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Art et Sciences

vendredi 8 avril 2016, par Robert Paris

"Points à préciser" de Benjamin Péret

« La nature et l’art ont fait la nique à tous ceux qui se complaisent à subdiviser le domaine du savoir et du sentir en forteresses voisines, séparées et hostiles. »

Benoît B. Mandelbrot dans la préface d’ « Universalités et fractales » de Bernard Sapoval

« La science est un produit de la culture, au même titre que la musique. »

Ilya Prigogine, La fin des certitude

« Etudiez la science de l’art. Etudiez l’art de la science. Développez vos sens – apprenez à voir. Réalisez que tout vous connecte à tout le reste. »

Léonard de Vinci

« Le génie du Vinci est fait d’une intime pénétration de la science et de l’art. Le savant et l’artiste ne sont pas en lui deux étrangers qui vivent côte à côte et s’ignorent ; quoi qu’il fasse, ils sont présents tous deux et collaborent à son œuvre. Analyse et synthèse, art et science, sentiment et pensée, imitation et invention, quelle que soit l’antithèse, il la résout en en embrassant les deux termes. Où les uns disent : réalité, les autres répondent : idéal ; il ne connaît pas ces appauvrissements volontaires, comme l’enfant et Platon, il refuse de choisir et prend tout. Réaliste, il l’est à coup sûr. Nul plus que lui n’a observé ce qui est, nul n’a fixé sur les choses un œil plus clairvoyant. La peinture est un art d’imitation, il veut qu’elle aille jusqu’à produire l’illusion du réel. Mais en quoi vraiment consiste l’imitation ? à répéter les choses qu’on a sous les yeux ? La pauvre ambition ! Il s’agit « de se convertir en la nature, » à force d’étudier les procédés selon lesquels elle fait apparaître et construit les corps. Vivantes dans l’esprit, les observations du savant deviennent les habitudes de l’artiste. Le peintre peut alors projeter sur la toile les images qu’il lui plaît. Est-ce à dire qu’il va se perdre dans la fantaisie, dans les vaines fictions ? Non, car les formes qu’il imagine sont toujours composées d’éléments réels, combinés selon des lois nécessaires. Le peintre est plus que le disciple de la nature, son génie est la nature même qui continue son œuvre par l’esprit. »

L’esthétique et l’art de Léonard de Vinci, Gabriel Séailles

« L’art est-il digne d’être traité scientifiquement ? Sans doute il embellit notre existence et charme nos loisirs ; mais il semble étranger au but sérieux de la vie. Est-il autre chose qu’un délassement de l’esprit ? (…) On peut s’imaginer aussi que l’art fournit tout au plus matière à des réflexions philosophiques, mais qu’il est incapable par sa nature même d’être soumis aux procédés rigoureux de la science. En effet, c’est à l’imagination et à la sensibilité, dit-on, qu’il s’adresse, et non à la raison. Ce qui nous plaît dans l’art, c’est précisément le caractère de liberté qui se manifeste dans ses créations. Nous aimons à secouer un instant le joug des lois et des règles, à quitter le royaume ténébreux des idées abstraites pour habiter une région plus sereine où tout est libre, animé, plein de vie. L’imagination qui crée tous ces objets est plus libre et plus riche que la nature même, puisque non seulement elle dispose de toutes ses formes, mais se montre inépuisable dans les productions qui lui sont propres. Il semble donc que la science doive perdre sa peine à vouloir poursuivre de ses analyses et embrasser dans ses formules cette multitude infinie de représentations si diverses. (…) L’art est-il digne d’occuper la science ? Sans doute, si on ne le considère que comme un amusement, un ornement ou un simple moyen de jouissance, ce n’est pas l’art indépendant et libre, c’est l’art esclave. Mais ce que nous nous proposons d’étudier, c’est l’art libre dans son but et dans ses moyens. Qu’il soit employé pour une autre fin que celle qui lui est propre, il a cela de commun avec la science. Elle aussi est appelée à servir d’autres intérêts que les siens : mais elle n’est bien elle-même que quand, libre de toute préoccupation étrangère, elle s’élève vers la vérité qui seule est son objet réel et seule peut la satisfaire pleinement. Il en est de même de l’art ; c’est lorsqu’il est ainsi libre et indépendant qu’il est véritablement l’art (…) Quant au reproche d’indignité qui s’adresse à l’art comme produisant ses effets par l’apparence et l’illusion, il serait fondé si l’apparence pouvait être regardée comme quelque chose qui ne doit pas être. Mais l’apparence est nécessaire au fond qu’elle manifeste, et est aussi essentielle que lui. (…) Nous devons examiner l’opinion qui admet que l’art peut bien se prêter à des réflexions philosophiques, mais non être l’objet d’une science régulière et d’une théorie systématique. Ici nous rencontrons ce préjugé qui refuse le caractère scientifique aux recherches de la philosophie. Nous nous contenterons de faire observer que philosophie et science sont deux termes inséparables : car le propre de la pensée philosophique est de ne pas considérer les choses par leur côté extérieur et superficiel, mais dans leurs caractères essentiels et nécessaires. Pour ce qui est de l’objection : – les beaux-arts échappent à la science, parce qu’ils sont des créations libres de l’imagination et ne s’adressent qu’au sentiment, – elle paraît plus sérieuse ; car on ne peut nier que le beau dans l’art n’apparaisse sous une forme précisément opposée à la pensée réfléchie, forme que celle-ci est obligée de détruire lorsqu’elle veut la soumettre à ses analyses. Ici vient se placer en outre l’opinion de ceux qui prétendent que la pensée scientifique, en s’exerçant sur les œuvres de la nature et de l’esprit, les défigure et leur enlève la réalité et la vie. (…)L’art étant reconnu comme une création de l’esprit, on peut se demander quel besoin l’homme a de produire des œuvres d’art. Ce besoin est-il accidentel ? est-ce un caprice et une fantaisie, ou bien un penchant fondamental de notre nature ? »

