 1966-73 j’ai regroupé à Nîmes un certain nombre de jeunes gens au sein du Comité Vietnam nîmois. Avec une équipe réduite à faible influence ouvrière j’ai mené un travail systématique d’information (projections de films dans les villages, forums…) et de réflexion (fiches politiques et réunions d’études) en même temps qu’une activité de soutien concret à la lutte du peuple vietnamien (collecte d’argent, de sang et de médicaments) contre l’impérialisme yankee. Ce faisant, je me heurtai à l’indifférence des organisations de gauche et à l’hostilité déclarée de celles relevant du PCF.

Rien à dire sur les évènements de mai 1968 : j’y ai participé comme instituteur gréviste en essayant de politiser le mouvement. Sur ma proposition, le Comité Vietnam nîmois s’autodissout en 1975 pour ne pas cautionner la politique stalinienne des autorités vietnamiennes victorieuses.

Resté isolé et trotskyste, je me suis efforcé de mener une activité de discussion et d’éducation politique au moyen de nombreuses lettres circulaires à la diffusion plus ou moins confidentielle.

Jacques Ramboz a continué son travail de militant jusqu’à sa mort. Ses fiches (lettres circulaires) - dont on trouvera un choix ci-après – représentent, ainsi qu’il l’écrivait le 27 février 1999, « la continuité d’un effort pour faire pénétrer les conceptions marxistes et internationalistes » dans les milieux avec lesquels il était en contact selon les années et les circonstances : paysans, mineurs, ouvriers, lycéens, « tertiaires », souvent de petits groupes avec lesquels il discutait et menait des actions d’éducation politique populaire. Lettres, fiches et brochures permettaient l’approfondissement de la réflexion sur les évènements hexagonaux et internationaux, les brochures aidaient à reconstituer et fixer la mémoire historique, toute essayant de faire pénétrer l’analyse marxiste.

Ceux et celles qui ont travaillé/milité avec lui se souviennent de la rigueur et de la clarté de ses analyses, de son accueil chaleureux et généreux, et du rire joyeux qui ponctuait certains commentaires : toutes choses que les militants de type stalinien ne pardonnent pas.

Mars 2000

Marie-Josée Ramboz

https://www.marxists.org/francais/barta/1997/05/louise.htm

https://www.marxists.org/francais/cmo/n07/n07.pdf

La guerre d’Indochine et les travailleurs français

Textes de l’UC

mai 1949

"UN PEUPLE QUI EN OPPRIME UN AUTRE DOIT S’ATTENDRE A ETRE OPPRIME A SON TOUR..."
I

"Les budgets civils doivent payer pour les dépenses militaires", ou du moins leur surcroît qui vient surtout des opérations d’Indochine. Et c’est ici que la majorité de l’Assemblée et celle du pays sont un peu complices, que l’une et l’autre auraient en somme mauvaise grâce à faire la mauvaise tête... il faut savoir, dire et reconnaître que cette politique (outre-mer) exige de grands moyens, c’est-à-dire de sérieux sacrifices matériels et humains.

Est-ce un journal "subversif", "anti-national" qui tire avec cette netteté les conséquences de la politique coloniale du gouvernement français ? Pas du tout : il s’agit de l’officieux Monde du 10 Mai 49, sous la plume de J. Fauvet.

Il est ainsi reconnu officiellement que la raison première des sacrifices matériels (impôts, vie chère et bas salaires) et humains (gaspillage de la jeunesse française), C’EST LA GUERRE D’INDOCHINE.
POURQUOI Y A-T-IL LA GUERRE EN INDOCHINE ?

L’essor de l’économie capitaliste à la fin du XIXème siècle a jeté les grandes puissances – Angleterre, France, Etats-Unis, Russie, Allemagne et Italie – à la conquête du monde : il s’agissait de s’assurer les meilleurs débouchés, sources de matières premières et sphères d’investissement des capitaux. Par toute la terre, c’est la ruée vers les pays "neufs". En 1885, à la suite de ses missionnaires, "la France" occupe le Tonkin – ayant apporté Dieu aux peuples d’Indochine, elle venait leur en réclamer le denier.

