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Le mythe du bon roi

jeudi 9 août 2012, par Robert Paris

L’exemple le plus criant du caractère mythique est Louis XIV

Celui-là a déjà le nom de bon dans son appellation actuelle. C’est Jean le Bon ! En fait, il s’appelait Jean de France. Qu’avait-il de bon. La population de l’époque n’aurait pas forcément pu répondre à cette question ! La nouvelle dynastie, confrontée à la crise de la féodalité, aux cinglantes défaites du début de la guerre de Cent Ans et à la grande peste, perd rapidement beaucoup de crédit ; d’autant plus que, dans l’incapacité de faire rentrer les impôts, elle recourt à des mutations monétaires pour renflouer le trésor. Ces manipulations entraînent des dévaluations extrêmement impopulaires. Jean II le Bon, confronté aux intrigues de Charles le Mauvais, roi de Navarre et prétendant le plus direct à la couronne, gouverne dans le secret entouré de ses hommes de confiance. Jean n’avait donc nullement la confiance du peuple et même pas forcément de la classe noble ni de la bourgeoisie... Personne n’aurait pensé à l’appeler "le bon" contrairement à ce qu’en a décidé l’historiographie officielle de la France... A preuve, le peuple de Paris et la bourgeoisie ont fait, sous son règne, la première révolution bourgeoise qui ait réussi à prendre le pouvoir, celle d’Etienne Marcel !

L’Histoire de France est pleine de mensonges officiels qui reconstruisent le passé : le bon roi Saint Louis qui rendait la justice aux malheureux sous son chêne, le Grand Siècle du Roi-Soleil, le brave Henri IV dont le nom est resté attaché à sa maxime "que chacun mange sa poule au pot" (le dimanche) et à son prétendu combat cotre les guerres "de religion"… Au point de faire croire qu"il avait été assassiné par un fanatique religieux, Ravaillac, alors qu’il l’avait été à l’instigation de sa femme, devenue ainsi reine de France ! Et c’est souvent des historiens qui n’étaient nullement payés par ces rois qui ont construit ces mythes et les historiens actuels continuent généralement de les propager ! Ils y trouvent autre chose que le soutien du roi : le soutien de l’Etat ! Car, au travers des individus qui ont gouverné, c’est l’Etat français qui tient à maintenir son image.

Marignan 1515, une "victoire" du jeune roi François 1er, a été appris par coeur durant de longues années par les écoliers de France mais ils ignoraient que cette "victoire" de la France en Italie par un roi de 21 ans n’avait eu aucune importance et aucune conséquence et que toutes les ambitions de conquête française en Italie par François 1er avaient échoué déjà dix ans plus tard. Enfin aucune importance ... sauf pour les 16.000 morts de cette guerre, un record pour l’époque, plus qu’à la bataille d’Azincourt, déjà une boucherie. Loin d’être les créateurs de la richesse du pays, les rois ont ponctionné durement la richesse nationale jusqu’à la détruire parfois brutalement au nom des intérêts de la classe dominante.

Le mythe a souvent été inventé après, et parfois par des gens qui voulaient faire croire que l’on pouvait améliorer la fonction royale en lui donnant en modèle d’illustres prédécesseurs. En tout cas, ce mythe a servi à créer un mythe encore plus important : celui de l’Etat protecteur du peuple.

Ce n’est donc pas seulement de gentils mythes pour l’éducation des enfants, des "images d’Epinal". C’est une idéologie à l’usage des peuples selon laquelle le sort du peuple dépendrait non de son action mais du bon vouloir de l’Etat. Et cette idéologie est très loin d’avoir disparu même là où les rois n’ont plus droit de cité. Les peuples sont conduits par les trompeurs à croire qu’un bon gouvernement ferait ceci, ferait cela. Parfois, il y a encore des peuples qui sont fiers de leurs rois comme en Angleterre, en Belgique ou au Maroc... Et parfois leurs présidents ont plus de pouvoir qu’un roi comme en France. C’est donc un mythe qui a la vie dure !

L’historien Georges Duby écrit dans son « Histoire de France » :

« Nous aurions tort de nous laisser abuser par la peinture idyllique de la situation paysanne qu’a peu à peu imposée l’anecdote légendaire de la poule au pot. Celle-ci est l’un des éléments de cette geste héroïque et touchante du « bon roi Henri » qui parcourt toute l’histoire de l’Ancien Régime et survit à la Révolution (…) Non, malheureusement, le règne du premier roi bourbon ne fut pas, pour les paysans français, un bucolique âge d’or. Ils payèrent moins pour les taxes, mais plus pour les gabelles. Sans doute on tenta de remédier un peu aux empiètements commis par les seigneurs et les notables aux dépens des communautés paysannes, mais aucun remède ne fut apporté à l’élimination d’un grand nombre de petits propriétaires paysans, ruinés par l’usure ou par les ravages des soldats, et contraints de laisser adjuger à vil prix leurs parcelles. C’est une conséquence majeure de la crise politique et religieuse : elle a réduit dans presque toutes les provinces la part de la propriété paysanne à beaucoup moins de la moitié du sol. Par ailleurs, le rétablissement de l’ordre intérieur s’accompagne partout d’une reprise plus rigoureuse de la perception des dîmes, un moment contestées par le déroulement des troubles. Indifférents à la stagnation des techniques et des rendements, les fermages reprennent leur hausse et réduisent davantage encore la part du produit brut laissé aux paysans. »

Henri IV

Alors qu’il n’est guère aimé de son vivant, parce qu’il prélève trop d’impôts, entretient trop de maîtresses et change trop souvent de religion, Henri IV est désormais l’un des rois préférés des livres d’Histoire français. Le mythe se forge au XVII° siècle, où il incarne l’honnête homme, avant d’être réorienté au XVIII° siècle, par L’Henriade de Voltaire, vers la figure du bon roi, proche de son peuple et tolérant en matière religieuse.

Henri IV est surtout connu comme celui qui a mis fin aux guerres de religions qui ensanglantaient la France grâce notamment à l’Edit de Nantes du 13 avril 1598. Il y a surtout participé plusieurs fois, en tant que chef protestant, puis a fait des alliances multiples et profité de la mort des deux chefs radicaux, du prince Henri de Condé, celui du camp protestant et, du duc de Guise, celui du camp catholique. Celui a changé quatre fois de religion en fonction de ses propres intérêts politiques, en a profité pour rallier les modérés des deux camps... Ce n’est pas pour le bien du peuple qu’il a mené toutes ces guerres et, quand les paysans du centre de la France se révoltent contre la misère, il reprend la tête de son armée pour les massacrer...

Le mythe historique présente la mort de Henri IV comme le crime d’un intégriste religieux fou. Honoré de Balzac rappelle que sa femme, Marie de Médicis, le lendemain d’avoir obtenu d’être sacrée reine après de longues années de refus d’Henri IV, demande à son intime Épernon qui protégeait le roi de ne pas parer le coup de Ravaillac, un proche d’Epernon.

« La poule au pot tous les dimanches », Henri IV est le père de formules plus ou moins apocryphes, mais entrées dans le langage courant. Avec sa barbe et sa fraise, son profil reste familier, et continue d’orner les étiquettes du vin de Jurançon que l’on produit dans son pays. Les images d’Epinal des tablettes de chocolat de jadis ne sont pas non plus oubliées : Henri IV jouant à quatre pattes avec ses enfants, ou visitant quelque chaumière en compagnie de Sully. Et tous les Français, peuple qui chante spontanément faux, connaissent une bribe de ce très vieux refrain : « Vive Henri IV, vive ce roi vaillant... »

Clichés ? Bien sûr, et les historiens font la part des choses. Mais si Henri IV a pris place, dès sa mort, au cœur de l’imaginaire français, et y est resté, ce n’est pas un hasard. Les mythes perdurent dès lors qu’ils rendent service à une société. Or Henri IV est un mythe, que chaque époque façonne à sa guise, l’adaptant aux couleurs du temps. Sous Louis XIV, à l’apogée du classicisme, le Béarnais incarne la figure de l’honnête homme. Sous la Régence, il devient un libertin. Voltaire, qui a écrit un long poème en son honneur, La Henriade, le voit comme un apôtre de la tolérance, et l’Encyclopédie l’évoque comme un despote éclairé avant la lettre. Napoléon le cite en exemple de chef de guerre, le romantisme loue en lui le modèle du bon monarque, tandis que le XIXe siècle républicain magnifie sa proximité avec le peuple. Et de nos jours, dans une société mêlée, Henri IV est célébré comme un précurseur du « vivre ensemble ».

L’exploitation de son personnage vaut à Henri IV, post mortem, d’être une figure consensuelle, alors que ses contemporains ne le comprirent pas toujours, et acceptèrent encore moins sa politique.

C’est aussi au cours du XVIIIe siècle que le mythe du bon roi, père du peuple, se fixe définitivement. Des anecdotes, pour la plupart fabriquées de toutes pièces, cherchent à populariser l’image d’un souverain clément et généreux. Ainsi, l’épisode fameux du siège de Paris, réutilisé indéfiniment, par les auteurs et les artistes. Touché par la souffrance du peuple de Paris encerclé, Henri IV aurait laissé entrer des vivres dans la ville afin de sauver les habitants de la famine. Cela donne chez Voltaire : « Lorsqu’en un siège horrible et célèbre à jamais / Tout un peuple étonné vivra de vos bienfaits / […] Henri de ses sujets ennemis généreux / Aima mieux les sauver que de régner sur eux ». Et tant pis si, comme l’auteur l’avoue lui-même, la réalité des faits n’est pas avérée…

Sanguinaire et dépensier, il aime le luxe, le brillant (aujourd’hui on dirait le bling bling) pense d’abord à lui et à ses proches, pour lesquels il fait construire, ou améliorer des châteaux, des palais.

Pour s’en donner les moyens il accable les français d’impôts, lesquels, pour la grande majorité, n’en peuvent plus, et sont littéralement pris à la gorge.

Bien sur l’impôt direct est rééquilibré pour être « plus juste » : la taille qui rapportait 18 millions de livres en 1598, passa à moins de 14 millions en 1602, pour finir à 16 millions à la fin de son règne.

Sauf que pour compenser le « manque à gagner », ce sont les impôts indirects qui vont augmenter pour aller jusqu’à doubler entre 1600 et 1610.

En réalité, il écrasait les français d’impôts, ce qui expliquait en partie son impopularité.

On le voit, rien de nouveau sous le soleil.

2 jours avant la mort du Roi, une pauvre paysanne se pend avec ses six enfants parce qu’elle ne peut plus payer ses impôts.

Le Roi apprenant la nouvelle dit : « ce sont tous des canailles ».

Des spécialistes ont essayé en vain de recenser ses maitresses, et n’ont pu que conclure qu’elles se comptaient par dizaines.

