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Et si l’australopithèque était un homme et pas un singe

samedi 7 septembre 2019, par Robert Paris

Et si l’australopithèque était un homme et pas un singe

Faut-il réhabiliter les Australopithèques ?

Et si l’australopithèque (ou certains types d’australopithèques) était un homme et pas un singe ? Et s’il n’y avait pas de frontière nette entre singes et hommes ?

Il y a du changement dans la paléoanthropologie : il n’y a pas si longtemps, on vous aurait dit clairement que les australopithèques étaient des singes, et même les singes du sud. Mais les fouilles ne semblent plus aller dans ce sens !!! La bipédie de l’australopithèque Lucy et les outils fabriqués par certains autralopithèques sont passés par là… Et nous sommes moins affirmatifs sur la nécessité dun gros cerveau pour devenir un homme… L’australopithèque dispose probablement d’un langage rudimentaire, d’une vie sociale. Il fabrique des outils en vue d’une utilisation immédiate.

Australopithecus est la preuve que l’apparition de la bipédie a largement précédé celle d’un cerveau plus volumineux et plus complexe. On débat toujours pour savoir comment la bipédie est apparue il y a plus de 7 millions d’années (plusieurs théories s’affrontent toujours). La bipédie avait notamment pour avantages de libérer les mains pour pouvoir attraper des objets, tandis que les yeux pouvaient mieux examiner au-dessus des grandes herbes pour trouver des sources d’aliments possibles ou repérer des prédateurs.
Les changements radicaux dans la morphologie sont survenus avant la séparation entre Australopithèques et Homo. La structure du bassin et des pieds les distinguent en effet à peine des hommes modernes. Les dents présentent aussi le même alignement avec des petites canines. Pourtant, l’évolution vers les Paranthropes a donné naissance à une denture plus grande et plus robuste. Les Australopithèques devaient faire face à un défi particulier en vivant dans la savane. Ils étaient les primates les plus lents à se déplacer de leur temps et beaucoup d’entre eux ont fini au menu des carnivores africains (comme les lions, et Dinofelis aujourd’hui éteint).
La structure des mains des australopithèques est proche de celle des humains. L’articulation de la première phalange du pouce ne permet pas tous les mouvements d’une main d’homme moderne. Cette structure analogue indique cependant que les australopithèques étaient peut-être capables de façonner des outils rudimentaires.

Les Australopithèques apparaissent à l’Est et au Sud de l’Afrique, le long du sillon éthiopien, il y a 4 millions d’années. Leur évolution se poursuit pendant près de 2 millions d’années. Un des derniers connus, l’Australopitecus garhi, commence à tailler des pierres.

Il existe plusieurs espèces. Les plus connus sont :

Australopithecus anamensis

Australopithecus afarensis

Australopithecus africanus

Australopithecus garhi

Australopithecus bahrelghazali

Les Paranthropus sont également classés dans les Australopithèques.

La découverte d’outils humains vieux de 3,3 millions années, annoncée dans la revue Nature, révolutionne les connaissances sur l’évolution humaine.

La découverte, faite à l’ouest du lac Turkana au Kenya, recule de 700 000 ans l’apparition des premiers outils de pierre taillée. A ce jour, les plus anciens instruments dataient de 2,5 millions d’années. Ils avaient été découverts sur le site de Gona en Ethiopie.

Ces nouveaux vestiges sont également 500 000 ans plus anciens que les premiers restes du genre Homo, notre ancêtre direct.

« Alors que la communauté scientifique a longtemps supposé que les premiers outils de pierre avaient été fabriqués par le genre Homo, notre découverte montre qu’un autre genre d’hominidé, peut-être une forme d’australopithèque plus ancienne, avait déjà toutes les capacités cognitives et motrices nécessaires à la fabrication d’outils », explique Sonia Harmand, de l’université Stony Brook, chargée de recherche au CNRS.