Si la résistance opposée par les Etats chinois et annamite fut faible, CELLE DE LA POPULATION N’A PAS CESSE. La "paix française" était le calme du couvre-feu. Dès 1917 profitant de la crise due à la première guerre mondiale, l’Annam s’insurge. L’une après l’autre, toutes les couches populaires entrent dans l’action, culminant en 1929 dans une insurrection de paysans et de petits-bourgeois qui se termine par une "pacification" sanglante.

Peu d’années passent cependant avant de nouvelles luttes : 1933 voit les manifestations de masse des ouvriers et des paysans. Malgré la répression féroce — la torture est monnaie courante – ces mouvements grandissent de 1936 à 1939. La guerre de 39 est marquée par l’arrestation et la déportation des principaux dirigeants.

"Les insurgés sont des agents japonais. Le Viet-Minh n’est qu’une machine de guerre abandonnée par ceux-ci dans leur défaite." Ce sont ceux-là mêmes qui se servent d’exprisonniers japonais comme éclaireurs et troupes de choc qui colportent ces accusations. En fait, l’occupation japonaise ne met pas fin aux soulèvements. Fraternellement unis, policiers japonais de Bao-Daï et policiers français de Decoux font leur possible pour maintenir "l’ordre" – leur ordre – jusqu’au moment où l’effondrement japonais, affaiblissant, par contre-coup, son compère-ennemi français, donne issue à l’insurrection générale du Viet-Minh en 1945.

La guerre d’aujourd’hui n’est pas une "nouvelle" guerre. Elle continue la politique d’hier. Elle en est l’expression concentrée et fidèle.
QU’ONT FAIT, AU NOM DE LA FRANCE, LES CAPITALISTES EN INDOCHINE ?

Sous leur bienveillante domination ont pu subsister la féodalité indigène et le mandarinat. Rien d’étonnant que ce soit aujourd’hui, au Cambodge et en Cochinchine, les seuls soutiens et derniers espoirs de la politique "française" ! Mais la situation des classes populaires n’a fait qu’empirer, une exploitation supplémentaire au profit du maître étranger venant s’ajouter à l’exploitation traditionnelle.

Sa terre, pour le petit paysan, est un moyen non de vivre, mais de mourir lentement, écrasé qu’il est d’impôts – impôt individuel de 35 frs. en 1938 (soit un mois de travail), impôt sur le "revenu" (à quand l’impôt sur la misère ?), taxe sur chaque pied de tabac, d’oranger, etc... Dans ces conditions, les petits paysans sont la proie assurée des usuriers. Rongée par les hypothèques, leur terre passe morceau par morceau dans le patrimoine de l’Eglise – les Pères Blancs comptent parmi les plus grands propriétaires fonciers – et des banques indochinoises. Ruinés les paysans prolétarisés trouvent à "vivre" comme ouvriers agricoles sur les grands domaines pour un salaire journalier de 2 à 4 frs. avant la guerre.

Dans les grandes plantations vit ainsi un prolétariat misérable, plutôt vendu que loué, à la merci complète de son employeur.

La population ouvrière ne connaît pas une vie meilleure. A la même époque, l’ouvrier spécialisé gagnait 5 à 10 frs. par jour. Mais la masse des non spécialisés touchait "l’honnête" salaire journalier de 2,50 frs. à 3 frs. et l’ouvrière, pour 10 heures de travail, 1,50 fr. !

Les "pittoresques" congaies des "récits exotiques" ne sont souvent que de pauvres créatures cherchant dans la prostitution un remplacement ou un complément à un salaire de famine.

