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Chaos déterministe et économie

jeudi 27 août 2015, par Robert Paris

Le chaos déterministe est un apparent désordre mais obéissant cependant à des lois (donc déterminé).

Qu’est-ce que la théorie du chaos déterministe, le texte

Qu’est-ce que la théorie du chaos déterministe, le film


"Cela signifie qu’au fond ce chaos n’est d’aucune façon un chaos, que, d’une certaine manière, il est soumis à une régulation automatique et inconsciente."

Léon Trotsky

dans "Le marxisme et notre époque"

Qu’est-ce que le chaos déterministe ?

PREFACE

de Pierre Bergé et Yves Pomeau

in Le Chaos, "pour la science", janvier 1995

« Les éléments, le feu, l’air et la terre et l’eau,
Enfoncés, entassés, ne faisaient qu’un monceau,
Une contusion, une masse sans forme,
Un désordre, un chaos, une cohue énorme. »

Jean Racine, Les plaideurs.

Les scientifiques ont repris à leur compte le mot "chaos", autrefois employé par les poètes et dans les mythologies. Aussi le lecteur est il en droit de se poser quelques questions : Qu’est-ce que le chaos ? Où trouve-t-on le chaos ? Comment le chaos apparaît-il ?

En sciences, le chaos est l’art de former du complexe à partir du simple. Former du complexe à partir du complexe ne pose aucun problème : ainsi une particule en suspension dans l’eau est soumise à des millions de chocs de la part des particules qui l’entourent et le mouvement qui en résulte, le mouvement brownien, est compliqué ; cette complexité est inhérente au système.

Dans le chaos, une cause simple, ne faisant intervenir que trois variables, entraîne des effets complexes. Prenons un pendule. C’est un système à deux variables (la position et la vitesse angulaires), et son comportement est régulier : il part de la gauche passe au point le plus bas, remonte à droite, ralentit, repart vers la gauche, et recommence sans cesse. Quand on lui ajoute une troisième variable, par exemple en soulevant périodiquement son extrémité supérieure, alors le système peut devenir chaotique. Aucune des trois variables en jeu n’est aléatoire, et pourtant, on ne peut plus prévoir le mouvement de ce système, qui ne fait jamais deux fois la même chose. Le chaos est donc un phénomène réel que n’importe qui peut expérimenter chez lui. Il suffit de coupler deux systèmes qui, pris indépendamment, sont extrêmement simples. Le chaos n’est pas une cohue énorme ; son désordre n’est qu’apparent. Un système chaotique est imprévisible, mais il est parfaitement décrit par des équations simples et déterministes. Le lien entre ces deux notions paradoxales, déterminisme et imprévisibilité, est la propriété de sensibilité aux conditions initiales : deux conditions initiales semblables peuvent conduire à des états très différents du système. Cette propriété est la principale caractéristique des systèmes chaotiques.

C’est le mathématicien français Henri Poincaré qui, dès la fin du siècle dernier, a mis en évidence l’imprévisibilité d’un système de trois corps en interaction. Il a appliqué cette idée à la question de la stabilité du Système solaire, question qui préoccupe encore des chercheurs comme Michel Hénon, de l’Observatoire de Nice, ou Jacques Laskar, au Bureau des Longitudes, à Paris.

L’observation des inversions du champ magnétique terrestre pourrait illustrer l’existence de comportements complexes dans un système simple. Le champ géomagnétique est un effet de dynamo : le noyau terrestre est constitué d’un liquide conducteur qui tourne sur lui même et produit un champ magnétique. Ce système s’auto alimente, car le champ magnétique induit un courant dans le liquide conducteur, qui crée lui même un champ magnétique. Un tel système, modélisé par le Japonais Rikitaké dans les années 1950, peut engendrer une série temporelle chaotique.

Quelques années après Rikitaké, le météorologue Edward Lorenz introduisait le premier modèle d’atmosphère sensible aux conditions initiales ; pourtant son système ne comportait que trois variables. Les modèles d’atmosphère actuels comportent un très grand nombre de variables, mais ils présentent aussi une grande sensibilité aux conditions initiales : dix hypothèses compatibles avec les relevés météorologiques conduisent à dix prévisions, parfois complètement différentes, du temps qu’il fera la semaine suivante. Les météorologues tentent de définir un horizon (une échéance) de prévisibilité. Actuellement, I’échéance de fiabilité des prédictions météorologiques est d’une semaine.