Jusqu’à maintenant les scientifiques considéraient que les Australopithèques étaient capables d’utiliser des outils, mais incapables de les fabriquer.

« Notre découverte réfute l’hypothèse de longue date selon laquelle Homo habilis a été le premier fabricant d’outils », poursuit la chercheuse française qui codirige le West Turkana Archaeological Projet.

Ces nouveaux instruments mis au jour sont en majorité des blocs de lave, lourds et volumineux servant d’enclume, des percuteurs, des éclats ou des nucléus (des blocs de pierre débités pour produire des éclats ou des lames).

Ces objets évoquent deux modes de fabrication d’outils  : la technique dite « sur enclume » - le bloc est maintenu sur l’enclume par une main pendant que l’autre utilise le percuteur pour frapper et obtenir des éclats tranchants - et la technique dite « sur percuteur dormant » - le bloc à tailler est directement percuté sur l’enclume.

Selon le CNRS, la grande variété des objets trouvés montre clairement que l’intention de ces hominidés était de créer des outils.

« Il est difficile de reconstituer le mode de vie des premiers hommes et des Australopithèques », commente Sonia Harmand  : « On en sait plus sur leurs caractéristiques anatomiques grâce à la découverte de leurs restes osseux, que sur leurs comportements de subsistance ou même leur organisation sociale ».

« L’idée que les outils ont servi à découper de la viande (pour les éclats tranchants) ou à avoir accès à la moelle des os (pour les plus gros blocs) est la plus conventionnelle », souligne-t-elle. « Mais à ce stade de nos recherches, il est trop tôt pour en dire plus ».

Qu’est-ce qui oppose ou, au moins, distingue les Homo aux Australopithèques ? C’est beaucoup moins probant qu’on pourrait le penser…

Jean-Paul Demoule répond dans « Les dix millénaires oubliés qui ont fait l’histoire » :

« Le genre « Homo » regroupe l’ensemble des formes humaines à partir de 2,5 millions d’années environ. Toutefois, les ancêtres des humains se sont séparés des autres primates il y a entre huit et dix millions d’années environ. Il y a donc une série d’espèces humaines ou préhumaines qui ne sont pas rangées strictement dans le genre « Homo », comme les Australopithèques. On a traditionnellement utilisé le terme « Homo » à partir du moment où on pouvait identifier des outils taillés… bien que des animaux utilisent outils ; d’où le terme d’ « Homo habilis », homme habile, donné en 1964 à la première forme humaine possédant avec certitude des outils. Toutefois, la découverte d’outils associés à des Australopithèques est venue récemment brouiller ces classifications…

Le plus vieux de la lignée humaine est aujourd’hui Toumaï, découvert au Tchad et qui date de 7 millions d’années. Après diverses formes successives ou parallèles émergent les différentes variantes des Australopithèques (dont Lucy, il y a environ 3,5 millions d’années), qui fabriquent les premiers outils certains, en pierre…

Les Australopithèques (dont le nom signifie en grec « singe du Sud ») émergent progressivement des lignées humaines précédentes il y a environ quatre à cinq millions d’années, dans toute la partie orientale de l’Afrique. Ils sont les premiers à tailler des outils en pierre certains. Ils se tenaient debout, mais avaient encore de bonnes dispositions anatomiques pour grimper aux arbres…

Les préhistoriens ne parlent habituellement d’ « hommes », d’ »Homo » dans les dénominations savantes, forcément latines, qu’à partir du moment où ils retrouvent des outils associés à des hommes préhistoriques… Cette définition de l’homme pourrait paraître une évidence. Le problème, c’est que d’autres primates, classés « animaux » ont des outils… Il n’y aurait donc aucune raison de penser que les primates humains, antérieurs aux « Homo » officiels, n’auraient pas manié d’outils… Tout a changé en 2015, quand une équipe française a découvert au Kenya, sur le site de Lomekwi, de lourds outils en pierre, datés de… 3,3 millions d’années, donc bien avant « Homo habilis ». Ils n’ont donc pu avoir été fabriqués que par des « singes du Sud », dont une variante, le Kenyanthrope (ou, plus exactement le « Kenyanthropus platyops », l’homme du Kenya à face plate), vivait à proximité – même s’il n’est attesté jusqu’à présent que par les restes fragmentaires d’un seul individu à face plate…