En 1860, la Grande-Bretagne fit la guerre pour obliger les chinois à acheter l’opium produit par ses grands planteurs de Birmanie et des Indes. L’Administration Française n’emploie pas de telles méthodes. Il lui suffit, grâce à l’appui de ses fidèles mandarins, d’obliger la population à consommer des quantités d’alcool arbitrairement fixées, vendues au prix fort au profit du gouvernement. De la même façon, le monopole sur le sel permet de revendre au travailleur des salineries 70 centimes (en 38-39) le kilo de sel qui lui a été acheté 20 ou 30 centimes.
LA FRANCE, MERE DE LA LIBERTE

Un indochinois ne peut circuler librement dans son pays. Réquisitionnés comme main-d’ œ uvre à bon marché, 12.000 travailleurs furent importés en France en 1939, parqués dans des camps, soumis à mille vexations. Dix ans après, les travailleurs rapatriés ne peuvent regagner leur village et restent "concentrés" dans des camps comme à Tourane et Cap St. Jacques.

Là où n’existe pas la liberté matérielle, il ne saurait exister de liberté politique. Lorsque les élections ne sont pas "bonnes", la parole reste à la police. C’est ainsi qu’en 1939 furent arrêtés et déportés les députés trotskystes Tha-Thu-Tau et Tran-Van-Trach, élus triomphalement avec 80% des voix contre 15% au gouvernement !

40.000 Français envoyaient au parlement indochinois plus de représentants que 27 millions d’indigènes ! Les dernières élections fabriquées en Cochinchine en 1949 ont montré la confiance du peuple en ses "protecteurs" : 85,5% des électeurs pourtant choisis se sont abstenus, 14,5% – dont les policiers, les fonctionnaires, les propriétaires fonciers, les mandarins... – ont accepté de participer à la comédie.
II
CE QUE SIGNIFIE LA GUERRE D’INDOCHINE

Pour les travailleurs :

SACRIFICES MATERIELS. "Les budgets de la Défense Nationale et de la France d’Outre-mer dépassent de 35,3 milliards le plafond de 350 milliards fixé en Décembre... à cela s’ajoutent les dépenses supplémentaires pour l’Indochine" (Le Monde, 21 mai), le corps expéditionnaire revenant à peu près à la moitié de l’entretien de l’armée métropolitaine. Les colonialistes français auront des canons, mais les travailleurs français se passeront de beurre.

SACRIFICES HUMAINS : 37.000 jeunes hommes, rien que dans la marine, étaient tombés à l’automne 1948. Combien d’autres tombes se sont ouvertes au printemps ? La presse si prompte à nous renseigner sur les ébats de la princesse Margaret a, quant à ce sujet, un b œ uf sur la langue, et le "paysan" Petsche fait ce qu’il peut pour alimenter cette guerre qui fait fondre des milliers de jeunes paysans comme beurre sur la poêle.

Pour les capitalistes :

DES PROFITS ACCRUS. Le Monde du 7 avril nous apprend que : les "Hévéas de Tayminh" ont, pour l’exercice 48, réalisé un bénéfice net de 3.860.463 piastres indochinoises, le dividende étant fixé à 18 piastres par action (net 237,66 frs.) et à 142,71 piastres pour les parts (net 1940,89 frs.) ; et le 9 avril, que les comptes de la "Compagnie du Cambodge" font apparaître pour 1948 un bénéfice de 15.251.925 piastres contre 2.628.724 pour l’exercice précédent !

La terre d’Indochine est grassement fumée de sang. Elle rapporte...
L’ECHEANCE 1949

Après 4 ans de guerre, quelle est la situation ? Des milliers de jeunes hommes sont tombés, des milliers se battent... et cependant "les troupes du Viet-Nam contrôlent 80% du territoire. Les français ne se trouvent en sécurité que dans les grandes villes. Les forces militaires françaises qui se servent de l’artillerie, de tanks, d’avions, se révèlent impuissantes devant la tactique de guérilla des Viet-Namiens", écrivait le périodique américain U.S. News and World Report du 13 Août dernier et, le 2 Juin, le Far Eastern Survey : "Tout ce qui est en dehors des centres et des grandes villes est aux mains d’Ho-Chi-Minh. La grande offensive d’hiver 1947-48 a été contenue et repoussée avec de lourdes pertes. Impasse politique et militaire, et ruine économique, telle est la situation."