Comme le dit Philippe Delorme, historien et journaliste, auteur du livre « Henri IV, les réalités d’un mythe » (éditions de l’Archipel) : « on parle en effet d’un roi débonnaire, d’un conciliant, d’un réconciliateur, du roi tolérant, mais en réalité, ce roi qui était détesté des français de son vivant va être encensé, va devenir un mythe après sa mort, surtout au 18ème siècle, notamment grâce à Voltaire, puis au 19ème siècle grâce aux encyclopédistes qui vont faire d’Henri IV ce modèle du roi parfait, du roi attentif à son peuple alors que dans la réalité de son règne c’était très très différent (…) il gouvernait de manière autoritaire, et il écrasait les français d’impôts (…) quand il est mort, sa popularité était extrêmement basse (…) il a eu la chance de mourir au bon moment : les écrivains ont dit à ce moment : "c’est un fait merveilleux de savoir mourir quand il faut (…) c’est un roi qui a su créer autour de lui une légende".

À partir de 1750, le mythe submerge la société et devient même une « espèce de culte et de religion » si l’on en croit Melchior Grimm (Correspondance littéraire, 1773). La musique, les chants et le théâtre s’emparent d’Henri IV pour rendre sa légende plus vivante encore. En 1756, Sedaine avait déjà évoqué la figure d’Henri IV dans son opéra comique en trois actes, Le Diable à quatre. On y voyait le roi – aisément identifiable même si l’auteur ne citait pas son nom – dans l’anecdote bien connue où Henri, perdu lors d’une partie de chasse, trouvait refuge et hospitalité chez un meunier sans être démasqué. Après avoir partagé la table du meunier et la couche de sa femme, Henri se faisait reconnaître le lendemain avant de récompenser ses hôtes. Henri revêt ainsi la figure du roi populaire, partageant les mêmes codes et la vie simple de ses sujets, libertin au grand cœur.

En 1774, La Partie de chasse de Henri IV de Charles Collé exploite le filon Henri. Chansonnier et auteur populaire à succès, Collé écrit une comédie en trois actes et en prose dans laquelle Henri apparaît une nouvelle fois sous ses plus beaux atours : roi bonhomme, philanthrope, proche du peuple et magnanime. L’œuvre, parsemée ça et là de chansons reprises en chœur par le public – dont le fameux « Vive Henri IV », qui devint sous la restauration l’hymne officieux de la monarchie – connaît un succès foudroyant au début du règne de Louis XVI, puis tout au long du XIXe siècle.

Ah ! Le bon roi Henri IV ! Cet admirable père de famille qui se met à quatre pattes pour jouer avec ses enfants, cet insatiable séducteur qui roucoule devant chaque jupon, ce mécène des Restos du coeur qui offre une poule au pot à chacun de ses sujets, que nous l’aimons... C’est probablement le roi préféré des Français. Pourtant, c’est aussi un monstre capable de massacrer et de rançonner des citadins paisibles qui ont le malheur de se refuser à lui. Comme tous les grands seigneurs de cette époque, il est capable d’une cruauté qui, aujourd’hui, ferait passer Saddam Hussein, Bachar el-Assad ou... George Bush pour des petits saints.

Henri IV montre sa face sombre en janvier 1595 quand il lâche sur la Franche-Comté ses deux alliés, les tristes sires lorrains de Tremblecourt et d’Haussonville. En effet, celle-ci est une possession de l’Espagne à qui il vient de déclarer la guerre. Le bon roi Henri est prêt à tout pour récupérer le comté de Bourgogne (aujourd’hui, la Franche-Comté), dont les habitants parlent français.

Si, dans un premier temps, il n’utilise pas ses propres troupes, c’est qu’il a peur des autres Nations. Il est bien le seul à le craindre... Bref, ses deux sbires lorrains massacrent et pillent la région sans vergogne, avec son assentiment. Si certaines cités comme Dole et Gray échappent à la destruction totale grâce à leurs hautes murailles, d’autres tombent comme des fruits mûrs. Ainsi la population de Baulay est égorgée. Vesoul et de nombreuses autres cités doivent payer une rançon pour éviter leur mise à sac. Les cantons suisses qui avaient conclu un traité d’alliance avec le comté de Bourgogne se gardent bien d’intervenir. Tant qu’on ne s’en prend pas à leurs banques... Et puis cette guerre est une histoire de cathos. Qu’ils se débrouillent entre eux !

Finalement, les Espagnols interviennent pour protéger leur possession avec une armée levée dans la région qui massacre les troupes d’Haussonville et de Tremblecourt. Voilà qui oblige Henri IV à sortir du bois. Il pénètre dans le comté avec son armée menée par le maréchal de Biron. Bien décidé à en découdre et à faire raquer ces riches Francs-Comtois. Le bon roi commence par vaincre la troupe espagnole, décimée, il est vrai, par la maladie, puis organise un petit rallye mondain destiné à rançonner chaque cité.

Pour convaincre les récalcitrants, rien ne vaut un petit massacre. Les bourgeois de Besançon préfèrent promettre 30 000 écus en échange de leur tranquillité. À Arbois, on n’a pas l’intention de se faire racketter. Aussi, le 4 août 1595, quand le maréchal de Biron s’établit dans les faubourgs de la cité, la population organise la défense. Tout le monde donne la main, hommes, femmes, enfants. Les assiégés refusent toutes les propositions de reddition et se paient même le luxe de tenter plusieurs sorties. Fureur de Biron qui attaque les faubourgs. Comme ses troupes essuient de lourdes pertes, il met le feu à plus de 120 maisons.

Dans la nuit du 6 ou 7, le maréchal reçoit en renfort des canons qu’il met en batterie. Dès les premiers boulets, les Arboisiens, comprenant qu’ils n’ont plus grande chance, acceptent de déposer les armes en échange de la promesse qu’aucun mal ne sera fait à la population et à ses biens. Tu parles, Charles. Les troupes, qui ont l’habitude de compléter leur maigre solde - quand elles en touchent une - avec la rapine, s’empressent de piller la ville et d’occire les habitants qui auraient l’outrecuidance de s’en alarmer.

Débarquant sur place le 9 août, le bon roi Henri IV laisse ses hommes se payer sur la bête. On les connaît, les promesses de Gascon... Et comme lui aussi possède de petits soucis d’argent, il exige une rançon de 10 000 écus, qu’il baisse magnanimement à 7 000 écus. Afin de se garantir contre tout défaut de paiement, il prend plusieurs bourgeois en otage. Enfin, contrairement à toutes les promesses faites par Biron, Henri fait pendre Jean Morel, qui avait organisé la résistance de la cité.

Arbois n’est pas la seule cité martyre. Dans le sillage des Français, ce n’est que morts et pillages. Château-Chalon est mise à feu et à sang. Le bourg d’Arlay, qui, le 15 août, ose défendre ses biens, est pris d’assaut et pillé. Le Béarnais réclame une rançon aux survivants s’ils ne veulent pas être passés au fil de l’épée. Pour montrer qu’il ne plaisante pas, le bon roi de France en occit deux cents dont les corps sont jetés sous l’église de Saint-Claude.

Écoeuré par tant de barbarie, le recteur de l’hôpital du Saint-Esprit écrira dans ses Mémoires : "Jamais les eaux de la Garonne ne pourront laver le Béarnais d’un pareil méfait. Dieu lui fasse bonne justice." Ledit Béarnais s’en bat l’oeil et marche sur Lons. Menaçant d’égorger tout le monde, il obtient aussi sec la reddition de la cité et exige un tribut de 30 000 écus pour se retirer sans laisser de garnison sur place. Les échevins topent là à 25 000 écus. Mais le lendemain, le roi de France, oubliant l’accord, s’avance avec six canons pour investir la ville, malgré sa promesse de la veille.

L’arrivée de renforts espagnols oblige Henri IV à se retirer de Franche-Comté en signant un nouvel accord de neutralité. Les Francs-Comtois retrouvent la paix mais pas pour longtemps. En 1635, Richelieu remet le couvert en engageant la France dans la guerre de Trente Ans. Cette fois, ce sera la moitié de la population qui sera exterminée par l’armée française.

L’interprétation que l’on opère aujourd’hui de l’édit de Nantes - un acte de tolérance religieuse - est anachronique : à l’époque d’Henri IV, ce concept n’existait pas. Pour autant, en organisant la paix armée entre les deux religions, ce grand acte politique a instauré la coexistence entre elles, faisant prévaloir, au-delà des appartenances spirituelles, une communauté temporelle qu’on appellera plus tard la nation. Justement, après s’être converti, Henri IV déclarait ceci : « Je veux que ceux de la Religion vivent en paix en mon royaume, non pas pour ce qu’ils sont de la Religion, mais d’autant qu’ils ont été fidèles serviteurs à moi et à la couronne de France. » Ajoutant, principe capital : « Nous sommes tous français et concitoyens d’une même patrie. »

Dans "Les réalités d’un mythe", Philippe Delorme dévoile la réalité derrière la légende - et les aspects méconnus de la personnalité du roi : son égoïsme foncier, en particulier à l’égard des femmes ; son opportunisme religieux ; sa dureté vis-à-vis du peuple, pressuré d’impôts et dont les révoltes furent réprimées dans le sang ; la paix civile achetée à grands frais, en soudoyant les princes ; les fortunes dilapidées pour ses maîtresses ; sa curieuse conception de l’éducation des enfants, en particulier du jeune Louis XIII ; une politique inutilement agressive à l’égard des puissances catholiques : Henri IV ne s’apprêtait-il pas à embraser l’Europe - notamment pour récupérer la princesse de Condé qu’il convoitait - au moment où il mourut sous le couteau de Ravaillac ?

Toute l’œuvre politique d’Henri IV, mettant un terme à la dislocation sociale provoquée par la guerre civile et les affrontements religieux, va consister à bâtir l’Etat moderne. Le mythe de Henri IV est celui qui unifie le peuple derrière l’Etat comme sauveur du peuple et de sa sécurité. Beau mythe quand on sait que les guerres de religions ont été des grands crimes d’Etat...

Louis IX dit, plus tard, Saint Louis

Cette illustration du roi bon et juste, arbitre de tous ses sujets, est l’une des images d’Épinal de l’Histoire de France.

Il est souvent représenté ainsi, assis sous son chêne du bois de Vincennes, rendant justice aux malheureux contre des puissants, un mythe fabriqué par son chroniqueur Jean de Joinville, son principal biographe et l’un des principaux témoins lors de son procès de canonisation.

C’est après sa mort et nullement du fait de sa conduite auprès de son peuple que Louis IX fut appelé « Saint Louis » mais parce qu’il organisa en France une croisade en Orient à l’appel du pape. Il a ponctionné pour son entreprises tous les moyens dont il pouvait disposer en rançonnant le petit peuple. Après une expédition sans gloire au Caire où son armée fut massacrée, il fut fait prisonnier. La durée de son expédition est due essentiellement à la durée des négociations de la rançon et aux combats entre ceux qui le détenaient.