Les premiers objets fabriqués par les humains, du moins ceux qui sont parvenus jusqu’à nous, n’étaient pas particulièrement beaux. C’étaient de grosses pierres éclatées, pesant plusieurs kilos, que maniaient des Australopithèques du côté du Kenya il y a près de trois millions et demi d’années… »

Des outils de pierre taillée ont été découverts à Lomekwi, au Kenya, et sont datés de 3,3 millions datés, ce qui signifie qu’ils précèdent de 700.000 ans les plus anciens outils connus jusque là. Cela n’est pas le problème essentiel de cette découverte. Elle signifie quelque chose de bien plus renversant : les êtres humains n’existaient pas sur terre quand ces outils ont été taillés !!! Les outils trouvés à Lomecki sont bien plus vieux que l’homo habilis, plus vieux de 700.000 ans, ce n’est pas rien ! Il devient donc nécessaire de supposer qu’avant ce que nous appelons jusqu’à présent l’homme, à l’époque des hominines comme Kenyanthropus playtyops dont les fossiles sont, eux, datés de 3,5 à 3,3 millions d’années. Si ce n’était pas lui, l’auteur de ces tailles de pierres, cela devrait être un autre australopithèque comme Australopithecus afarensis du type de Lucy, dont les fossiles sont datés entre 4,1 et 3 millions d’années. Ou encore quelqu’un comme Australopithecus deyiremeda, Australopithecus bahrelghazali ou Australopithecus africanus.
En tout cas, il y a plus de trois millions d’années, un ancêtre des hommes qui pouvait aussi être un ancêtre des singes a été capable de tailler des pierres, capacité qui n’est pas à réserver à l’homme.
On pourrait se dire : pas de problème, c’est la datation des outils qui est fausse mais il ne semble pas. Plusieurs méthodes ont été employées par les chercheurs. D’autres part, les sédiments et les cendres volcaniques qui entourent les outils rendent la datation plus sure.
En fait, une telle découverte aurait pu être devinée sachant que les grands singes ne sont jamais bien loin de l’utilisation et de la fabrication d’outils.
Les techniques employées pour tailler des outils sur ce site sont simples mais pas tout à faité élémentaires et il y a même deux sortes différentes de tailles de la pierre (technique bipolaire sur enclume et technique sur percuteur dormant). Elles nécessitent déjà une certaine évolution de la capacité manuelle et de la compréhension des manières de se servir de la structure de la pierre pour détacher les éclats.
L’étude scientifique révèle qu’il s’agissait d’hominines bipèdes qui devaient mesurer entre un mètre et un mètre cinquante.
Il faut remarquer que ce n’est pas la première fois que l’on découvre des pierres taillées datées d’époques qui dépassent les homos et qui ont été sans doute produits par des australopithèques. Ainsi, Jean Chaline remarque dans « Un million de générations – Aux sources de l’humanité » : « Les plus anciens outils découverts à ce jour sont ceux exhumés par Hélène Roche et Silashi Semaw en Ethiopie dans les régions de Kada Gona et Kada Hadar. Ils dateraient de – 2,6 à – 2,5 millions d’années, bien avant l’apparition des premiers hommes vers – 2 à – 1,8 million d’années, ce qui suggère leur réalisation matérielle par des australopithèques d’Ethiopie. »