Cette approche serait intéressante en économie. Ainsi l’augmentation d’un impôt peut avoir un effet positif à court terme sur les finances de l’État, mais négatif à long terme s’il appauvrit les ménages. Peut on définir un horizon de prévisibilité pour un tel système ? Les concepts introduits par les théories mathématiques du chaos permettront sans doute une approche plus objective dans des domaines aussi difficiles que l’économie.

La théorie du chaos pourrait aussi avoir une implication en sociologie. Un changement de société s’opère lorsque le nombre de personnes qui interagissent dépasse un certain seuil. Dans une civilisation rurale, chaque individu possède un petit nombre d’interlocuteurs ; la situation est stable. En revanche, dans les civilisations urbaines actuelles, les rapports entre les individus sont multiples. Selon ce schéma, la révolution industrielle serait plutôt due au développement de la civilisation urbaine qu’au progrès technologique.

Enfin le concept de chaos déterministe peut s’appliquer à la biologie. Les battements cardiaques d’un individu au repos présentent des irrégularités. On sait aujourd’hui que ces irrégularités ne sont pas pathologiques,alors qu’un battement régulier l’est. Le comportement chaotique du cœur procure une meilleure adaptabilité. Ainsi lorsque vous sursautez sous l’effet de la surprise, votre cœur accélère, puis retourne vers un battement plus lent : il est capable d’explorer un large domaine de fréquences sans dépasser ses limites de fonctionnement. Toutefois les systèmes biologiques sont complexes et les lois qui les régissent ne sont pas bien connues.

Même lorsque l’on ne connaît pas les lois de la dynamique, il est possible de distinguer un comportement chaotique d’un comportement purement aléatoire. Il faut pour cela tracer un diagramme dans un espace multidimensionnel, appelé espace des phases ou espace des états ; chaque état du système est représenté dans cet espace par un point dont les coordonnées sont égales aux valeurs numériques des variables du système. Dans cette représentation, un mouvement régulier correspond à un diagramme simple, un attracteur. Si le mouvement est aléatoire, les points représentatifs du système remplissent l’espace des phases au hasard : aucune structure n’apparaît. Quand le mouvement est chaotique, les points représentatifs paraissent à première vue aléatoires. Néanmoins, quand on observe le système suffisamment longtemps,on constate que les points dessinent une forme particulière, qui présente une structure feuilletée.

A cause de cette géométrie particulière, fractale, ces attracteurs sont qualifiés d’étranges. Ils sont la signature du chaos.

Les physiciens Peter Grassberger et Itamar Procaccia ont inventé une méthode théorique pour quantifier l’ordre du chaos. Leur méthode permet de déterminer la dimension de l’attracteur, c’est à dire sa capacité à remplir une région donnée de l’espace des phases. Le groupe de Saclay a été le premier à l’appliquer à des données réelles.

On commence par construire un espace des phases à partir d’un petit nombre de variables : si la dimension de l’espace de construction est inférieure à celle de l’attracteur, on obtient une projection de la trajectoire, qui cache encore sa structure réelle. On augmente alors la dimension de l’espace de construction (on ajoute des variables dans notre description).

Si la dimension calculée du diagramme finit par saturer à une faible valeur, c’est la signature d’un chaos à petit nombre de variables ; la valeur de saturation est la dimension fractale de l’attracteur. Si au contraire cette dimension croît avec la dimension de l’espace de construction, c’est que le système est aléatoire : le nuage de points représentatifs des états successifs du système ne s’organise pas.

On peut aussi identifier le chaos à sa manière d’entrer en scène. On connaît trois grands scénarios de transition vers le chaos : le doublement de période, l’intermittence, et la quasi périodicité. Le phénomène de doublement de période a été découvert en même temps par un jeune chercheur américain de Los Alamos, Mitchell Feigenbaum, et par des chercheurs français, Pierre Coullet, actuellement à l’lnstitut non linéaire de Nice, et Charles Tresser, qui travaille chez IBM.