L’Esthétique, Hegel

Le surréalisme

Art, science et révolution

Simon Diner

Sciences et imagination

Léonard de Vinci

Yves Michaud

La science et les arts

Jean-Jacques Rousseau

L’Encyclopédie de Diderot

The Art of Science

On the Arts and Sciences of Human Inequalitéy

Le point de vue du mathématicien

Anne-Marie Duguet et Jean-Claude Améisen

Jean-Pierre Changeux

Jean-Pierre Mohen

Bruno Mottin

Jacques Morizot

Fractales, art et sciences

Mandelbrot

Ensemble fractal

Pas de progrès linéaire historique hiérarchique en art

Discussion sur l’art

Qu’est-ce que l’art et qu’est-ce qui le différencie des ouvrages utilitaires, de nécessité personnelle ou collective ?

Marx and Engels on Art and Science

Historical Materialism and the Arts

Art and Social Life

Art and the Beauty of the Earth

La science de l’art des formes du développement des espèces de D’Arcy Thomson

L’art animal

Une science du beau

Si nous jetons un coup d’œil sur tout ce qu’embrasse l’existence humaine, nous avons le spectacle des intérêts divers qui se partagent notre nature et des objets destinés à les satisfaire. Nous remarquons d’abord l’ensemble des besoins physiques, auxquels correspondent toutes les choses de la vie matérielle, et auxquels se rattachent la propriété, l’industrie, le commerce ...

A un degré plus élevé se place le monde du droit : la famille, l’état et tout ce que celui-ci renferme dans son sein. vient ensuite le sentiment religieux, qui, né dans l’intimité de l’âme individuelle, s’alimente et se développe au sein de la société religieuse. Enfin la science s’offre à nous avec la multiplicité de ses directions et de ses travaux, embrassant dans ses divisions l’universalité des êtres. Dans le même cercle se meut l’art, destiné à satisfaire l’intérêt que l’esprit prend à la beauté, dont il lui présente l’image sous des formes diverses.

Toutes ces sphères différentes de la vie existent ; nous les trouvons autour de nous. Mais la science ne se contente pas du fait : elle se demande quelle est leur nécessité et les rapports qui les unissent.

La faculté la plus élevée que l’homme puisse renfermer en lui-même, nous l’appelons d’un seul mot, la liberté.

La liberté est la plus haute destination de l’esprit.

Elle consiste en ce que le sujet ne rencontre rien d’étranger, rien qui le limite dans ce qui est en face de lui, mais s’y retrouve lui-même. Il est clair qu’alors la nécessité et le malheur disparaissent. Le sujet est en harmonie avec le monde et se satisfait en lui. Là expire toute opposition, toute contradiction. Mais cette liberté est inséparable de la raison en général, de la moralité dans l’action, et de la vérité dans la pensée. Dans la vie réelle, l’homme essaie d’abord de détruire l’opposition qui est en lui par la satisfaction de ses besoins physiques. Mais tout dans ces jouissances est relatif, borné, fini.

Il cherche donc ailleurs, dans le domaine de l’esprit, à se procurer le bonheur et la liberté par la science et l’action. Par la science, en effet, il s’affranchit de la nature, se l’approprie et la soumet à sa pensée. Il devient libre par l’activité pratique en réalisant dans la société civile la raison et la loi avec lesquelles sa volonté s’identifie, loin d’être asservie par elles. Néanmoins, quoique, dans le monde du droit, la liberté soit reconnue et respectée, son côté relatif, exclusif et borné est partout manifeste ; partout elle rencontre des limites. L’homme alors, enfermé de toutes parts dans le fini et aspirant à en sortir, tourne ses regards vers une sphère supérieure plus pure et plus vraie, où toutes les oppositions et les contradictions du fini disparaissent, où la liberté, se déployant sans obstacles et sans limites, atteigne son but suprême. Telle est la région du vrai absolu dans le sein duquel la liberté et la nécessité, l’esprit et la nature, la science et son objet, la loi et le penchant, en un mot, tous les contraires s’absorbent et se concilient. S’élever par la pensée pure à l’intelligence de cette unité qui est la vérité même, tel est le but de la philosophie.