Quentin Mauguit :
« Au départ, nous avons interprété les capacités des Hommes un peu à l’envers. Pour utiliser les outils et parler, il faut être intelligent. Pour ce faire, il faut avoir un gros cerveau. Donc nous nous sommes d’abord dit que les australopithèques ne pouvaient pas faire d’outils, que c’était forcement propre au genre Homo. D’autres erreurs similaires ont été commises concernant les capacités de langage. Seul Homo sapiens aurait été capable de parler. Il aurait été le seul à posséder un cerveau suffisamment grand. Plusieurs découvertes récentes ont montré que les australopithèques et les paranthropes fabriquaient des outils. Au final, la taille du cerveau n’a pas un lien direct avec ces capacités. « Nous montrons maintenant que tous les ancêtres de l’Homme possédaient des cerveaux asymétriques. Ils ont donc tous au moins un support anatomique dont on sait qu’il joue un rôle dans les capacités manuelles et dans les capacités de langage. Cela enlève cette idée très simplificatrice voulant que seul Homo sapiens ait été capable de parler et d’utiliser des outils. »

Claudine Cohen dans sa conférence pour l’Université de tous les savoirs en janvier 2000 :

« L’évolution humaine a commencé par les pieds aimait à dire par provocation André Leroi-Gourhan, insistant sur le fait que l’acquisition de la bipédie précède dans l’histoire humaine précède dans l’histoire humaine le développement du cerveau. De fait, des découvertes récentes ont montré que la bipédie a sans doute été acquise très tôt dans l’histoire de la famille humaine, il y a 3 ou 4 millions d’années. Les études menées sur la locomotion des australopithèques ont conclu que ceux-ci marchaient déjà sur leurs deux pieds, même s’il leur arrivait parfois de se déplacer par brachiation – en se suspendant à l’aide des bras. Les traces de pas découvertes en 1977 à Laetoli (Tanzanie) et datées de 3,6 millions d’années sont bien celles de deux individus parfaitement bipèdes, marchant côte à côte… Elles ont confirmé le fait que la station redressée et la marche bipède étaient déjà acquises par ces hominidés primitifs – bien avant que la taille du cerveau n’atteigne son développement actuel. Le développement du cerveau est certainement le trait le plus remarquable de la morphologie humaine. (...) La question reste cependant posée du « Rubicon cérébral » - elle implique qu’il existerait une capacité endocrânienne au delà de laquelle on pourrait légitimement considérer qu’on a affaire à des représentants du genre Homo, dignes d’entrer dans la galerie de nos ancêtres…La définition, longtemps discutée, d’Homo Habilis comme premier représentant du genre humain, a fait reculer cette frontière à 600 cm3 … et peut-être encore moins : il faut bien admettre que le développement du cerveau n’a pas été l’unique « moteur » du développement humain ; il s’associe à d’autres traits anatomiques propres à l’homme, station redressée, bipédie, morphologie de la main, fabrication et utilisation d’outils, usage d’un langage articulé… (...) L’avènement d’une « conscience » proprement humaine se situerait donc du côté de ses productions techniques. L’outil est-il autant qu’on le pensait naguère porteur de la différence irréductible de l’homme ? (...) Si l’outil définit l’homme, l’apparition de l’homme proprement dit ne coïncide pas avec celle de l’outil. Certains grands singes savent utiliser et même fabriquer des outils. (...) Certains chercheurs n’hésitent pas à parler de « comportements culturels » chez ces singes. D’autre part, les première industries de pierre sont probablement l’œuvre des australopithèques : ces hominidés au cerveau guère plus volumineux que celui d’un gorille sont-ils des auteurs des pebble tools ou des industries sur éclats vieilles d’environ 2,5 millions d’années – qui ont été trouvées associées à eux dans certains sites africains ? (...) Il a donc fallu repenser les « seuils » qui naguère semblaient infranchissables, non seulement entre grands singes et premiers hominidés, mais aussi entre les différents représentants de la famille humaine. »