Cela ne l’empêcha pas d’exploiter la gloire de son expédition. Ce fut quelques mois après son retour d’Égypte qu’il reçut dans sa capitale le roi d’Angleterre. Il déploya dans cette circonstance une magnificence royale, et le 25 mars 1259 il conclut amer ce prince un traité par lequel il lui rendit tout ce qui lui restait au delà de la Garonne, le Quercy, le Limousin, l’Agenais et une partie de la Saintonge. Réputé pour sa piété, Louis IX se taille, grâce aux croisades, une réputation de roi diplomate et juriste dans toute l’Europe. Les royaumes font appel à sa sagesse dans les affaires complexes. Ainsi, il arbitre la succession du comté de Hainaut par le « Dit de Péronne » du 24 septembre 1256. Le traité de Paris du 28 mai 1258, ratifié le 4 décembre 1259, restitue au royaume d’Angleterre la suzeraineté sur le Limousin, le Périgord, la Guyenne, le Quercy, l’Agenais et une partie de la Saintonge au sud de la Charente, tandis que pour sa part, Henri III d’Angleterre renonce à la Normandie, au Maine, à l’Anjou et au Poitou, en même temps qu’il accepte de rendre l’hommage pour la Guyenne.

Dans la famille des rois dispendieux, je demande Louis IX, notre brave Saint Louis. Le Trésor part en quenouille avec lui au XIIIe siècle.
La raison ? Principalement les ruineuses croisades qu’il engage en Terre Sainte par deux fois mais aussi les précieuses reliques de la Passion qu’il collectionne pour la Sainte Chapelle, dont la couronne du Christ achetée 40.000 livres, soit l’équivalent du coût de construction de la Sainte Chapelle elle-même !

Sa première croisade, en 1248, va engloutir pas moins d’un million et demi de livres alors que les seuls revenus du royaume s’élèvent annuellement à 250.000 livres. Car la guerre coûte cher et reste la principale cause des déficits pendant le Moyen Âge, qui voit seigneurs, princes et souverains se ruiner en permanence pour défendre ou conquérir des terres.

Fort logiquement, le premier impôt permanent est établi à l’issue de la plus importante de ces guerres, la guerre de Cent ans. Le roi Charles VII convoque les états généraux, une assemblée de tous les corps constitués du royaume, et obtient le droit de prélever tous les ans une aide pour la « taille des lances » (autrement dit l’achat et l’entretien des armes de guerre).

La boulimie fiscale ne va désormais plus avoir de limite, en lien avec la croissance de l’État et de ses attributions.

Il se montrait fort belliqueux envers les juifs et les infidèles, c’est pourquoi il dira à ce sujet : « Si quiconque s’avise de médire de la foi chrétienne, il ne faut la défendre qu’avec l’épée, et on doit donner de l’épée dans le ventre autant qu’elle peut y entrer ». Il faut rapprocher ces propos de la « découverte » faite à l’époque par les chrétiens, que les textes talmudiques contenaient des propos hostiles à Jésus et à Marie. En mars 1240, il organise à la demande du pape Grégoire IX le « procès du Talmud », pour statuer sur l’accusation de juifs convertis au christianisme, selon lesquels le Talmud contient un certain nombre d’invectives contre Jésus-Christ et contre la Sainte Vierge. La controverse sur le sujet se tient à Paris, sous la présidence de Blanche de Castille. Le rabbin Yehiel de Paris représente les juifs. Eudes de Châteauroux, proviseur de la Sorbonne, et l’abbé Nicolas Donin, juif apostat à l’origine de la dénonciation (il avait été excommunié par Rabbi Yehiel en 1225), concluent que le reproche est fondé. Le roi fait alors brûler vingt-quatre charrettes de traités talmudiques à Paris. En 1254, il bannit de France les juifs qui refusent de se convertir au catholicisme. Ce décret fut annulé quelques années plus tard en échange d’un versement d’argent au trésor royal. En 1269, il impose aux juifs de porter des signes vestimentaires distinctifs. Pour les hommes, un rond d’étoffe jaune, la rouelle, sur la poitrine et un bonnet spécial pour les femmes. La couleur jaune est le symbole de la couleur de l’or représentant le péché d’avarice. En mettant en garde la population, ces signes permettent de les différencier et d’empêcher ainsi les mariages mixtes.

Charles IX

Est bien connue l’exclamation prêtée au roi Charles IX lors de la décision de lancer le massacre des Protestants : "Tuez-les tous et qu’il n’en reste pas un seul pour me le reprocher."Il est en effet l’organisateur en chef du plus grand massacre de religion de l’époque : la Saint-Barthélemy, même s’il partage cette responsabilité avec Catherine de Médicis.

Le 23 août 1572, veille du massacre des protestants à Paris, de la Saint-Barthélemy, le roi Charles IX, à la suite de l’attentat raté contre l’amiral de Coligny chef des Protestants le 22 août, déclare : « Il était à craindre que le peuple, qui déjà était en émoi, ne fit quelque sédition, ou bien qu’en une ville enragée et turbulente comme celle-là, il se fit quelque tumulte. » Témoignage de François Hotman dans « Discours simple et véritable des rages exercées par la France »

Le massacre commence en sortant du château royal du Louvre à Paris. Il a été enclenché par ordre du roi. Il commence par l’assassinat des hauts représentants des protestants à Paris qui y étaient rassemblés en vue de cérémonies marquant la réconciliation des deux communautés. Ce tableau du massacre de la Saint Barthélemy fut réalisé entre 1576 et 1584 par François Dubois (1529-1584), rescapé de la tuerie alors que toute sa famille de confession huguenote s’est fait assassiner par les catholiques. Il souhaitait que son tableau reflète la réalité du massacre à travers les vêtements. Ainsi, les catholiques sont représentés en rouge et les protestants en noir ou en chemise de nuit. Dubois a surement voulu afficher ici l’esprit qu’avaient les catholiques : les protestants en noirs symbolisent les démons à tuer et les catholiques en rouge sont les bourreaux, ceux qui versent le sang impure des huguenots. Le sang est partout sur le tableau même à des endroits vides : on peut observer certaines taches de sang sans qu’il y ait de victimes à côté. Les chiens, présents dans le tableau représentent à la fois la fidélité et la violence qu’ils peuvent montrer envers leurs ennemis. L’assassinat de Gaspard de Coligny est ici fort bien représenté : on voit son corps à la fenêtre de sa demeure puis en bas de celle-ci, l’image du corps de l’amiral qui est émasculé. Les restes sont ensuite jetés à la Seine comme si il s’agissait de détritus. Ce qu’on retrouvera sera pendu au gibet de Montfaucon (en haut à l’extrême droite du tableau). Le Louvres (au fond au centre) conserve son aspect médiéval. La porte de Saint-Honoré est fermé par une porte de bois (porte Lucy) avec des soldats : il n ’y a aucun point de fuite, on ne ressort du tableau que mort. François Dubois utilise le système du collage pour donner une vision totale de Paris et de l’horreur de la Saint-Barthélemy dans l’ensemble de la capitale française. On a une impression de chaos, sans grands axes de direction de la part de Dubois, pas de parallélisme, des couleurs diverses et des lances partants dans tous les sens. Le massacre n’épargne personne : Dubois nous montre des vieillards, des femmes, des enfants morts, des bébés sortis du ventre de leur mère. On remarque même deux enfants (probablement catholiques) qui traînent un nourrisson au bout d’une corde vers la Seine. Sur un toit, un homme cherche une échappatoire à cette tuerie mais semble déjà condamné. Prés du Louvre, on remarque Catherine de Médicis dans sa robe noire ayant massacré en masse des protestants. Si la reine-mère n’a pas participé physiquement à la tuerie, François Dubois veut souligner son poids de responsabilité dans ce massacre. A la fenêtre droite du Louvre, Dubois a pu vouloir représenter le roi Charles IX tirant sur des huguenots. Le sable qui sert de support ne semble pas pouvoir aspirer tout le sang rependu d’où les traces de sang sans personne. Dubois donne l’impression que le sang sort du tableau : c’est une vision de « vrai sang » que nous percevons. La scène, vécue par François Dubois, s’inscrit dans une violence frénétique (massacre) mais également une violence dite « purificatrice » et universelle. Dans un contexte de tension, de foi contre foi, Dubois peint le martyr de tous les protestants et la vision de deux camps irréconciliables. Tous les détails de cette terrible nuit de la Saint-Barthélemy se trouvent dans cette œuvre : les femmes transpercées, les pillages, l’assassinat de Coligny….pour nous donner une véritable vision de ce massacre.

Le 26 août, le roi justifie son action dans une déclaration au parlement de Paris : « Devant un danger éminent, et tel qu’il ne s’en était présentement pourvu par voie de fait que l’on rechercherait en vain les remèdes ordinaires de justice, (...) il a fallu user du glaive que dieu m’a mis dans les mains pour la conservation des bons et pour vengeance et extermination des méchants (...) sans garder une autre forme de solennité de justice. "

Le 24 août, fête de la Saint Barthélemy, Coligny est égorgé dans son lit et son cadavre jeté dans la rue et livré aux exactions de la populace. Les gardes et les miliciens, arborant une croix blanche sur leur pourpoint et une écharpe blanche, poursuivent le massacre dans le quartier de Saint-Germain l’Auxerrois. Ils massacrent deux cents nobles huguenots venus de toute la France pour assister aux noces princières et rassemblent leurs cadavres dans la cour du Louvre. Certains chefs protestants, prévenus à temps, arrivent à s’enfuir avec les gardes des Guise à leurs trousses. Quand la population parisienne sort dans la rue, réveillée par le tocsin, elle prend connaissance du massacre. C’est aussitôt la curée. Dans les rues de la capitale, chacun s’en prend aux protestants de rencontre. Les malheureux, hommes, femmes, enfants, sont traqués jusque dans leur lit et mis à mort des pires façons. Et l’on en profite pour piller les biens des victimes.

À la mi-journée, le roi ordonne d’en rester là. Mais ses sonneurs de trompe ont le plus grand mal à faire respecter ses ordres. Charles IX assume la responsabilité des événements. Il explique que Coligny avait ourdi un complot et qu’il avait dû l’exécuter. On évalue le nombre total de victimes dans l’ensemble du pays à 30.000 (plus que sous la Commune de 1871).

La Saint-Barthélemy a marqué un tournant de l’histoire de France. A partir du massacre de Paris, l’assassinat massif des Protestants s’est propagé aux grandes villes puis à tout le pays. Il représente un tournant politique et social pour un pays qui était largement gagné par le développement du protestantisme.

On peut s’imaginer qu’il s’agit d’un épisode de la haine entre religions. ce serait un lourd contre-sens.