A mesure que la contrainte augmente, la période d’un oscillateur forcé est multipliée par deux, puis par quatre, par huit, etc. ; ces doublements de période sont de plus en plus rapprochés ; lorsque la période est infinie, le système est chaotique. La turbulence dans les fluides peut apparaître suivant ce scénario.

Un autre scénario de transition vers le chaos est l’intermittence : un mouvement périodique stable est entrecoupé par des bouffées de bruit. Lorsqu’on augmente le paramètre de contrôle, les bouffées de turbulence deviennent de plus en plus fréquentes, et finalement, la turbulence domine. Ce scénario a été décrit théoriquement par l’un de nous (Yves Pomeau) et vérifié expérimentalement par le groupe de Saclay.

Le troisième scénario, la quasipériodicité, intervient quand un deuxième oscillateur perturbe un système initialement périodique. Si le rapport des périodes des deux oscillateurs en présence n’est pas rationnel, alors le système est dit quasipériodique. L’influence des deux oscillateurs l’un sur l’autre conduit à un dérèglement de leur mouvement, comme dans le cas du pendule stimulé verticalement, évoqué plus haut. Ce scénario un peu compliqué est relié à la théorie des nombres, notamment aux travaux de Jean Christophe Yoccoz, lauréat de la Médaille Fields en 1994, pour ses travaux sur les systèmes dynamiques. La contribution des mathématiciens français dans le domaine du chaos n’est donc pas seulement historique !

Mais nous en avons déjà trop dit : laissons le lecteur découvrir le chaos.


Pierre Bergé est physicien au Commissariat à l’énergie atomique, à Saclay, et Yves Pomeau est directeur de recherche au CNRS, dans les laboratoires de L’école normale supérieure.

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Chaos déterministe et économie

Complexité, Chaos et Catastrophes en Dynamique Economique

Introduction :

Les dynamiques complexes, selon la définition proposée par Day (1994, Chap. 1), se caractérisent par des comportements dynamiques n’étant ni périodiques, ni équilibrés (contrairement aux états stationnaires et aux sentiers de croissance équilibrés e.g.), et ne convergeant pas vers un modèle périodique ou équilibré. Ces dynamiques particulières (Day, 1994, Chap. 4) incluent des processus de type :

Fluctuations non-périodiques

Cycles imbriqués

Revirements de régime ou changements structurels

Les dynamiques complexes sont fondamentalement non-linéaires : par exemple, les fluctuations émergeant de système linéaires ne peuvent qu’être périodiques (i.e., régulièrement cycliques, des situations distinctes se répétant à intervalles de temps réguliers). Mais les systèmes non-linéaires ne sont pas tous complexes (certaines fluctuations émergeant de systèmes non-linéaires peuvent aussi bien être périodiques). Ainsi, la non-linéarité est une condition nécessaire, mais en aucun cas suffisante pour l’occurrence de dynamiques complexes.

Chaos et Economie

Un des principaux exemples de comportement dynamique complexe est la présence de fluctuations aléatoires non-périodiques n’étant pas stochastiques, mais provenant plutôt d’un système dynamique déterministe : ce que l’on appelle le Chaos (appelé aussi parfois dynamiques erratiques ou dynamiques exotiques).

La théorie du Chaos est un domaine en croissance rapide. On peut ici citer quelques ouvrages destinés aux économistes, mais ne manquant pas de rigueur mathématique : H.-W. Lorenz (1993), Medio (1992), Day (1994). Pour une introduction, le lecteur pourra aussi se référer à quelques revues de littérature pour économistes tels Kelsey (1988), Baumol et Benhabib (1989) ; Boldrin et Woodford (1990) et Grandmont (1986) sont plus techniques, par ordre croissant de difficulté.

Pour introduire le sujet, nous retiendrons la définition suivante : le Chaos est un comportement apparemment stochastique généré par un système dynamique déterministe. Par « apparemment stochastique » on entend un sentier aléatoire qui au premier regard ne peut être distingué du sentier généré par une variable stochastique. A l’instar de Brock et al. (1991), prenons l’exemple d’un ordinateur pseudo-générateur de nombres aléatoires. L’algorithme utilisé par l’ordinateur est purement déterministe, mais il produit une série de nombres qui semblent aléatoires, pouvant duper n’importe quel statisticien au sens où cette série passera tous les tests de « stochasticité ». A propos, les nombres aléatoires générés de cette manière sont communément employés en analyse statistique.