La situation a-t-elle changé depuis ? Dix divisions doivent partir, politiciens et généraux sont envoyés en mission – mais les coups de mains des "rebelles" aux portes mêmes de Saigon prouvent qu’en fait la situation a empiré pour les Français et leurs partisans. L’offensive de printemps moissonne de nouveaux hommes mais ne peut que prolonger une guerre qui risque de s’étendre au monde entier.

Les capitalistes français mettent leur ultime espoir en Bao-Daï, le représentant des féodaux pro japonais. "Avec le retour de S.M. (sic) Bao-Daï au Viet-Nam s’ouvrira pour ce pays une ère nouvelle" écrit A. Surmer dans le supplément d’Avril à La France d’Outre-Mer. Ainsi le nègre fétichiste modèle une poupée de boue et attend d’elle la pluie et le beau temps...
RÉCLAMER LA PAIX... ET LAISSER FAIRE LA GUERRE

"Il faut négocier aussi avec Ho-Chi-Minh", disent les uns – "seulement avec Ho-Chi-Minh" répliquent les autres – mais la guerre continue.

Ces fameuses négociations ont déjà eu lieu : en Mars et en Septembre 1946 ; et le traité avec Bao-Daï ne fait que reproduire, avec quelques concessions en plus, les deux précédents traités. A bon droit la revue La Lutte de Classes de mars 1949 écrit : "Ce n’est cependant pas la paix qui s’en est ensuivie : pendant que M. Thorez, avec M. Bidault, signait ces accords, M. Tillon, ministre de l’air, veillait à la fabrication des ’Cormorans’ pour le transport des tanks à destination de l’Indochine. "
RETRAIT DU CORPS EXPÉDITIONNAIRE

Le Monde laisse échapper la vérité quand il parle de la complicité de l’Assemblée. Tous les partis qui y bavardent sont complices de la "sale guerre", car aucun n’a voulu prendre la responsabilité d’une résistance effective contre elle ! Mais c’est faux que le pays soit complice : il le serait s’il continuait à se taire.

"Vous voulez pactiser avec ceux qui versent le sang français !" Ceux qui anathèment ainsi contre les adversaires de la guerre, ce sont les hypocrites défenseurs des politiciens et de l’Etat-Major qui se disposent à verser sans compter le sang des nouvelles recrues. Si le sang versé devait être payé par le sang, ces gens-là dormiraient-ils tranquilles ?

Cette guerre n’est pas celle du peuple français. Elle s’exerce directement contre lui, car les nécessités du financement de la guerre servent à justifier l’aggravation de la situation des travailleurs et une répression "à la Jules Moch".

Insuffisante pour venir à bout de la résistance désespérée de la population vietnamienne, la présence des troupes françaises suffit à éterniser la guerre. Entre lui-même et les peuples d’Indochine, ’d’une part, et, d’autre part, les dividendes d’une poignée de financiers, comment le peuple français ne choisirait-il pas ?

Pour que cesse la guerre d’Indochine, IL FAUT CESSER DE LA FAIRE, il faut obtenir l’arrêt des envois de troupes et le retrait du corps expéditionnaire !

Dans chaque groupement corporatif, dans chaque syndicat, travailleuses et travailleurs de France doivent obliger leurs représentants à agir nettement dans ce sens – ils doivent retirer toute confiance et tout appui aux soutiens avoués ou honteux des chacals de la Finance. Unis pour la défense de leur intérêt le plus élémentaire, il faut qu’ils crient à ceux-ci : QUITTEZ L’INDOCHINE ! et qu’ils envisagent toutes les mesures pour que ce cri soit entendu.