La Saint-Barthélemy (le 22 août 1572) est l’épisode le plus sanglant de la lutte de la noblesse contre la révolution bourgeoise montante, une violence contre-révolutionnaire qui, menée par les classes dirigeantes et le pouvoir royal, visait à barrer la route à la montée révolutionnaire en dressant un fossé de sang entre deux parties de la population : catholiques et protestants. Les classes dirigeantes préféraient que le pays soit à feu et à sang, que la société recule de cent ans, plutôt que de perdre le pouvoir.

Le massacre de la saint Barthélemy répond à une menace sociale importante dans une période de crise économique : ce génocide est organisé au sommet de l’Etat, et cela commence par créer une atmosphère "raciste","xénophobe" et fasciste parmi le peuple à qui l’on désigne un ennemi dit concret (religieux ou pas )qui est apparenté à une terreur irrationnel (les terroristes) menaçant l’ordre établi et rendu responsable de tous les maux y compris ceux du chômage et de la misère.

L’Etat, pour maintenant en venir au présent du 21eme siècle, organise donc un sauve conduit et se dégage de toute responsabilité ; bien au contraire il veut apparaitre comme le protecteur, celui qui de bonne foi vient au secours des peuples sous le joug d’un tyran, celui qui donne l’argent aux pays en faillite, celui qui accueille le travailleur étranger, car dans toutes chose il y a le bon et le mal . L’Etat se veut le garant du bien, car l’Etat c’est un peu une partie de chacun de nous ? Quel gros mensonge.

Mais la recette fonctionne car l’Etat prend les devants, est offensif et crée une atmosphère...

Voilà l’atmosphère des crimes d’Etat du type "massacre des protestants de la saint Barthélémy" : l’Etat se fait passer pour victime et crie aux voleurs avec les poches pleins d’argent et les mains pleines de sang !

Dagobert

Ainsi, si nous avons tous au moins une fois dans notre vie chantonné le bon roi Dagobert, nous oublions que se cache un réel personnage historique derrière cette affaire de culotte. Et le moins que l’on puisse dire en lisant « Grands zhéros de l’Histoire de France », de Clémentine Portier-Kaltenbach, c’est que le roi Dagobert n’était pas si bon que cela ! « Obsédé sexuel sur les bords, polygame, spécialiste de la répudiation éclair », il avait, en dépit de « précieuses qualités politiques », un goût prononcé pour le sang et la cruauté. Cela est particulièrement manifeste lorsque Clémentine Portier-Kaltenbach nous raconte que Dagobert fit un jour égorger neuf mille Bulgares venus lui demander l’asile politique, ou qu’il ordonna pour mater une révolte que l’on décapite tous les Saxons dont la taille dépassait celle de son épée ! « Voilà ce qu’à l’époque mérovingienne on appelle un roi juste et sage ! », s’exclame l’auteur. Le mythe du bon roi étourdi (qui selon elle n’est pas non plus totalement infondé) en prend quand même un sacré coup !

Dagobert n’a régné que dix ans, années qui ont consisté à écraser toutes les révoltes des peuples pour mettre tous les peuples sous la coupe d’un seul Etat : le peuple d’Austrasie en 631, les Wisigoths en 631-633, les Leudes d’Austrasie en 634, les Basques en 637...

En le mythifiant, l’Etat français construit son propre mythe puisque Dagobert a été le dernier Mérovingien à régner durablement sur un royaume unifié.

Charles VI

Charles VI n’a pas de bol. Il ceint la couronne en pleine guerre de Cent Ans à seulement 12 ans. Plutôt lourd à porter pour un gosse. Effectivement, le jeune homme craquera quelques années plus tard, mais alors de quelle manière... Il devient complètement frappadingue. Comme s’il avait été atteint par une des fléchettes empoisonnées du Lotus bleu, en pire. Quel dommage, jusque-là c’était un souverain affable, bel homme, excellent cavalier. Il n’a qu’un seul défaut, c’est un insomniaque qui adore danser sur du bruit de David Guetta... Charles VI sait également se montrer très généreux. Un roi parfait, si le 5 août 1392, à 23 ans, il ne basculait dans la folie. Et de quelle manière !

Pendant que débutent les danses, une poignée de lascars se prépare en douce à donner à ce charivari une note plus exotique. Lassés par la routine des fiestas du Moyen-âge, le roi Charles VI et son acolyte Hugues de Guisay ont l’idée de génie de se déguiser en sauvages. Quatre autres joyeux drilles sont également de la partie : Milon, comte de Joigny, Yvain de Galles, dit le bâtard de Foix, Ogier de Nantouillet et Charles-Aymard de Poitiers. La fine équipe enfile des cottes de lin, les enduit de poix, éventre quelques oreillers pour y coller des plumes et ajoute par dessus de l’étoupe pour simuler de longs poils. Suprême raffinement : pour renforcer l’idée de sauvages capturés, cinq des six petits malins sont attachés les uns aux autres avec des chaînes et sont menés par le roi lui aussi déguisé. Fidèle à sa réputation, le duc d’Orléans entre bruyamment avec quatre chevaliers dans le même état que lui, et des valets non avertis de la consigne de sécurité, portant plusieurs torches. Il saisit celle d’un de ses valets et l’approche du visage d’un des sauvages pour savoir qui se cache derrière ces déguisements. La poix prend immédiatement feu. Voilà nos six jeunes hommes qui s’enflamment d’un seul coup, en poussant des hurlements de douleurs qui se mêlent aux cris d’effroi de l’assistance, sous les yeux des jeunes mariés pétrifiés.

Selon le Religieux de Saint-Denis, l’auteur d’une chronique de l’époque, depuis quelques jours déjà, le roi tient des propos insensés, peu dignes de son rang. Le 5 août, il chevauche en tête de ses hommes, à la poursuite de Pierre de Craon qui a tenté d’assassiner son connétable, Olivier de Clisson, quelques jours auparavant. Il aurait trouvé asile chez le duc de Bretagne. La troupe armée traverse la forêt du Mans où il fait une chaleur à crever. Charles VI est vêtu d’un habit de velours noir et coiffé d’un chaperon de panne rouge.

À la hauteur d’une léproserie, un vieillard en haillons surgit d’un buisson pour attraper la bride du cheval du roi, en criant : "Ne va pas plus loin, noble roi ! Tu es trahi !" Durant une demi-heure, le pauvre illuminé le poursuit de ses mises en garde. On l’écarte enfin. Le roi ne dit rien. Bientôt, l’ost royal sort de la forêt pour s’engager dans une plaine surchauffée. Dans les rangs de l’armée, on entend Claude Allègre murmurer : "Mais puisque je vous répète que le réchauffement climatique n’existe pas !" C’est alors qu’un page, cédant à la somnolence, lâche sa lance, laquelle vient frapper avec fracas le casque d’un voisin.

Tiré en sursaut de sa léthargie, Charles VI est pris de panique, puis de fureur. Il tourne bride, tire son épée de son fourreau et tranche en deux le page maladroit. Loin de se calmer, il éperonne son cheval en hurlant : "On veut me livrer à mes ennemis !" Sous les yeux épouvantés de son escorte, il pique droit sur son frère le duc d’Orléans, une lueur meurtrière dans le regard. Des écuyers s’interposent juste à temps pour éviter un drame. Mué en véritable démon, le roi taille quatre de ses cavaliers en carpaccio. Enfin, le chambellan Guillaume Martel parvient à sauter à califourchon dans son dos, avant de le désarmer. Ligoté sur le sol, puis étendu dans un chariot, Charles VI ne bouge plus, son visage est rouge, il peine à respirer, seuls ses yeux roulent dans ses orbites. Un homme le ventile. Il n’est plus question de poursuivre l’expédition punitive contre le duc de Bretagne. La troupe fait demi-tour au petit pas pour regagner Le Mans.

Durant trois jours, le roi gît, sans connaissance sur son lit. Il est plongé dans un coma profond qui déroute les médecins venus à son chevet. Il ne donne pas plus de signes de vie que Raymond Barre lorsqu’il siégeait à l’Assemblée nationale. Chacun pronostique une mort prochaine. Mais le jeune homme reprend connaissance, se confesse, demande pardon et promet des pèlerinages. Histoire de ne pas paraître idiots, les médecins évoquent un épanchement de bile noire échauffée ou encore un empoisonnement, voire un maléfice. À Creil, on fait venir un médecin nonagénaire de grande réputation pour examiner Charles VI. Guillaume de Harcigny est instruit des médecines hébraïques et arabes. Pour lui, le roi "tient trop de la moiteur de sa mère". Il se contente de prescrire de la tranquillité. Sage conseil, car le souverain retrouve son entière raison après quelques semaines. En guise de récompense, le noble vieillard touche une véritable fortune : mille couronnes d’or. Le trou de la Sécu daterait de cette époque, selon les spécialistes.

Par la suite, la vie de Charles VI est constamment émaillée de crises de démence. Elles durent de quelques jours à quelques mois. Elles sont plus ou moins intenses. Plus ou moins meurtrières. La première se serait produite six mois après la première, lorsqu’il participe en son palais de Saint-Paul, à Paris, au Bal des ardents donné pour le remariage d’une dame d’atour de la reine. Alors que la cérémonie bat son plein, plusieurs seigneurs, dont le roi, se livrent à un charivari. À l’époque, lorsqu’une veuve "trahissait" son premier époux mort en se remariant, des proches s’amusaient parfois à troubler la cérémonie du mariage avec un chahut. Le charivari !
Rechute

C’est ainsi que le roi, grimé en sauvage et portant un habit couvert de poix et de poils, surgit au milieu de la noce avec ses proches déguisés comme lui. Mais voilà que ce maladroit de duc d’Orléans met le feu avec sa torche à l’un des personnages. Celui-ci se propage, Charles VI commence à flamber comme un feu de Bengale. Heureusement, sa tante parvient à étouffer les flammes avec son lourd manteau. Trois des "sauvages" périssent brûlés. On a donc prétendu que cet effrayant incident aurait fait basculer la raison du roi, une deuxième fois. Mais rien ne le prouve vraiment.

En fait, la première rechute avérée se produit quelques mois plus tard à Abbeville. Le Religieux de Saint-Denis parle "d’extravagances indignes de la majesté royale". Charles VI prétend s’appeler Georges, ne reconnaît ni son épouse Isabeau de Bavière ni ses enfants. Quand la reine se présente devant lui, il la repousse, demandant : "Quelle est cette femme dont la vue m’obsède ? Délivrez-moi de son importunité." En revanche, il recherche la présence de sa belle-soeur, l’Italienne Valentine Visconti, qu’il nomme sa "bien-aimée". Il refuse d’être appelé roi et gratte furieusement ses armoiries sur la vaisselle. Il brise les cadeaux de son frère le duc d’Orléans. Il alterne des périodes d’intense activité et de prostration. Il danse souvent d’une façon obscène, court dans tous les sens au point qu’il faut murer les fenêtres pour lui éviter de passer au travers.