Une seconde caractéristique souvent considérée comme typique du comportement chaotique de systèmes déterministes est l’impossibilité de prédire les valeurs futures des variables concernées. Cela peut au premier abord ressembler à une contradiction- si nous avons un système dynamique déterministe, même si nous ne pouvons le résoudre analytiquement, nous pouvons le simuler numériquement, et donc nous pouvons calculer la (les) valeur(s) de la (des) variables pour toute valeur future de t. C’est ici que nous introduisons une autre caractéristique importante du Chaos (certains auteur l’utilisent même pour définir le Chaos, cf e.g. Brock et al., 1991, p.9), à savoir la Dépendance Sensible aux Conditions Initiales (que nous appellerons DSCI dans la suite du texte).

La DSCI signifie que même de très petites différences dans les conditions initiales donneront naissance à des trajectoires très largement différentes dans le futur. Dans un système déterministe « normal », tous les sentiers démarrant très proches l’un de l’autre restent voisins dans le futur. Ainsi, une erreur de mesure suffisamment faible dans les conditions initiales n’affectera pas les prévisions déterministes. A contrario, dans les systèmes déterministes avec DSCI, une prédiction des valeurs futures des variables ne serait possible que si les conditions initiales pouvaient être mesurée avec une précision infinie, ce qui n’est malheureusement pas le cas dans beaucoup d’études.

Poincaré (1908, p.68) évoquait déjà cela il y a près d’un siècle :

« Si nous connaissions exactement les lois de la nature et la situation de l’univers au moment initial, nous pourrions prédire exactement la situation de ce même univers à un moment futur. Mais même si les lois de la nature n’avaient plus de secret pour nous, nous ne pourrions connaître la situation initiale qu’approximativement.[…] Il peut arriver que de petites différences dans les conditions initiales produisent de grandes différences dans les phénomènes finaux, une petite erreur au niveau des premières conduisant à une énorme erreur au niveaux des seconds. La prévision devient alors impossible… »

Les travaux de Poincaré étaient apparemment méconnus du mathématicien qui, selon la légende, prétendait dans l’ère avant-Chaos qu’étant donnés un méga-ordinateur et des fonds suffisants pour collecter des données, la météo pouvait être prédite avec exactitude et précision. Si les équations météorologiques sont chaotiques, au sens où elles présentent de la DSCI (et elles en présentent précisément), aucun super-ordinateur ne pourra jamais fournir la précision infinie nécessaire. C’est en fait lorsque le météorologiste E.N. Lorenz a trouvé de la DSCI dans un système à trois équations différentielles émergeant de la théorie de la turbulence des fluides, que l’étude mathématique du Chaos a vu le jour (Guckenheimer et Holmes, 1986, Chap. 2, Sect. 2.3).

Il n’existe pas à l’heure actuelle de définition mathématique du Chaos faisant consensus. Certains, comme nous l’avons vu, prennent la DSCI comme marque de fabrique du Chaos. D’autres prétendent que la dynamique chaotique dépend de l’existence d’un attracteur étrange (Guckenheimer et Holmes, 1986), que Mandelbrot (1983) appelle un attracteur fractal (sur ces distinctions qui ne sont pas que terminologiques cf. Rosser, 2000, Sect. 2.4. et Mirowski, 1990). En fait, un grand nombre de définitions co-existent (Rosser, 2000, Sect. 2.3.2.2). Le Chaos (au sens de comportement erratique présentant de la DSCI) peut déjà apparaître dans une simple équation aux différences de premier ordre (système en temps discret), alors que pour en trouver dans des équations différentielles, il est nécessaire d’avoir au minium un système 3 x 3.

Importance et détection du Chaos : dynamique stochastique ou Chaos ?