Mai 1949

Jacques Ramboz

Messages

  • La guerre d’Indochine et les travailleurs français
    Textes de l’UC

    mai 1949

    "UN PEUPLE QUI EN OPPRIME UN AUTRE DOIT S’ATTENDRE A ETRE OPPRIME A SON TOUR..." I

    • je suis pas d’acore pour dire ’’un peuple qui opprime un autre peuple dois attendre a être opprime’’ je peu juste comprendre qu il y aura une vengeance ou une réaction de qui je ne sais pas !avec cette formulation.mais par contre ’’un peuple qui opprime un autre peuple n’ai pas un peuple libre’’. de faite un peuple qui opprime n’ai pas libre par ce que il faut qu’il paye cette guerre,la financer,faire des sacrifice pour la nation.et la nation sa veux pas dire le peuple mais la classe dirigeante (la bourgeoisie) .

    • Je comprend ta question. Il ne s’agit pas là d’une vengeance. Mais, par exemple, quand le peuple anglais a accepté d’opprimer le peuple sud-africain (guerre coloniale dans laquelle des moyens d’extermination ont été employés avec l’accord des dirigeants du mouvement ouvrier), il est devenu l’otage de l’impérialisme britannique qui l’a envoyé se sacrifier sur les champs de bataille de la première guerre mondiale. Quand le peuple français a accepté la guerre d’Algérie, ne serait-ce que passivement, il a subi le fascisme en France aussi avec l’OAS et cela aurait pu être bien pire si c’était une période de crise économique.

      Robert Paris

  • je croie que quand un peuple accepte d’opprimer un autre peuple il le fait pas spontanément mais si on le dirige dans se sens.
    comme l’ exemple que vous venez de citer .
    moi je donne un exemple différent quand les hommes oppriment les femmes dans un pays les hommes sont opprime a leur tour .
    je suis d’accor avec contenu du texte

  • Hommage à Jacques Ramboz (1917-1999)

    Militant communiste internationaliste (trotskyste)

    Edition Quaderni Pietro tresso (7 euros à La Brêche)

    JACQUES RAMBOZ

    Je suis né le 6 mai 1917 à Paris (15ème) dans une famille petite-bourgeoise. A la suite d’une opération dans mon jeune âge, j’ai été handicapé par une surdité qui ira en s’aggravant.
    Lycéen au Lycée Michelet (Vanves), j’ai adhéré aux Jeunesses Communistes (JC) au moment du Front Populaire et j’ai organisé et animé l’Amicale du Lycée jusqu’à mon départ après le Bac. J’ai mené l’agitation en faveur de la révolution espagnole et pour les JC pendant mon passage d’un an à la section préparatoire à la Manufacture de Sèvres, où je fus éliminé au concours de fin d’année.
    Entré en opposition par rapport à la ligne nationaliste du Front Populaire prônée par le Parti Communiste Français (PCF), j’ai rompu avec les JC en 1938. Ce fut alors que j’ai rencontré « Albert », c’est-à-dire David Korner, dit aussi « Barta », qui me gagna au trotskysme.

    Je quittai Paris à la recherche d’un travail et je devins instituteur suppléant à Montalieu-Vercieu (Isère), où j’ai noué des relations politiques avec des anciens étudiants, des ouvriers carriers et des réfugiés antifascistes autrichiens, jusqu’à ma mobilisation en 1939. Pendant ma mobilisation j’ai diffusé les deux premiers numéros de la feuille illégale l’Ouvrier.

    Après avoir été réformé et être retourné en Isère pour une suppléance passagère et une période de travail comme ouvrier agricole, j’ai regagné Paris à l’appel de « Barta » vers octobre 1940.
    Sous le nom de « Lucien », je fus l’un des premiers membres du noyau qui donna naissance au groupe Communiste (IVème Internationale), qui devient ensuite l’Union Communiste (IVème Internationale) en octobre 1944, puis l’Union Communiste (Trotskyste) en mai 1946. J’ai mené alors une vie de militant professionnel sans pourtant être coupé des petits boulots, et j’ai utilisé mes bons rapports avec les ouvriers de l’Isère pour rétablir entre eux les liens rompus.
    A la défaite allemande j’ai assuré des permanences à mon domicile, dans le 14ème, pour le compte de La Voix des Travailleurs (Bulletin inter-usines de l’Opposition Syndicale « Lutte de Classes »-CGT) et la responsabilité officielle de la parution du journal de l’UC, La Lutte de Classes, à partir d’avril 1946 jusqu’à mon départ de Paris en 1949. J’ai aussi organisé des cercles d’étude sur la théorie marxiste, sur l’histoire du mouvement ouvrier et sur les grands évènements révolutionnaires mondiaux, en m’occupant aussi des liens avec l’organisation des travailleurs vietnamiens en France jusqu’à ce que celle-ci soit « épurée » et ses délégués arrêtés et rapatriés.