Par la religion aussi, l’homme arrive à la conscience de cette harmonie et de cette identité qui constituent sa propre essence et celle de la nature ; il la conçoit sous la forme de la puissance suprême qui domine le fini, et par laquelle ce qui est divisé et opposé est ramené à l’unité absolue.

L’art, qui s’occupe également du vrai comme étant l’objet absolu de la conscience, appartient aussi à la sphère absolue de l’esprit. A ce titre, il se place dans le sens rigoureux du terme sur le même niveau que la religion et la philosophie ; car elle aussi, la philosophie, n’a d’autre objet que Dieu ; elle est essentiellement une théologie rationnelle. C’est le culte perpétuel de la divinité sous la forme du vrai

Semblables pour le fond et l’identité de leur objet, les trois sphères de l’esprit absolu se distinguent par la forme sous laquelle elles le révèlent à la conscience.

La différence de ces trois formes repose sur l’idée même de l’esprit absolu. L’esprit, dans sa vérité, n’est pas un être abstrait séparé de la réalité extérieure, mais renfermé dans le fini qui contient son essence, se saisit lui-même et, par là, devient lui-même absolu. Le premier mode de manifestation par lequel l’absolu se saisit lui-même est la perception sensible ; le second, la représentation interne dans la conscience ; enfin le troisième, la pensée libre.

1° La représentation sensible appartient à l’art qui révèle la vérité dans une forme individuelle. Cette image renferme sans doute un sens profond, mais sans avoir pour but de faire comprendre l’idée dans son caractère général ; car cette unité de l’idée et de la forme sensible constitue précisément l’essence du beau et des créations de l’art qui le manifestent, et cela même dans la poésie, l’art intellectuel, spirituel par excellence.

Si l’on accorde ainsi à l’art la haute mission de représenter le vrai dans une image sensible, il ne faut pas soutenir qu’il n’a pas son but en lui-même. La religion le prend à son service, lorsqu’elle veut révéler aux sens et à l’imagination la vérité religieuse. Mais c’est précisément lorsque l’art est arrivé à son plus haut degré de développement et de perfection qu’il rencontre ainsi dans le domaine de la représentation sensible le mode d’expression le plus convenable pour l’exposition de la vérité. C’est ainsi que s’est accomplie l’alliance et l’identité de la religion et de l’art en Grèce. Chez les Grecs, l’art fut la forme la plus élevée sous laquelle la divinité, et en général la vérité fut révélée au peuple. Mais à une autre période du développement de la conscience religieuse, lorsque l’idée fut devenue moins accessible aux représentations de l’art, le champ de celui-ci fut restreint sous ce rapport.

Telle est la véritable place de l’art comme destiné à satisfaire le besoin le plus élevé de l’esprit.

Mais si l’art s’élève au-dessus de la nature et de la vie commune, il y a cependant quelque chose au-dessus de lui, un cercle qui le dépasse dans la représentation de l’absolu. De bonne heure, la pensée a protesté contre les représentations sensibles de la divinité par l’art. Sans parler des Juifs et des mahométans, chez les Grecs mêmes Platon condamne les dieux d’Homère et d’Hésiode. En général, dans le développement de chaque peuple, il arrive un moment où l’art ne suffit plus. Après la période de l’art chrétien, si puissamment favorisé par l’église, vient la Réforme, qui enlève à la représentation religieuse l’image sensible pour ramener la pensée à la méditation intérieure. L’esprit est possédé du besoin de se satisfaire en lui-même, de se retirer chez lui, dans l’intimité de la conscience comme dans le véritable sanctuaire de la vérité. C’est pour cela qu’il y a quelque chose après l’art. Il est permis d’espérer que l’art est destiné à s’élever et à se perfectionner encore. Mais en lui-même il a cessé de répondre au besoin le plus profond de l’esprit. Nous pouvons bien trouver toujours admirables les divinités grecques, voir Dieu le père, le Christ et Marie dignement représentés ; mais nous ne plions plus les genoux.

Immédiatement au-dessus du domaine de l’art se place la religion, qui manifeste l’absolu à la conscience humaine, non plus par la représentation extérieure, mais par la représentation interne, par la méditation. La méditation transporte au fond du cœur, au foyer de l’âme, ce que l’art fait contempler à l’extérieur. Elle est le culte de la société religieuse dans sa forme la plus intime, la plus subjective et la plus vraie.

Enfin la troisième forme de l’esprit absolu, c’est la philosophie ou la raison libre, dont le propre est de concevoir, de comprendre par l’intelligence seule ce qui ailleurs est donné comme sentiment ou comme représentation sensible. Ici se trouvent réunis les deux côtés de l’art et de la religion, l’objectivité et la subjectivité, mais transformés, purifiés et parvenus à ce degré suprême où l’objet et le sujet se confondent, et où la pensée le saisit sous la forme de la pensée.

Extrait du livre de HEGEL : Esthétique

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