On trouve souvent dans la littérature les expressions « Chaos stochastique » et « Chaos déterministe », où le « Chaos déterministe » est simplement le Chaos alors que le « Chaos stochastique » est une dynamique stochastique standard, à savoir un comportement aléatoire provenant d’un système non-chaotique mais stochastique. Ces deux notions peuvent être caractérisées par leur dimension de corrélation (qui est une mesure de complexité : cf. Brock et al, 1991, pp.15-17). La dimension de corrélation est un nombre fini dans le cas du Chaos déterministe, alors qu’un processus stochastique indépendant et identiquement distribué (présentant une fonction de distribution non-dégénérée) a une dimension de corrélation qui tend vers l’infini. Donc en principe, la dimension de corrélation peut être utilisée pour distinguer de véritables processus stochastiques du Chaos déterministe (qui peut être de faible ou grande dimension). Du fait que la terminologie « Chaos stochastique vs Chaos déterministe » peut prêter à confusion lorsque l’on n’est pas dans le contexte d’une analyse de la dimension de corrélation, on parlera simplement de dynamiques stochastiques vs Chaos.

La théorie du Chaos a généré beaucoup d’engouement et d’importants résultats en physique et d’autres domaines. Peut-on dire de même en économie ? Les économiste sont bien connus pour s’inspirer grandement des sciences physiques (Mirowski, 1990, 1992) mais, en général, un théorie ayant du succès dans une discipline n’est pas automatiquement considérée comme sérieuse dans d’autres domaines. L’engouement existe bel et bien en économie, comme le montre le nombre important de papiers sur les dynamiques économiques chaotiques ( cf. collections Anderson et al. eds, 1988, Grandmont ed., 1988, Barnett et al. eds, 1989, 1996, Benhabib ed., 1992, Day et Chen eds., 1993, Creedy et Martin eds., 1994, Leydesdorff et Van den Besselaar eds, 1994) et plusieurs ouvrages (cf, e.g., Brock et al., 1991, Chiarella, 1990, Day, 1994, H.-W. Lorenz, 1993, Medio, 1992, Peters, 1991, 1994, Rosser, 2000). Ces travaux montrent tout d’abord que la théorie du Chaos en économie n’est pas qu’une mode passagère. Du point de vue théorique, ils mettent aussi en évidence que l’on peut construire des nouveaux modèles économiques plausibles dans lesquels un comportement chaotique est présent, ou revisiter d’anciens modèles, bien que parfois cette hypothèse semble quelque peu ad hoc (sur ce point cf. par exemple Sordi, 1993, et Nusse et Hommes, 1990).

Nous savons que des oscillations périodiques peuvent émerger dans des modèles non-linéaires standard, mais avant l’avènement de la théorie du Chaos, il était nécessaire d’invoquer un variable aléatoire exogène non-expliquée pour commenter l’apériodicité souvent observée des variables économiques réelles. Le Chaos, a contrario, nous donne une explication endogène de l’erraticité. Comme Goodwin (1991, p.245) le dit à propos,

« Poincaré a généralisé un point d’équilibre à une trajectoire d’équilibre ; un attracteur chaotique généralise la dynamique à une région d’équilibre bornée vers laquelle toutes les trajectoires tendent, ou à l’intérieur de laquelle toute les trajectoires restent ; la conception d’équilibre est plus ou moins perdue puisque tous les degrés de fluctuations apériodiques ou erratiques peuvent se produire dans cette région. Ceci est tout particulièrement pertinent en économie puisque nous avons désormais non pas un, mais deux types d’explications pour l’irrégularité diffuse des séries temporelles économiques, dont une explication endogène en addition aux conventionnels chocs exogènes ».

Venons-en maintenant à trois autres implications théoriques majeures du Chaos.