    La Voix des Travailleurs et La Lutte de Classes ont publié plusieurs articles rédigés par moi, et en juillet 1949 l’UC a aussi édité ma brochure La guerre d’Indochine et les travailleurs français, dans cette même année où je fus détaché comme instituteur en Tunisie.

    Arrivé en Tunisie en octobre 1949, je me consacrai alors essentiellement à l’éducation populaire et, parallèlement, j’ai continué à essayer de faire pénétrer l’analyse marxiste dans le nouveau milieu où je vivais par l’édition anonyme de courtes fiches traduites en arabe par un jeune collègue sympathisant. En 1952, j’adressai à l’UC une brochure intitulée Où va la Tunisie ?, écrite à la suite des troubles qui t avaient eu lieu.

    Mon détachement non renouvelé, je fus nommé en 1957 dans le Gard et je fis de l’agitation contre la guerre d’Algérie et contre le gaullisme sans pour autant reprendre contact avec l’organisation. Je reçu alors la visite d’un militant de Voix Ouvrière et je m’abonnai au journal sans qu’aucun lien organisationnel se rétablisse. La raison essentielle de cette réserve était ma condamnation de l’économisme (tout reporter aux conditions matérielles de la condition ouvrière) et de l’« ouvriérisme » qui me paraissait trop souvent friser la démagogie.
    Je rompis avec le syndicat sur la question algérienne et, lorsque le Parti Socialiste Unifié (PSU) se constitua à Nîmes, je le rejoignis et j’organisai un cercle d’étude (mouvement ouvrier et économie politique) chez les mineurs de St. Florent. Elu secrétaire fédéral, je démissionnai de ma charge et du PSU après avoir constaté l’impossibilité de mener une politique de classe conséquente dans ce parti.
    Je menai alors, parallèlement à mon activité professionnelle, une activité culturelle populaire hors de toute organisation, ainsi que l’agitation contre la guerre d’Algérie et celle du Vietnam où les troupes USA avaient remplacé les françaises.

    En été 1963, avec une poignée de volontaires bénévoles, j’ai organisé à Stora (Algérie) un stage mixte de formation de moniteurs d’enseignement. Les autorités algériennes d’alors m’invitèrent à renouveler ce travail en 1964 à Annaba, mais dans des conditions matérielles et idéologiques très différentes. Il n’y aura pas de troisième stage.

    Dans les années 1966-73 j’ai regroupé à Nîmes un certain nombre de jeunes gens au sein du Comité Vietnam nîmois. Avec une équipe réduite à faible influence ouvrière j’ai mené un travail systématique d’information (projections de films dans les villages, forums…) et de réflexion (fiches politiques et réunions d’études) en même temps qu’une activité de soutien concret à la lutte du peuple vietnamien (collecte d’argent, de sang et de médicaments) contre l’impérialisme yankee. Ce faisant, je me heurtai à l’indifférence des organisations de gauche et à l’hostilité déclarée de celles relevant du PCF.

    Rien à dire sur les évènements de mai 1968 : j’y ai participé comme instituteur gréviste en essayant de politiser le mouvement. Sur ma proposition, le Comité Vietnam nîmois s’autodissout en 1975 pour ne pas cautionner la politique stalinienne des autorités vietnamiennes victorieuses.
    Resté isolé et trotskyste, je me suis efforcé de mener une activité de discussion et d’éducation politique au moyen de nombreuses lettres circulaires à la diffusion plus ou moins confidentielle.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.