À d’autres moments, il déclare souffrir "comme s’il était percé de mille pointes". Durant ses crises, il refuse toute toilette. "La crasse produite par la sueur fait venir des pustules sur plusieurs parties du corps. Il était rongé de vermines et de poux qui auraient fini par pénétrer dans les chairs." Peu à peu, il retrouve sa raison et se remet à gouverner, mais les crises se succèdent.

On a retrouvé le nom de soixante-quatorze des médecins appelés à son chevet. Des chrétiens comme des juifs. Le docteur Philippe Douste-Blazy, qui a quitté le chevet de Bayrou, propose ses services. En désespoir de cause, on fait venir en consultation des magiciens et des sorciers. Tel Guyenne Arnaud Guillaume, qui prétend être capable de guérir le roi d’un seul mot. Tels les deux frères augustins qui préconisent de mélanger des perles en poudre aux aliments. Mal leur en prend, car ils sont bientôt arrêtés pour débauche. Ils avouent invoquer les démons, ce qui leur vaut de perdre la tête à leur tour, mais par décapitation. Leurs membres sont exposés aux portes de la ville.

Leur sort ne décourage pas des illuminés prétendant connaître le remède miracle. Tels les sorciers Briquet et Poinsot, dont le traitement magique consiste à enchaîner douze hommes à des colonnes de fer portant un cercle métallique, puis à se livrer à des incantations. Le roi reste fou comme un lapin tandis que les deux imposteurs sont brûlés vifs, comme il leur avait été promis en cas d’échec. En 1399, des moines du couvent de Cîteaux apportent au souverain un suaire qui aurait appartenu à Jésus. Le roi prie durant neuf jours devant la relique, sans aucun résultat.

Alors, les autorités imposent des mesures purificatoires à l’ensemble du pays : interdiction de la prostitution et des jeux de hasard, répression accrue des blasphèmes. DSK est exilé. Rien n’y fait. N’est pas pire sourd que Dieu. Même l’expulsion des juifs n’amène pas le roi sur le chemin de la raison. C’est à désespérer. Curieusement, au lieu d’accabler le roi pour sa folie, le peuple se sent plus proche de lui, et même l’en respecte davantage. Pour lui, cette maladie est l’expression d’une punition divine contre le luxe scandaleux régnant parmi la classe dirigeante.

Durant les absences de Charles VI, la régence est exercée par son frère le duc d’Orléans. Mais leurs trois tontons flingueurs, les ducs de Bourgogne, d’Anjou et du Berry, en profitent pour grignoter du pouvoir avec la complicité de la reine. C’est une guerre civile larvée qui se superpose à la guerre de Cent Ans. Entre deux crises, le roi est tout à fait capable d’assurer ses devoirs conjugaux comme gouvernementaux. Ainsi Isabeau accouche-t-elle en 1403 du futur Charles VII. Charles VI chevauche même en tête de son ost durant les guerres. Pourtant, il n’est pas à Azincourt quand son armée se fait étriller par les troupes d’Henri V d’Angleterre.

Durant les ultimes années de sa vie, les crises deviennent moins fréquentes et moins fortes. Charles semble plus apaisé. Délaissant de plus en plus le gouvernement de la France, il mène une vie simple au milieu de ses serviteurs. Il chasse, joue aux échecs et aux cartes. Repoussant Isabeau, il se contente de sa "petite reine", la jeune et douce Odette de Champdivers. En 1422, après 42 ans de règne, Charles VI s’éteint paisiblement. Son autopsie ne révèle aucune lésion organique.

François 1er

C’est à l’époque de François 1er qu’on invente l’idée de créer de toutes pièces l’histoire royale. C’est Guillaume Budé qui expose au roi François qu’un roi se construit de manière médiatique. En 1515, date de la victoire-échec dont on a parlé au début, Budé expose dans un ouvrage pour le roi tout l’intérêt qu’il y a à organiser par soi-même son historiographie et à la diffuser... Vers 1518 ou 1519, Budé présente à François Ier "L’Institution du Prince", un bref traité d’instruction politique par lequel il montre tout l’intérêt de créer une image d’un roi humaniste, courageux, dévoué, etc...

Quand François accède au trône en 1515, il a 20 ans et la réputation d’être un humaniste. Il choisit comme emblème la salamandre. Son entrée dans Paris le 15 février 1515, donne le ton de son règne. Vêtu d’un costume en toile d’argent incrusté de joyaux, il fait cabrer son cheval et jette des pièces de monnaie à la foule. En France, le roi érige de nombreux et coûteux châteaux et mène des guerres non moins coûteuses pour le budget de l’Etat. La bourgeoisie en tire parti et c’est elle qui acclame le roi. Pas les paysans ni les pauvres des villes !

Le règne de François Ier voit un renforcement de l’autorité royale jetant les bases de l’absolutisme. Le défenseur le plus ardent de la suprématie royale est le jurisconsulte Charles du Moulin. Pour lui, le roi seul, et aucun autre seigneur ou officier, bénéficie de l’imperium.
La cour (estimée entre 5 000 et 15 000 personnes) que le roi rétablit à Paris, en édifiant le nouveau Louvre, est le véritable cœur du pouvoir. Bien qu’entouré de conseils – le Grand Conseil, le Conseil des parties ou Conseil privé et le Conseil étroit, ce dernier chargé des décisions importantes de l’État –, le roi, apparaît de plus en plus comme la source unique de l’autorité, arbitrant en dernier ressort les initiatives de l’administration judiciaire et financière, choisissant et disgraciant ses favoris, ses ministres et ses conseillers.

En fait du roi savant, peintre ou mécène, c’est surtout le roi guerrier aux nombreuses ambitions impériales en Italie, en Europe mais aussi d’ambitions coloniales. Lorsque François Ier accède au pouvoir, la France ne s’intéresse guère aux grandes découvertes et limite ses périples maritimes aux actions de contrebande et aux actes de piraterie sur la côte africaine. Pourtant, la France possède tous les atouts d’une grande puissance coloniale et navale : elle est dotée d’une longue façade maritime, de nombreux ports et de marins de qualité. Néanmoins, les prédécesseurs de François Ier privilégient les conquêtes méditerranéennes. C’est donc sous le règne de celui-ci que naît le premier engouement français pour les Amériques. Le roi de France s’attache à desserrer le contrôle du Nouveau Monde mis en place par les royaumes ibériques avec l’appui de la papauté (bulle pontificale de 1493 Inter Coetera modifiée par le traité de Tordesillas de 1494) en limitant la portée de la bulle aux territoires déjà découverts à cette date, limitation qu’il n’obtient que sous la forme d’une déclaration de Clément VII en 1533. François Ier peut donc pousser ses envoyés vers les territoires qui ne sont pas encore sous tutelle ibérique. Les protestations espagnoles nées de cette politique sont à l’origine de la répartie du roi de France : « Je voudrais bien voir la clause du testament d’Adam qui m’exclut du partage du monde. » Ainsi, les navires de l’armateur dieppois Jean Ango reconnaissent les côtes de Terre-Neuve, descendent en Guinée puis au Brésil, et contournent le Cap jusqu’à Sumatra. En 1522, l’un de ses capitaines, Jean Fleury, intercepte deux caravelles espagnoles venant de la Nouvelle-Espagne et transportant les trésors offerts par Cortès à Charles Quint. Cette découverte fait prendre conscience à la cour de France de l’importance du Nouveau Monde et des richesses qu’il peut contenir. En 1523, François Ier commence à encourager les explorations en Amérique du Nord. Il prend sous son égide le Florentin Giovanni da Verrazano et met à sa dispositions le vaisseau royal La Dauphine, laissant à Jean Ango et aux capitaux florentins le soin de financer l’expédition. Verrazano atteint l’Amérique du Nord et la Floride (qu’il baptise du nom de Franciscane), cartographie Terre-Neuve, puis fonde la Nouvelle-Angoulême (la future Nouvelle-Amsterdam, plus connue sous le nom de New York), en hommage à la famille du roi de France, avant de poursuivre vers le Brésil et les Antilles. Son objectif est de trouver un passage vers le nord-ouest menant directement aux Indes. Ses conclusions sont éloquentes : « C’est une terre inconnue des anciens, […] plus grande que l’Europe, l’Afrique et presque que l’Asie ». En 1534, Jean Le Veneur, évêque de Lisieux et grand aumônier du roi, conseille à François Ier d’envoyer le Malouin Jacques Cartier en expédition pour découvrir « certaines îles et pays où l’on dit qu’il se doit trouver grande quantité d’or et autres riches choses ». C’est la naissance de la Nouvelle-France.

Parti de Saint-Malo le 20 avril 1534, Cartier traverse l’Atlantique en seulement trois semaines. Le 24 juillet, il prend possession de la côte de Gaspé, puis revient à Saint-Malo le 5 septembre. Soutenu par François Ier, il repart le 15 mai 1535 à la tête de trois navires. Il découvre l’embouchure du Saint-Laurent, remonte le fleuve et fonde le poste de Sainte-Croix (future Québec), puis atteint un village sur une colline, Hochelaga, qu’il re-baptise en Mont-Royal (future Montréal). Remontés à Sainte-Croix, les Français y restent bloqués par les glaces entre novembre 1535 et avril 1536. Cartier repart pour la France considérablement affaibli et arrive à Saint-Malo le 16 juillet 1536. La guerre avec Charles Quint ne facilite pas la mise en place d’une nouvelle expédition. Pour gouverner cette province d’outre-mer, François Ier choisit le Languedocien Jean-François de La Rocque de Roberval, militaire expert en fortification. Jacques Cartier quitte Saint-Malo le 23 mai 1541 à la tête de cinq navires chargés de vivres pour deux ans et transportant plusieurs centaines d’hommes. Il fonde une colonie qu’il nomme Charles-Bourg à une quinzaine de kilomètres de l’île de Sainte-Croix. Après des complications avec les populations amérindiennes et un hivernage difficile, Cartier décide de regagner la France. Le 8 juin, il croise, à Terre-Neuve, Roberval qui arrive seul à la colonie en juillet. En octobre 1543, il est de retour en France.
Cette tentative française en Amérique du nord est donc un échec, mais la prise de possession de territoires nord-américains remet en cause le monopole colonial espagnol et ouvre des perspectives pour l’avenir, notamment pour Samuel de Champlain au début du XVIIe siècle.

Louis XIV ou le « roi Soleil »

Il s’est chargé lui-même de construire son mythe car celui-ci lui était indispensable à son projet politique : mettre au pas la haute noblesse qui contestait la royauté. N’oublions pas qu’enfant, il avait été contraint de fuir la révolte parisienne et des Grands avec sa mère et son premier ministre. Dès 1661 , Louis XIV fait construire un palais grandiose.
C ’est le château de Versailles.
Il veut un palais somptueux à la mesure de son orgueil ,
pour prouver qu’ il est le plus grand roi du monde.