Sophie de Beaune :
« Chronologiquement d’abord, doit-on considérer que la préhistoire commence avec l’histoire de l’homme, comme le suggère Henri-Irénée Marrou ? Si oui, s’agit-il de l’homme anatomiquement moderne, auquel cas elle débuterait il y a 100 000 ou 150 000 ans, dates susceptibles de reculer en fonction des découvertes ? Ou bien doit-on y inclure les premiers représentants du genre « Homo » et remonter alors plus de 2 millions d’années ? On peut aussi la faire débuter avec les premiers outils, il y a quelque 3 millions d’années, et y inclure alors les Australopithèques car il n’est pas exclus que ces outils soient leur œuvre. (…) Pour les préhistoriens eux-mêmes, il va de soi que la préhistoire inclut aussi l’étude des Australopithèques ou des premiers représentants du genre Homo, mais si vous interrogez d’autres archéologues, en particulier ceux travaillant sur des périodes plus récentes de la protohistoire aux périodes historiques, certains vous répondront sans hésiter que ces très hautes époques relèvent du domaine des sciences naturelles – paléoanthropologie ou paléontologie. (…) En 1960, lorsque Mary Leakey découvre dans le célèbre site kenyan d’Olduvaï des fragments humains crâniens et postcrâniens, elle n’hésite pas à donner à ce nouveau spécimen le nom d’ « Homo habilis » en raison de la présence d’outils en pierre taillée dans des niveaux contemporains, datés de 1,75 millions d’années. Un niveau aussi ancien avait pourtant livré l’année précédente un crâne de « Paranthropus boisei », une variante de ce qu’on appelait alors les Australopithèques robustes. il ne vint bien entendu à personne l’idée que cet Australopithèque aurait ou être l’auteur de ces outils taillés. Pourtant, des découvertes plus récentes laissent planer le doute et on ignore aujourd’hui qui, des Australopithèques, ou des premiers Homo, ont taillé pour la première fois la pierre…

L’étude du squelette quasi complet d’un enfant australopithèque permettra peut-être de mieux cerner la généalogie de ces hominidés bipèdes et, plus généralement, de la lignée humaine dont les origines font l’objet de virulentes polémiques entre les chercheurs. De fait, si on a longtemps présenté Lucy -une Australopithecus afarensis découverte en Éthiopie en 1974 et vieille de 3,2 millions d’années - comme la « mère » de l’humanité, l’origine et la place des australopithèques dans l’évolution de l’humanité semblent aujourd’hui beaucoup moins claires pour les anthropologues.

Plusieurs espèces d’australopithèques ont été identifiées, toutes en Afrique, depuis la découverte du premier spécimen d’Australopithecus africanus en 1924 . La plus connue du grand public est sans doute Australopithecus afarensis , l’espèce à laquelle appartenait Lucy et l’enfant de 3 ans récemment mis à jour. Les Afarensis, qui ont vécu dans l’est de l’Afrique entre 4 et 2,7 millions d’années, ont longtemps été les plus anciens hominidés bipèdes connus. A ce titre, on les considérait comme les ancêtres directs des autres australopithèques contemporains d’Homo habilis , mais aussi de l’Hommes moderne.

Cette hypothèse a été sérieusement remise en question par la découverte, au nord du Kenya puis en Ethiopie , de plusieurs spécimens d’Australopithecus anamensis. Cet hominidé bipède qui a vivait entre 4,1 et 3,9 millions d’années pourrait donc être l’ancêtre des afarensis. C’est en tout cas ce que pensent Tim White et l’équipe internationale de paléoanthropologues qui ont récemment mis à jour une trentaine de fossiles d’anamensis dans des zones où l’on a aussi découvert des fossiles d’afarensis.

Dans un article publié en avril par Nature, ces chercheurs proposent d’ailleurs un nouvel ancêtre commun à tous les australopithèques : Ardipithecus ramidus. Bien que manifestement bipède, cet hominidé qui aurait vécu entre 5,8 et 4 millions d’années, possédait aussi beaucoup de caractères simiesques.