La première est que l’hypothèse d’anticipations rationnelles (l’HAR ci-après) est insoutenable face au Chaos (Chiarella, 1990, PP.124-25 ; Kelsey, 1988, pp. 682-3 ; Medio, 1992, pp. 17-8). L’HAR se voit souvent opposer l’argument suivant : il est pratiquement impossible que tous les agents économiques aient une information parfaite etc., comme requis par l’HAR, puisqu’ils doivent dépendrent d’autres procédés tels la rationalité limitée (Sargent, 1993). Cette critique traditionnelle est une critique externe, i.e. les hypothèses ne peuvent pas être obtenues en réalité, donc on doit rejeter l’HAR (mais si les hypothèses pouvaient être obtenues, l’HAR serait correcte). La critique venant de la théorie du Chaos est a contrario une critique interne, d’autant plus destructrice car elle montre que l’HAR n’est pas soutenable même lorsque les hypothèses sont réunies. En fait, si le vrai modèle est chaotique, les agents économiques- supposés bénéficier d’une information parfaite incluant la connaissance du modèle (à l’instar d’un physicien connaissant les « équations gouvernant un phénomène donné »)- ne peuvent raisonnablement pas atteindre la précision infinie pour éviter les effets dévastateurs de la DSCI. La prévision déterministe parfaite hors des états stationnaires (Grandmont, 1985, sect. 3) serait impossible en économie tout comme en physique lorsque le modèle est chaotique. La situation deviendrait pire si, en addition au Chaos, des éléments stochastiques étaient aussi présents. Même si les agents économiques connaissaient les processus stochastiques générant les chocs exogènes, la présence de DSCI sur la partie déterministe rendrait impossible pour eux le calcul de la distribution de probabilité objective des résultats. Ainsi, il serait impossible de vérifier les propriétés essentielles des anticipations rationnelles dans un contexte stochastique. Dans les deux cas (déterministe et stochastique), l’économiste théoricien devrait abandonner l’hypothèse d’anticipations rationnelles et se baser sur d’autres règles de formation des anticipations (Heiner, 1989, suggère d’ailleurs une forme d’anticipations adaptatives). Du point de vue théorique, les règles de formation des anticipations devraient être cohérentes avec le modèle chaotique sous-jacent, mais des règles générales de ce type n’ont pas encore été conçues (Medio, 1992, p.18).

La seconde implication du Chaos concerne l’usage des modèles économétriques dans la prévision (Baumol et Quandt, 1985). Les paramètres estimés de ces modèles sont accompagnés d’un intervalle de confiance – ce qui signifie que la « vraie » valeur peut se trouver n’importe où dans cet intervalle, chaque valeur étant associée à une certaine probabilité. Mais même si cet intervalle de confiance pouvait se rétrécir jusqu’à la quasi nullité (ce qui est en pratique impossible), nul besoin d’être économètre pour comprendre que- si le « vrai » modèle est chaotique- la présence de DSCI implique l’impossibilité de faire de la prévision, à l’exception peut-être du très court-terme (sur la prévisibilité de court-terme dans les modèles chaotiques cf. H.-W. Lorenz, 1993, Chap.6, Sect. 6.4.).

Une troisième implication du Chaos est l’irréversibilité du temps en théorie. Ceci peut être facilement expliqué en considérant une application unimodale. Comme le remarquent Barnett et Chen (1988, p. 203), l’existence d’un point d’inflexion sur l’application f rend f non inversible car l’inverse de f est une solution ensembliste. Alors que f est une fonction, l’inverse de f est une correspondance. Cela signifie que, alors que des équations « normales » peuvent être intégrées soit « forward » (en avant), soit « backward » (récursivement), seule l’intégration forward sera ici possible. Par ailleurs, l’irréversibilité du temps en pratique apparaît dans des systèmes dissipatifs normaux pouvant être en principe intégrés soit « forward » soit « backward » dans le temps, mais ne permettant pas une « prédiction » correcte du passé.

En Physique et dans les disciplines reliées, hormis les intérêts purement théoriques, d’importants résultats dans l’étude et l’explication des phénomènes réels ont été obtenus grâce à la théorie du Chaos. Ainsi, l’économiste appliqué se demande naturellement si les modèles chaotiques donnent de meilleures explications des phénomènes économiques réels que les modèles stochastiques non-linéaires non-chaotiques.

Soulignons que nous ne suggérons pas ici de comparer les modèles chaotiques (nécessairement non-linéaires) aux modèles linéaires stochastiques, mais aux modèles dynamiques non-linéaires qui sont non-chaotiques mais stochastiques. On dénombre aujourd’hui quelques modèles de ce genre : le lecteur pourra se référer à Gandolfo et Padoan, 1990, Gandolfo et al. 1996, Wymer, 1996, pour un tel modèle, spécifié comme un ensemble de 24 équations différentielles stochastiques non-linéaires, estimées en temps continu. Ce modèle s’avère posséder un état-stationnaire structurellement stable, et donner de bonnes explications et prévisions pour l’économie italienne.