Il faut 31 ans de travail et jusqu’à 30000 ouvriers pour le réaliser.
Les meilleurs artistes dirigent ce gigantesque chantier et travaillent à sa décoration très luxueuse. Au château de Versailles , Louis XIV s’ entoure d’ une cour très nombreuse : il rassemble autour de lui des milliers de courtisans qui vivent de ses faveurs. Ainsi , il peut mieux les contrôler.

Le roi dépense beaucoup pour garder cette cour autour de lui.

Toute la vie de la Cour est organisée autour de la personne du roi.
Chaque acte de la vie du roi est une cérémonie. Sa vie est un spectacle :
son lever, sa toilette, ses repas, son coucher se font en public.
C’est un honneur d’y assister.

« Toute puissance, toute autorité réside dans la main du roi. Tout ce qui se trouve dans l’étendue de nos Etats nous appartient. Les rois sont seigneurs absolus.
J’ai décidé de ne pas prendre de Premier ministre, rien n’étant plus indigne que de voir, d’un côté, toutes les fonctions et de l’autre, le seul titre de roi. Il fallait faire connaître que mon intention n’était pas de partager mon autorité. »
Louis XIV, 1661

Pour lui, la France doit être le pays le plus fort
d’ Europe. Alors, il se lance dans de nombreuses guerres contre les rois européens : espagnols, anglais , hollandais.

Louis XIV cherche sans arrêt à étendre son royaume par la guerre.
Celles-ci ne s’ arrêtent jamais tout au long de son règne.

Mais ces guerres coûtent très cher au royaume.

Pour pouvoir payer les nombreuses dépenses de Louis XIV (le château de Versailles, la cour, les guerres),
les paysans sont accablés d’ impôts :
 taille , gabelle sur le sel , dîme au curé et au clergé ,
droits à payer au seigneur .

Un grand sentiment d’injustice s’installe : les nobles (les seigneurs) et le clergé (les religieux), eux, ne paient pas d’ impôts,
alors qu’ ils sont les plus riches.

Le règne de Louis XIV connut plusieurs graves famines :
la famine de 1693-1694 fut la plus grave.
En partie due à de très mauvaises conditions météorologiques, elle entraîna près de 2 millions de morts.

Puis, en 1709 , un terrible hiver gèle tous les cours d’ eau et le sol sur un mètre de profondeur . La totalité de la récolte de l’année est perdue : pas de blé, de vin , pas de fruits . Les animaux meurent.

En cette dernière partie de règne, la popularité de Louis XIV a beaucoup baissé. Les critiques et les injures deviennent courantes. Le peuple français perd confiance et même le respect envers son roi.

Fénélon, un écrivain, tente d’informer le roi sur l’état de son royaume :

« Votre peuple meurt de faim, la culture des terres est abandonnée, les villes et les campagnes se dépeuplent. Au lieu de tirer de l’argent de ce pauvre peuple, il faudrait lui faire l’aumône et le nourrir. Il est plein de désespoir. La France entière n’est plus qu’un grand hôpital désolé et sans provisions. La révolte s’allume peu à peu. »
Fénelon, Lettre à Louis XIV.
À partir des années 1660, une politique de conversion des protestants au catholicisme fut entreprise par Louis XIV à travers le royaume. Elle s’exerce par un travail missionnaire, mais aussi par diverses persécutions, comme les dragonnades. Les dragonnades consistent à obliger les familles protestantes à loger un dragon, membre d’un corps de militaires. Le dragon se loge au frais de la famille protestante, et exerce diverses pressions sur elle.

Pour achever cette politique importante, Louis XIV révoqua le versant religieux de l’édit de Nantes en signant l’édit de Fontainebleau, contresigné par le chancelier Michel Le Tellier, le 22 octobre 1685. Le protestantisme devenait dès lors interdit sur le territoire français (excepté l’Alsace, où l’édit de Nantes ne fut jamais appliqué, cette région n’étant intégrée au royaume qu’en 1648).
Cette révocation entraîna l’exil de beaucoup de huguenots, affaiblissant l’économie française au bénéfice des pays protestants qui les ont accueillis : l’Angleterre et ses colonies de la Virginie et de la Caroline du Sud, la Prusse7, la Suisse, les Pays-Bas et ses colonies du Cap et de la Nouvelle-Amsterdam, cette dernière anciennement située sur le territoire du New York et du New Jersey d’aujourd’hui. On parle très approximativement de 300 000 exilés, dont beaucoup d’artisans ou de membres de la bourgeoisie.
La révocation de l’édit de Nantes a aussi eu pour conséquences indirectes des soulèvements de protestants, comme la guerre des camisards des Cévennes, et une très forte érosion du nombre des protestants vivant en France, par l’exil ou la conversion progressive au catholicisme.

Cette politique de conversions plus ou moins forcées fut efficace, au moins officiellement, et on vit se développer une pratique clandestine du protestantisme, chez de nouveaux convertis au catholicisme.
Le nombre de protestants « officiels » chuta fortement, et l’édit de Nantes, formellement toujours valide, fut vidé de son contenu.

Charlemagne

Héros national commun à plusieurs pays européens qui s’en réclament alternativement selon les époques et les mutations politiques, Charlemagne est une figure foncièrement historique, que sa stature, physique, morale et politique, a conduit sur les chemins de la légende.

Cette image a, dans ses grandes lignes, été façonnée par les moines de Saint-Denis : elle servira de fondement à la royauté française. Et elle a été propagée par les chansons de geste, qui n’apparaissent qu’à la fin du XIème siècle, c’est-à-dire plus de 250 ans après la mort du personnage historique, et qui se répandent aux XII et XIIIèmes siècles, autrement dit à l’époque des Croisades. Il est dès lors facile de comprendre pourquoi elles insistent tant sur cette campagne d’Espagne qui, dans l’histoire de ce roi, ne fut qu’une rapide parenthèse, au demeurant peu glorieuse. Si Charlemagne se montra effectivement un ardent défenseur de la foi chrétienne, son féroce engagement contre les Sarrasins ne résulte en fait que de circonstances historiques qui lui restent étrangères.

Quoi qu’il en soit, Charlemagne reste pour nous le héros de la chrétienté contre les Sarrasins (ce terme s’étendant en fait à tous les ennemis et à tous les païens, fussent-ils Basques, Bretons ou Saxons ...). Il est celui qui venge Roland en tuant personnellement leur chef suprême. En fait, Eginhard le présente comme un fidèle ami du calife Haroun-al-Rachid.

Charlemagne était certainement un personnage imposant, hors du commun et de la commune mesure, même si Eginhard, qui le connaissait bien, se contente de dire qu’il était "d’une taille élevée, sans rien d’excessif" : "7 pieds" nous dit-il, ce qui n’était déjà pas si mal, si l’on considère que cela représente plus de 2 mètres 20 ! Et il devait avoir bon pied tout aussi bien, puisque c’est sur sa pointure que fut définie l’unité de mesure du "pied du roi" : 32,5 cm !
Le temps passant, et la légende prenant son essor, il prend carrément l’allure d’un géant. Voici par exemple ce qu’en écrit, au XVIème siècle, Jehan de Bourdigné dans ses Chroniques d’Anjou et du Maine : " Sa stature estoit haulte de huyt pieds, et avoit les épaulles larges, et les reins bien croysez, le ventre de bonne grandeur (…) Sa face étoit de longueur d’une paulme et demye, et estoit sa barbe pendant la longueur d’une paulme au dessoubz du menton, et avoit le fronc de la largeur d’ung pied, et avoit les yeux aspres comme ung lyon, scintillants et rouges comme charbons vifz et ardans (…) Et estoit son regard tel qu’il n’y avoit homme si asseuré qui n’eust moult grant frayeur et craincte, quant il le regardoit en sa fureur (…) A son repas, il estoit petit mangeur de pain, mais il mangeoit assez chair, car il mangeoit la quarte partie d’ung mouton, ou deux poulailles, ou une oye, ou une espaulle ou jambon de pourceau, ou ung paon, ou une grue, ou ung lièvre (…) Il estoit de si merveilleuse puissance, que d’ung seul coup de son espée fendoit ung chevalier et ung cheval (…) Il ouvrait quatre fers de cheval forgez de frays, en les estandant avecques les deux mains. Il enlevoit de terre sur la paulme de la main ung chevalier tout armé, et le montait jusques au dessus de sa teste. "

Parallèlement le personnage s’enrichit de traits proprement mythiques : géant né d’un "petit roi" ("le bref"), d’un roitelet, et d’une mère "au grand pied", il est conçu le jour légendaire où Pépin retrouve au fond de la forêt sa femme Berthe qu’il avait injustement bannie. Sa naissance, qui survient le même jour et à la même heure que celle des fondateurs de lignées Garin de Monglane et Doon de Mayence, est accompagnée des mêmes prodiges que pour eux : tempêtes, tremblements de terre, et la foudre qui tombe tout près et creuse un trou d’où surgit un "arbre long et droit, flouri et verdoiant", symbole de la lignée qu’il va engendrer.

S’ensuit le thème universel de l’enfant spolié de ses droits par ses demi-frères Reimfré et Audri qui, perpétuant l’injustice commise par leur mère, cherchent à l’évincer du pouvoir. Sans parler de son propre frère Carloman que Pépin le Bref privilégie à ses dépens. Sa vie ne cesse de faire alterner actes de prouesse ou de sagesse, gestes fabuleux et interventions divines. Entouré de ses douze pairs et de ses barons, Charlemagne s’impose, à la façon du roi Arthur, le pivot des aventures des Chevaliers de la Table Ronde, comme le personnage central de tout un cycle de récits héroïco-légendaires qui le font vivre plus de 200 ans. Et Eginhard lui-même fait état des prodiges qui présagent et accompagnent sa mort.