Par ailleurs, en 2000, Brigitte Senut et Martin Pickford du Musée National d’Histoire Naturelle de Paris ont identifié une mâchoire appartenant à un hominidé vieux de plus de 6 millions d’années baptisé Orrorin tugenensis . Orrorin possède un mélange de caractères humains et simiesques. Mais bien que 3 millions d’années plus vieux que les Australopithèques comme Lucy, il semble anatomiquement plus proche de l’homme moderne que ne l’est notre prétendue ancêtre. Selon Brigitte Senut, cette découverte force les anthropologues à revoir les scénarios sur les origines de l’homme. Elle suggère notamment que les Australopithèques ne sont pas nos ancêtres directs, mais représentent en fait une branche latérale, et désormais éteinte, de notre arbre généalogique.

Datés entre 1,78 et 1,95 million d’années, deux fossiles fragmentaires préhumains compliquent l’enquête sur l’origine du genre humain, Homo. Trouvés ensemble, les deux spécimens proviennent de la grotte de Malapa, dans la province sud-africaine du Gauteng ; ils ont conduit Lee Berger, de l’Université du Witwatersrand, et ses collègues suisses, américains et australiens à définir une nouvelle espèce d’australopithèque, qu’ils ont nommée Australopithecus sediba, d’après le mot qui désigne « fontaine » (sediba) en langage sesotho.

Au. sediba descend probablement de Au. africanus, un australopithèque qui a vécu en Afrique il y a entre 3,5 et 2,5 millions d’années, et dont la plupart des fossiles ont été découverts en Afrique du Sud. Plutôt gracile, Au. africanus passe pour plus proche de l’homme moderne que Au. afarensis (4,1 à 3 millions d’années) apparu en Afrique orientale. De fait, les deux spécimens de Malapa montrent plus de caractéristiques crâniennes et postcrâniennes (tout le squelette hors le crâne) en commun avec les premières espèces humaines qu’avec aucune autre espèce d’australopithèque.

La signification de ces traits communs avec nombre de fossiles généralement attribués au genre Homo n’est pas claire. Les caractéristiques du squelette de Au. sediba font penser autant à celles de Homo rudolfensis (2,4 à 1,6 millions d’années), ancêtre envisagé de Homo erectus (1 million d’années à 300 000 ans) – ce qui suggèrerait une trajectoire évolutive Au. sediba —> H. rudolfensis —> H. erectus – qu’à celles de Homo habilis (2,5 à 1,8 millions s’années) – ce qui indiquerait une trajectoire évolutive Au. sediba —> H. habilis —> H. erectus.

Si les traits du squelette de Au. sediba en font sans aucun doute un australopithèque, certaines caractéristiques de son os coxal (os recevant l’articulation de la hanche) le rapprochent bien plus des espèces humaines « récentes », telle H. erectus (l’« homme dressé »), que des anciennes (H. habilis ou H. rudolfensis) ou des autres australopithèques. Et nombre des traits du crâne de Au. sediba apparaissent chez H. erectus aussi, mais pas chez H. habilis et H. rudolfensis. Ainsi, Au. sediba semble être un ancêtre de H. erectus sans être nécessairement celui de H. habilis ou de H. rudolfensis, ses « contemporains » en termes de datation. Pour compliquer encore la situation, il existe des fossiles attribués au genre Homo plus anciens que Au. sediba. L’ancêtre australopithèque du genre humain aurait donc vécu avant les spécimens de la grotte de Malapa, ce qui, sauf à remettre en cause le caractère humain des plus vieux fossiles attribués au genre Homo, ne milite pas pour que Au. sediba soit notre ancêtre…

Qu’en conclure ? Que le nouvel australopithèque aux caractéristiques si humaines pourrait être notre ancêtre ou… ne pas l’être. Quoi qu’il en soit, il est clair que le genre Homo est apparu au cours d’un bourgeonnement évolutif du rameau australopithèque qui a produit de nombreuses formes proches.

La suite

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Kenyanthropus platyops

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