Toutefois, la distinction entre un comportement apériodique endogène (provenant d’un modèle chaotique non-stochastique) et un comportement apériodique exogène (provenant d’un modèle non-chaotique à perturbations stochastiques exogènes) est insaisissable dans les travaux appliqués, puisque généralement parlant, tout dépend de la taille du modèle. Un petit modèle prend le résidu comme exogène, et il pourrait être injustifié de supposer que le résidu exogène n’a aucune influence sur les variables endogènes. Puisqu’un grand nombre de facteurs exogènes entrent en compte, il peut être raisonnable de faire l’hypothèse d’une influence stochastique (qui est bien évidemment la justification standard pour ajouter un terme d’erreur aléatoire dans les modèles économétriques). Lorsque le petit modèle est considéré comme faisant partie d’un modèle plus large, certaines des influences exogènes peuvent être considérées comme endogènes. Ceci a induit certains économistes à prétendre que la distinction est non seulement insaisissable, mais dénuée de sens : « le fait que les fluctuations soient générées de manière endogène ou exogène, stochastique ou déterministe, est une propriété du modèle, et non du monde réel. C’est seulement s’il existait un véritable modèle correspondant de manière beaucoup plus précise au monde réel qu’il serait utile de savoir si le cycle des affaires actuel est plutôt stochastique ou déterministe (Sims, 1994, p.1886). »

Ceci montre que le principal problème en économie du Chaos est un problème de détection empirique, à savoir si oui ou non les données économiques réelles corroborent la présence de Chaos distinctement du comportement dérivé d’un système stochastique non-linéaire non-chaotique. Divers tests ont été développés (les références de base sont Brock et al., 1991, et Pesaran et Potter eds, 1992), mais il faut souligner que cela ne suffit pas pour prouver la présence de non-linéarité dans les données. La non-linéarité est nécessaire, mais en aucun cas une condition suffisante pour le Chaos. Elle peut toutefois aider à montrer que les modèles stochastiques linéaires sont inappropriés : l’analyse permet de discriminer entre un comportement aléatoire non-linéaire stochastique et non-linéaire déterministe, ce qui est finalement le plus intéressant.

Des tests spécifiques pour discriminer entre systèmes chaotiques et systèmes stochastiques non-linéaires non-chaotiques, tels que la corrélation intégrale, existent bel et bien, mais leur efficience est mise en doute pour détecter des Chaos de faible dimension lorsqu’un bruit blanc stochastique est présent (Mirowski, 1990 ; Liu et al., 1992 ; Chen, 1993 ; Granger, 1994). Les données économiques réelles montrent habituellement de la non-linéarité, mais échouent généralement pour exhiber des Chaos de faible dimension (Day, 1994 ; Liu et al., 1992 ; Granger,1994) ; c’est aussi le cas même lorsqu’on a assez d’observations (un des problèmes de ces tests est qu’ils requièrent plusieurs milliers d’observations pour être fiables) pour tester le Chaos sur des taux de change quotidiens (DeGrauwe et al., 1993).

Ainsi, pour le moment, les observations empiriques semblent conduire à l’abandon des modèles stochastiques linéaires en faveur des modèles stochastiques non-linéaires non-chaotiques. Ainsi, d’ici à ce qu’une nouvelle preuve empirique convaincante soit apportée, il nous semble que – bien que les dynamiques chaotiques soient une importante et bienvenue addition à la boîte à outil des économistes s’intéressant à la dynamique- il est un peu tôt pour déclarer son incontestable prééminence en économie.

Théorie des Catastrophes

Les scientifiques, en addition à leur jargon spécialisé, prennent parfois des mots du langage courant et les utilisent dans une acception technique qui n’a rien à voir avec le sens ordinaire (ou seulement en partie). Lorsque le profane lit ces mots, la confusion est susceptible d’avoir lieu. Aucun profane, par exemple, ne serait confus par l’expression « orbite homoclinique » : il ne la comprendrait simplement pas. Mais il pourrait être dérouté par des mots tels Chaos ou Catastrophes s’il les interprète dans leur acception commune.