Ce qui n’empêche par Charlemagne d’être sujet à la faute : il lui arrive de prendre les mauvaises décisions, de se montrer foncièrement injuste et cruel, de trahir sa parole. Tout un cycle de récits le présentent ainsi dans le rôle du félon. Il lui arrive surtout de succomber à sa trop riche nature et à sa passion des femmes. La présence de son fils, Pépin le Bossu, celui qui le trahira et qui, en marge de l’épopée carolingienne, demeure une menace cachée, semble aussi vouloir le ramener à de plus modestes proportions.
Mais il y a surtout ce qu’il est convenu d’appeler "le péché de Charlemagne", qui est évoqué dans plusieurs textes. C’est ainsi que plusieurs saints ont une vision montrant l’empereur dans les tourments de l’Enfer, ou du moins du Purgatoire car ils parviennent à sauver son âme. Mais peu font état de la nature de cette faute. Tout juste peut-on comprendre qu’il s’agissait d’une "tentation de la chair", mais si abominable que Charles ne pouvait se confesser et donc être absous. La vie de saint Gilles montre ce saint qui vient à son secours (à moins que ce ne soit au secours de Charles Martel auquel on attribue la même histoire) : après s’être entretenu avec lui de ses problèmes de conscience, il célèbre la messe, et un ange descend vers lui avec un parchemin sur lequel le péché est nommé et où il est dit qu’il sera pardonné s’il n’y retombe pas. Il faut attendre la Karlamagnus Saga pour que l’on apprenne qu’en fait Charlemagne aurait eu une relation incestueuse avec sa sœur Gile, d’où Roland serait né. Mais une autre tradition parle de nécrophilie : l’impératrice aurait, au moment de mourir, gardé en sa bouche une pierre qui lui garantissait l’ardent amour de son mari. Aussi bien celui-ci aurait-il été amené à embaumer son corps et à continuer à l’honorer ...

Quoiqu’il en soit, faut-il ne voir dans cette propension à la faute qu’une humanisation du personnage, une relativisation de ses immenses vertus (que d’aucuns ont considéré comme opportune d’un point de vue politique) ? Il semble bien plutôt que ces défauts participent de la complexité d’une figure mythique qui dépasse sa dimension chrétienne et la simple opposition Bien/Mal. Sa passion de chair et de la bonne chère, déjà présente chez Eginhard, lui confère une dimension dionysienne. Et, par l’inceste rituel, il rejoint le monde des dieux de la mythologie universelle.

Comme le souligne Dominique Boutet, Charlemagne et Arthur (qui partage avec lui bien des traits : naissance prodigieuse, enfance difficile, exploits fabuleux, inceste ...) sont plus que de "simples personnages" ; ils constituent "des points de cristallisation des angoisses, des certitudes, des recherches de toute une société qui s’interroge sur son sens et sur sa destinée."

Charlemagne s’affirme avant tout comme un roi-guerrier qui, légendairement comme historiquement, ne cesse d’arpenter l’Europe avec son armée. C’est ainsi que nous le présente, dès l’ouverture, La Chanson de Roland : " Le roi Charles, notre empereur, le Grand, sept ans tous pleins est resté dans l’Espagne : jusqu’à la mer il a conquis la terre hautaine. Plus un château qui devant lui résiste, plus une muraille à forcer, plus une cité ..."

C’est pour la foi qu’il combat, pour établir vérité et justice. Il n’est pas sans intérêt de constater que, parmi ses ennemis, tout "sarrasins" qu’ils soient, il en est dont le nom se souvient de façon évidente des cultes qui ont précédé le christianisme sur le sol gaulois : Balan et Baligant semblent faire référence au dieu Belen, tandis que Marsile évoque inévitablement Mars. Et les dieux que ces Infidèles adorent ne sont que très accessoirement musulmans, puisqu’on y trouve, aux côtés de Mahomet, Apollin et Tervagan. Ce qui est certain, c’est que l’ennemi représente avant tout, comme le relève Julien VINOT dans le n° 206 du Bulletin de la SMF, la noirceur, la laideur, l’animalité, la mort : " La gent maudite, qui est plus noire que l’encre et qui n’a de blanc que les dents. " (Chanson de Roland CXLIV). Dès lors Charlemagne incarne la civilisation, et le bien. Et, dans cette vision manichéiste, ce pourrait bien être lui qui est représenté sur les façades des églises poitevines et charentaises : le chevalier à l’anguipède.

Guerrier conquérant, Charlemagne s’affirme aussi comme le champion de Dieu, qui est gratifié de rêves prémonitoires et qui converse avec les anges : " Dieu lui a envoyé saint Gabriel ; il lui commande de garder l’empereur. L’ange se tient toute la nuit à son chevet. Par une vision, il lui annonce ..." (Chanson de Roland CLXXXV). Saint Jacques lui-même lui apparaît pour lui confier la mission de délivrer son tombeau qui est tombé aux mains des Infidèles : il lui montre la Voie Lactée, le chemin des âmes, qu’il faut suivre pour gagner Compostelle, Campo Stellae, le "champ des étoiles". Une façon évidemment d’annoncer les Croisades et d’inaugurer le Chemin de Compostelle. Une façon aussi d’imposer Charlemagne comme un roi-prêtre, ce que confirme de multiples références bibliques : dans le Pseudo-Turpin, les murs de Pampelune s’écroulent, comme celles de Jéricho, au son des trompettes. Dans La Chanson de Roland (CLXXIX-CLXXX), tel Josué, il suspend le cours du soleil : " Quand l’empereur voit décliner la vêprée, il descend de cheval sur l’herbe verte, dans un pré ; il se prosterne contre terre et prie le Seigneur Dieu de faire que pour lui le soleil s’arrête, que la nuit tarde et que le jour dure. Alors vient à lui un ange, celui qui a coutume de lui parler. Rapide, il lui donne ce commandement : "Charles, chevauche ; la clarté ne te manque pas ..."

Pour Charlemagne, Dieu fit un grand miracle, car le soleil s’arrête, immobile. Les païens fuient, les Francs leur donnent fortement la chasse ..." Et il finit par s’identifier carrément au Christ : dans Le Pèlerinage de Charlemagne à Constantinople et à Jérusalem, il entre dans une église de Jérusalem, accompagné de ses douze pairs, et il y trouve douze sièges disposés autour d’un treizième, sur lesquels ils s’asseyent le plus naturellement du monde, sans savoir que c’est précisément là que Jésus et ses apôtres chantèrent la messe.
Mais, prêtre et guerrier, Charlemagne reste le Père Fondateur et avant tout "l’Empereur". Supplantant dans l’organisation tripartite de la Société, telle qu’elle a été définie par Dumézil, les producteurs de richesse, les saints personnages et les grands héros, il incarne la fonction suprême, celle qui participe de toutes les autres et les justifie. Aux côtés de, et disons-le en opposition à Arthur, c’est en France Charlemagne qui incarne le mieux un tel personnage. Et sa somptueuse barbe fleurie, la longue barbe blanche qu’il a coutume d’étaler sur sa poitrine lorsque les circonstances sont graves, symbolise cette souveraineté ; elle est privilège royal, lourd de symbolisme, au même titre que l’abondance de la chevelure l’était pour les Mérovingiens.

La tradition veut que son tombeau ait été découvert dans une crypte vers l’an 1000, à l’initiative d’Othon III, et qu’on le trouva, assis sur son trône, un voile sur le visage, une croix d’or au cou, la couronne sur la tête, et le sceptre entre ses mains, dont les ongles avaient percé les gants. Son pouvoir échappe au temps, comme il avait défié l’espace. Comme le dit Joseph Bédier, Charlemagne est "condamné, par la définition même de son personnage, à une sorte d’immutabilité majestueuse".

Même dans les récits où Charlemagne se fourvoie et n’agit pas en roi respectueux de ses responsabilités, son pouvoir en tant que tel n’est jamais remis en question, et le conflit se règle dans le cadre de la souveraineté. Comme le note Robert Morrissey : " Ce qui se dessine est un système certes conflictuel, mais qui a aussi son efficacité, c’est-à-dire qu’il fonctionne selon des normes épiques et permet de résoudre les dissensions qui semblent de prime abord insurmontables. Même s’il est durement mis à l’épreuve, le principe de la souveraineté se maintient en la personne de Charlemagne, et s’il faut se définir parfois contre le grand monarque, on ne cesse pas pour autant de se définir par rapport à lui. "

Louis XVI et Nicolas II

Lire ici Louis XVI et Nicolas II

D’autres lectures :

Le mythe de Jeanne d’Arc

Le roi Charles IX, lors de la décision du massacre : "Tuez-les tous et qu’il n’en reste pas un seul pour me le reprocher."

Des classes sociales, des rois et des dieux

Même les Pharaons n’ont pas donné naissance à la société égyptienne, à son artisanat, à son art, à ses villes

Le mythe du bon président

La présidence de la république au suffrage "universel", une belle caricature de démocratie au service des classes dirigeantes !

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Messages

  • Sur Jehanne d’Arc et Charles VII, un historien affirme que c’était un roi très croyant, s’appuyant sur ces dires :

    « Jehanne dit à Charles : « Sire, me promettez-vous de me donner ce que je vous demanderai ? » Le Roi hésite, puis consent. « Sire, donnez-moi votre royaume ». Le Roi, stupéfait, hésite de nouveau ; mais, tenu par sa promesse et subjugué par l’ascendant surnaturel de la jeune fille : « Jehanne, lui répondit-il, je vous donne mon royaume ». Après quoi, voyant celui-ci tout interdit et embarrassé de ce qu’il avait fait : « Voici le plus pauvre chevalier de France : il n’a plus rien ». Cela ne suffit pas : la Pucelle exige qu’un acte notarié en soit solennellement dressé et signé par les quatre secrétaires du Roi.« Notaire, écrivez dit la pucelle inspirée : le 21 juin de l’an de Jésus christ 1429, à 4 heures du soir, Charles VII donne son royaume à Jeanne. Ecrivez encore : Jeanne donne à son tour la France à Jésus-Christ. -Nos Seigneurs dit-elle d’une voix forte, à présent, c’est Jésus-Christ qui parle : « moi, Seigneur éternel je la donne au Roi Charles ». Que signifie cet événement capital ? Que ce Dauphin que l’enseignement républicain nous présente comme un indécis et un demeuré, un indécis, voire le digne fils d’un fou, mais que ses contemporains appellent le « bien-servi » (ce qui signifie qu’il savait juger les hommes), montre en cette occasion une foi extraordinaire en la Sainte Providence. Toute sa vie est d’ailleurs un exemple remarquable de Roi très chrétien.
     »

    Charles VII entièrement « roi très chrétien » ? Pensons à la manière dont il a abandonné Jeanne d’Arc ; et ses favorites…quand même !
    10 septembre 1419 : le futur Charles VII de Jeanne d’Arc fait traîtreusement assassiner Jean sans Peur.