Ainsi, la théorie des Catastrophes ne s’intéresse pas nécessairement aux évènements catastrophiques – elle traite simplement des situations dans lesquelles une variable saute soudainement d’un état à l’autre. Dans ce sens, elle est étroitement reliée à la théorie des bifurcations, si bien qu’après sa naissance, que l’on doit à Thom (1972), une grande controverse pris place parmi les mathématiciens sur le fait que le label théorie soit oui ou non approprié.

Une des caractéristiques attrayante de la théorie des Catastrophes est que, bien que les mathématiques soient assez compliquées, de simples applications peuvent être faites sans recours aucun aux mathématiques et par des diagrammes relativement simples, comme le montre le modèle d’inflation de Woodcock et Davis (1978, pp. 117-119) dont le graphique suivant est inspiré, qui est une des premières applications de la théorie des Catastrophes à l’économie (la première dans l’absolu semble être un modèle de krach sur marché d’actions par Zeeman, 1974). Dans l’étude des processus inflationnistes, le taux d’inflation anticipé et le taux de chômage jouent deux rôles prépondérants. Le taux d’inflation actuel dépend directement du taux d’inflation anticipé, puisque l’anticipation d’une inflation plus élevée dans le futur conduit à un comportement qui accroît le taux d’inflation contemporain. Le taux de chômage connaît l’effet inverse, puisque un taux plus élevé de chômage se traduit par de moindres tensions salariales et ainsi moins d’inflation effective.

Un modèle de Catastrophe appliqué à l’Inflation (Woodcock et Davis)
Du point de vue de l’inflation, la pire situation est indubitablement celle où le taux d’inflation anticipé est très élevé, et le taux de chômage très bas (point a dans la figure). Plusieurs améliorations sont ainsi possibles :

1.en agissant sur les anticipations. Par exemple, le gouvernement peut adopter une politique agressive pour décourager la hausse des prix. Ceci fera dériver le système vers le point b, sans coût en termes de chômage additionnel.

2.En agissant et sur les anticipations et sur le taux de chômage il sera possible d’atteindre une plus grande réduction de l’inflation (chemin a-c-d), avec toutefois un prix en termes de chômage additionnel.
3.En agissant sur le taux de chômage seulement (chemin a-e). Ceci toutefois, produira une légère baisse du taux d’inflation, et l’économie tombera en stagflation. Pour aller de cette région à une situation où l’inflation est plus faible, il sera aussi nécessaire d’agir sur les anticipations inflationnistes et, de manière simultanée, de consentir à une légère augmentation du taux de chômage (chemin e-c-d).
4.Par une augmentation dramatique du taux de chômage. Ceci fera passer le système du point e au point critique f, où la discontinuité de la dynamique engendrera un saut de ce point vers g, avec une chute drastique du taux d’inflation.

Ce diagramme, avec la transition soudaine entre les points f et g, est un exemple des sept Catastrophes élémentaires de Thom, à savoir la Catastrophe de type Fronce (ou « Cusp »). La Catastrophe Fronce fut en effet la plus généralement utilisée dans les applications économiques ultérieures, notamment le modèle de Kaldor d’échanges cycliques revisité par Varian (1979).

La théorie des Catastrophes a connu un engouement en Sciences Economiques à la fin des années 1970, début des années 1980, après quoi l’intérêt et la recherche sur ce domaine ont décru. Une raison pour la disparition de la théorie des Catastrophes de la boîte à outils des économistes pourrait être que, dès que l’on dépasse les présentations populaires et que l’on s’intéresse de plus près aux mathématiques on remarque rapidement que la notion de potentiel, de laquelle la théorie des Catastrophes est née, est fondamentale en Physique mais n’a généralement pas de sens économique. Si un potentiel peut être défini (une condition plus faible peut être l’existence d’une fonction de Liapunov Stable), l’application de la théorie des Catastrophes peut-être non-valide. Une autre raison pourrait être que, une fois le système dynamique complet défini, la théorie des Catastrophes ne peut donner de meilleure description du comportement dynamique du système que d’autres outils mathématiques. Pour une évaluation de ces points, cf. Pol (1993), et pour les mathématiques des Catastrophes cf Saunders (1980), Poston et Stewart (1978) ; pour des revues de littérature des principales applications économiques, on retiendra surtout Gabisch et Lorenz (1989, chap 5., Sect. 5.2.2.), Rosser (2000) et Tu (1994, Chap.10, sect. 10.4.).

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