    Le jeune dauphin est déjà là, qui l’attend. La suite des événements est rapportée par Jean Séguinat, secrétaire du duc de Bourgogne : "Mondit seigneur de Bourgogne aperçut le dauphin qui était près de la porte, devers la ville, sur ledit pont, à l’endroit d’un petit retrait fait de baies ; mondit seigneur alla à lui, ôta son amusse (chapeau) qui était de velours noir et s’agenouilla en lui disant : Monseigneur, après Dieu, je ne dois obéir qu’au roi et à vous ; je viens vous offrir ma personne, mes biens et toutes les forces de mes alliés et bienveillants, si on a fait quelque rapport à mon désavantage, je vous prie de n’en rien croire, dis-je bien, Messieurs. Vous dites si bien, répondit le dauphin, qu’on ne peut mieux ; levez-vous, beau cousin, et vous couvrez, en le tenant par la main." C’est alors que Jean sans Peur a un geste malheureux, celui attendu par l’adversaire pour lui tomber dessus : tout en se relevant, il pose la main sur l’épée pour la remettre en place. Aussitôt, le seigneur de Loré l’apostrophe : "Mettez-vous la main à vostre épée en la présence de Monseigneur le dauphin ?" Sans attendre la réponse, messire Tanguy du Châtel abat sur Jean sans Peur une énorme hache en lui disant : "Monsieur de Bourgogne, entrez là-dedans."
    Les gens du dauphin se mettent à crier "Tuez, tuez !" en se précipitant sur le duc. Certains de ses vassaux tentent bien de le protéger, mais inutilement. C’est la curée. Un homme s’agenouille auprès de Jean sans Peur pour lui donner le coup de grâce en lui plongeant son épée au travers du corps. Du côté des Armagnacs, c’est du délire. Les assassins se précipitent sur le cadavre pour arracher des morceaux de sa robe en guise de trophée. Les seigneurs accompagnant le duc de Bourgogne ne peuvent rien faire. Douze ans après son assassinat, le duc d’Orléans est enfin vengé. Ils font mettre le corps du duc dans une bière réservée aux pauvres et la font porter à l’église par les individus les plus paillards qu’ils peuvent trouver. Depardieu, qui passe par là, est recruté. Pour justifier leur geste, les Armagnacs prétendent qu’ils ont craint pour la vie du dauphin quand Jean sans Peur a mis la main à l’épée. Le duc s’est fait jouer comme un enfant.
    Ce meurtre ne bénéficie ni au camp des Armagnacs ni à la France. C’est même une idiotie diplomatique, car non seulement le futur Charles VII s’est complètement déconsidéré en manquant à sa parole, mais le nouveau duc de Bourgogne, fils du précédent, bascule définitivement dans le camp anglais. Il offre la couronne de France à Henri V d’Angleterre. D’où une prolongation de la guerre dite de Cent Ans, de plusieurs décennies. Charles VII, et après lui son fils Louis XI, finiront par arracher la France aux Anglais, mais à quel prix.

  • Le mythe du bon roi au Moyen Age seulement ?!!!

    C’est un mythe qui a la vie dure… Maintenant, on demande au « bon peuple » d’élire lui-même le roi !!

  • Un exemple de mensonge des livres d’Histoire : le roi d’Angleterre qui a gouverné la France n’y est jamais mentionné. Pourtant, il est même mort dans le château de Vincennes ! En effet, Henry V est mort le 3 août 1422 en France en tant que roi de France et d’Angleterre. Le roi de France précédent, Charles VI, avait consenti par le traité de Troyes en 1420 de marier Henry V avec sa fille Catherine (âgée d’un an !!!) et de choisir Henry V comme héritier du trône. Cela dit, il était déjà un roi « français » de l’Angleterre, imposé par des seigneurs normands et angevins !!! C’est la mort d’Henry V, en même temps que celle de Charles VI déclaré fou par les seigneurs français, qui a évité qu’un roi d’Angleterre devienne le premier roi anglais de France ! Charles VII s’est alors fait couronner roi de France… à Reims… Mais on l’appelait encore ironiquement « le roi de Bourges ». C’est dire que son autorité avait d’étroites limites et sa royauté sur la France était encore loin d’être acquise et n’allait devoir son succès qu’aux difficultés des rois d’Angleterre à conquérir la France.

  • En général, l’Histoire académique, universitaire et scolaire comme grand public appelle « bon roi » de France, celui qui a agrandit et unifié le territoire, fut-ce au prix de grands massacres !!! Ils comptent pour rien le fait qu’ils traitaient bien ou mal la population et c’est significatif.

    Par exemple, Louis XIV est un grand roi et même un bon roi alors que la population de France n’a jamais autant souffert et n’est jamais autant morte, de faim, de froid et de massacres. Louis XI, qui aimait enfermer ses ennemis dans des toutes petites cages en fer dans ses caves, serait lui aussi un « bon roi » ! Et ne parlons pas de Charlemagne, ce très grand massacreur des peuples, sous prétexte de construction d’un empire chrétien d’Europe succédant à l’empire romain catholique.

    Que les guerres de Charlemagne soient une vraie boucherie, l’Histoire se garde bien d’en dire le premier mot ! Massacres en Italie en 774, massacres en Bavière en 778, puis massacres en Espagne, massacres des Slaves en 789, massacres des Avars du Danube en 796, et les trente-deux ans de massacres des Saxons d’Allemagne dans laquelle une seule expédition a fait périr 4500 hommes, femmes et enfants…

    Le pape, que Charlemagne a aidé militairement contre les Lombards, a remis, lors d’une cérémonie organisée au Vatican, l’ancienne couronne des rois de Rome sur la tête de l’empereur dans la nuit de Noël 800. Et pourtant Charles était, paraît-il, furieux car le pape avait ainsi démontré que c’est lui qui faisait les empereurs !!!

    Ce n’était pas l’assassin de masse le plus lié au pape. N’oublions pas, par exemple, Pépin qui avait déjà aidé le pape à conquérir ce qui allait devenir les « Etats pontificaux » en battant les Lombards et s’était fait sacrer roi de France par le pape en 754 à Saint-Denis.

    Et ne parlons pas de ce « grand empereur » : Napoléon, l’un des plus grands criminels de l’histoire de l’Europe que les manuels d’Histoire encensent tout en glorifiant les mérites pacifiques de l’Europe actuelle !!!!

  • Parfois, le nom du roi a changé en cours de règne : Louis le bègue est devenu Louis de Juste (Louis XIII).

    Hugues Capet, nom qui a donné la dynastie des capétiens, n’a reçu ce nom qu’après sa mort et du fait de… sa cape !!!

    Vous voulez connaître quelques surnoms des rois :

    Carolingiens

    Pépin de Landen (l’Ancien)

    Begga

    Pépin d’Héristal (le Jeune)

    Charles Martel

    Pépin (Le Bref)

    Carloman

    Charlemagne

    Louis (Le Pieux)

    Lothaire 1

    Pépin (Le Germanique)

    Charles (Le Gros)

    Eudes

    Charles II (Le Chauve)

    Charles (d’Aquitaine)

    Louis II (Le bègue)

    Louis III

    Charles III (Le Simple)

    Robert 1er

    Raoul (De Bourgogne)

    Louis IV (d’Outre-mer)

    Charles1 (duc de Basse Lorraine)

    Lothaire

    Louis V (Le Fainéant)

    Hugues (Capet)

    Robert II (Le Pieux)

    Henri 1

    Philippe 1

    Louis VI (Le Gros)

    Louis VII (Le Jeune)

    Philippe II (Auguste)

    Louis VIII (Le Lion)

    Louis IX (St Louis)

    Philippe III (Le Hardi)

    Philippe IV (Le Bel)

    Louis X (Le Hutin)

    Jean 1 (Le Posthume)

    Philippe V (Le Long)

    Charles IV (Le Bel)

    Valois

    Philippe VI (Le Catholique)

    Jean II (Le Bon)

    Charles V (Le Sage)

    Charles VI (Le Fol)

    Charles VII (Le Victorieux)

    Louis XI (Le Prudent)

    Charles VIII (L’Affable)

    Louis XII (Le Père du Peuple)

    François 1er ( le restaurateur des lettres)

    Henri IV (Le Grand)

    Louis XIII (Le Juste)

    Louis XIV (Le roi Soleil)

    Louis XV (Le Bien Aimé)

    Louis XVI (Le restaurateur de la liberté)

    Louis XVIII (Le Désiré)

    Charles X

    Louis Philippe ( Le roi Bourgeois)

  • Le fol, le gros , le fainéant, le simple, l’affable et... le père du peuple !!!

  • A ceux qui sont fiers de Clovis et le prennent comme fondateur de la France…

    Clovis un sale roi pas du tout franc... du collier !

    L’expression « à tue-tête » provient du jour où Clovis tua un Franc en lui brisant la tête !!!

    Une des grandes spécialités de ces rois étaient d’envoyer des compagnies militaires d’écorcheurs dans les campagnes piller, violer, écorcher hommes, femmes et enfants pour se payer ainsi faute que le roi les paie !!!

  • Frédéric II, roi de Prusse, dans son « Testament politique de 1768 » qui sont des conseils à celui qui se destine à lui succéder :

    « La plus grande erreur dans laquelle on puisse être, est de croire que des Rois ou des ministres s’intéressent à notre sort. Ces gens-là n’aiment qu’eux-mêmes ; leur intérêt est leur dieu. Leur style devient insinuant et flatteur à proportion qu’ils ont besoin de vous. Ils vous jugeront avec une fausseté infâme que vos intérêts leur sont aussi chers que les leurs ; mais ne croyez pas et bouchez vos oreilles aux chants de ces sirènes. »

  • En France, les gens ne savent même plus ce que c’étaient de dépendre des rois, au point que certains s’imaginent que c’était mieux que la république bourgeoise. Donnons un exemplaire de ce qu’étaient ces rois, citations de Jean d’Aillon dans « La ville de la peur » :

    « Le roi de France Charles VI était fou depuis trente ans. Trente ans de malheurs pour le royaume des lys. Au début, son frère Louis d’Orléans et ses oncles Louis d’Anjou et Philippe de Bourgogne avaient gouverné le royaume durant ses crises de démence. Mais l’ambitieux Jean sans Peur, le fils du duc de Bourgogne, s’était heurté à Louis d’Orléans dont on disait qu’il était l’amant de la reine, Isabeau de Bavière. Pour assurer son pouvoir, Jean sans Peur avait fait assassiner Louis d’Orléans en 1407. Après ce meurtre, le duc de Bourgogne s’était emparé du pouvoir d’autant plus facilement que, dans ses accès de lucidité, Charles VI l’approuvait.

    Le duc de Berry et le fils du duc d’Orléans, Charles, qui avait épousé la fille du comte d’Armagnac, avaient alors constitué une ligue contre Jean sans Peur. le dauphin les avait rejoints, on nomma ce parti les Armagnacs car Bernad d’Armagnac, seigneur féodal violent et brutal, s’était imposé comme chef. Dès lors, deux factions s’affrontèrent dans le royaume de France : les Bourguignons contre les Armagnacs, ces derniers réclamant vengeance pour la mort de Louis d’Orléans.

    A Paris, avec la complicité de la confrérie bouchère menée par Simon le Coutelier, dit Caboche, Jean sans Peur avait laissé massacrer les Armagnacs en 1413…

    En 1418, à la suite d’une félonie, le capitaine bourguignon L’Isle-Adam avait pénétré dans la capitale avec ses troupes. De nouveau, les bouchers parisiens avaient massacré les Armagnacs, dont Bernard d’Armagnac… »

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